Nombre de ceux qui le tentent, et pas seulement les écrivains, le savent : si vous avez du ménage à faire, une poubelle à sortir ou un rendez-vous chez le dentiste, commencez par vous asseoir à votre table pour écrire. Soudain, les tâches les plus ennuyeuses deviennent des tentations irrépressibles. Pourquoi je vous parle de cela ? Certains, avec qui j'ai rendez-vous ici, le savent que trop bien: j'ai un livre sur le feu depuis 4, 5 ans. J'en suis à ma troisième version et je souffre de plus en plus (surtout quand s'ajoute une cruralgie, bien nommée, après un déménagement...) Mieux que le ménage, le dentiste, depuis que l'on écrit sur son ordinateur, la tentation s'est raffinée pour échapper à son devoir. Vérifier une orthographe -Google !-, un peu de détente après un paragraphe difficile -hop, un jeu électronique !- l'attente de la réponse d'un éditeur, vite -aller vérifier sa boîte mail !-, etc. Dans ce monde virtuel, même plus la peine de sortir de chez soi pour aller voir un ami quand la journée s'éternise : FACE-BOOK ! On peut dix fois par jour y aller aux nouvelles en partageant une vidéo cocasse, en débattant d'un « sujet de société », en profitant d'amis à gogos ! On peut même faire des infidélités à Livres Hebdo en publiant une courte chronique d'un « SBF », blog sans domicile fixe Mais, à la longue, la gastro d’une récente amie (virtuelle) sur FB, les ronchonnements répétés d’un vieil ami (réel) qui ne supporte pas le « mariage pour tous », finissent par lasser le fan des réseaux sociaux. C'était en l'an 2000, si Google se souvient bien, que j'ai lu La fuite aux Agriates . Un choc, une merveille, une révélation que ce roman qui m'en a appris plus sur la Corse que tous les reportages qui m'ont mené à Aleria, Bastia, Ajaccio à chaque explosion sur l'île noire. J'imaginais l'auteure, allez savoir jusqu'où se nichent les clichés, en vieille femme tout de noir vêtue tutoyant le destin qui fait l'âme corse. Et puis, sur Facebook, j'ai découvert que Marie Ferranti, non seulement n'était pas morte mais qu'elle avait une jolie frimousse et qu'elle était une amie de Gilles Cohen Solal que j'ai vraiment rencontré pour la publication d' Alzheimer mon amour . Les amis de mes amis... Marie m'a accepté comme amie. J'ai, avec d'autres qui la connaissent depuis longtemps, été emporté par ses textes courts et profonds, charmé par les poèmes qu'elle offrait le soir à ses lecteurs avant que nous endormions. J'ai aimé sa chaleur humaine, rencontrée une véritable artiste, une belle personne. Et puis, comme nous le pressentions depuis quelques jours, elle nous a dit adieu hier. Adieu Facebook ! Fatiguée d'un système qui nous enferme parfois dans de vils sentiments et des amitiés qui n'en sont pas, elle est repartie à sa solitude d'écrivaine. Merci et salut Marie. Grâce à toi je me remets au travail.