Malgré son titre, le nouvel album d’Aude Picault a peu à voir avec la plomberie même si l’ajustement des cœurs n’est pas sans rapport avec les problèmes de robinet que doivent résoudre chaque jour les agents de la multinationale Ideal Standard. Claire, 32 ans, infirmière en néonatologie, plutôt gironde, sensible et sociable, est malheureuse en amour. Elle collectionne les amants sans parvenir à les retenir, quand elle ne s’en lasse pas elle-même.
Elle ne demande pourtant pas l’impossible, simplement une forme… d’idéal standard. Elle espère un amant tendre et attentionné, mais rencontre des lâches, des goujats, des infantiles. Avec Franck, un trader décomplexé, cela pourrait marcher. Mais la jeune femme doit multiplier les concessions à un compagnon toujours plus machiste, de la cuisine à la chambre à coucher, jusqu’à la rupture.
Placé sous le patronage de Virginia Woolf, Germaine Greer, Elena Gianini Belotti, Christiane Olivier, Elisabeth Badinter, Françoise Héritier, Elisa Brune et Yves Ferroul, dont les livres sont cités en référence, Idéal standard pose un constat désenchanté sur les relations entre les sexes. Il livre surtout un fin portrait de jeune femme d’aujourd’hui confrontée au défi de la conjugalité. Toujours souple et épuré, à peine relevé de quelques aplats de couleur jaune, bleu ou rose qui font ressortir un vêtement ou un élément du décor, le trait d’Aude Picault va à l’essentiel : la forme et le mouvement d’un corps, un regard, une attitude. Sous des dehors "girly", le propos en ressort d’autant plus implacable. Fabrice Piault