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Meilleures ventes 2014 : merci pour l’amour

Olivier Dion

Meilleures ventes 2014 : merci pour l’amour

Valérie Trierweiler, ex-compagne de François Hollande, a créé la surprise et arrive en tête des ventes 2014. Mais les lecteurs, décidément fascinés par les histoires de couples, ont aussi vibré avec Fifty shades en poche et le thriller de Guillaume Musso.

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Par Claude Combet,
Hervé Hugueny,
Souen Léger,
Fabrice Piault,
Anne-Laure Walter,
Créé le 23.01.2015 à 14h31

C’est le succès qu’on n’attendait pas. A l’heure du bilan des meilleures ventes de livres en 2014, Merci pour ce moment de Valérie Trierweiler se retrouve en tête du Top 50 GFK/Livres Hebdo tous genres confondus, une position où l’on retrouve généralement plutôt un roman ou une BD. Le livre de l’ex-compagne de François Hollande a provoqué un raz-de-marée en librairie avec 603 300 exemplaires vendus dans l’Hexagone. Un score exceptionnel pour un document.

Parallèlement, le phénomène Fifty shades s’installe dans la durée : meilleure vente de l’année 2012 et de l’année 2013 en grand format, on retrouve la trilogie érotique de E. L. James en poche aux 2e, 6e et 9e places du Top 50, pour un total de 1 392 000 exemplaires. Et le film tiré du premier volume, réalisé par Sam Taylor-Johnson, qui sort le 11 février, pourrait bien en faire vendre encore davantage. Guillaume Musso connaît également une belle année avec Central Park, qui s’est vendu à 556 600 exemplaires, et son précédent livre, Demain, qui atteint 492 600 ventes en poche, soit 1 049 200 exemplaires au total.

Succès des trilogies

Besoin de se rassurer ? Passion pour un écrivain et son univers ? Les ventes se concentrent sur les trilogies et sur un même auteur, dont plusieurs livres figurent dans nos listes. Aux dépens parfois de la découverte. Outre Fifty shades et son 1,4 million de volumes vendus, on retrouve les trois Muchachas, la nouvelle comédie romantique de Katherine Pancol (782 300 ventes), les deux volumes de La femme parfaite est une connasse !, le pamphlet d’Anne-Sophie et Marie-Aldine Girard (812 600 ventes).

Derrière Guillaume Musso, d’autres auteurs sont présents avec plusieurs titres, comme Marc Levy (Un sentiment plus fort que la peur et Une autre idée du bonheur, 604 800 ventes), Gilles Legardinier (Complètement cramé ! et Demain, j’arrête !, 608 200 ventes) et Michel Bussi (Ne lâche pas ma main, Un avion sans elle et Nymphéas noirs, en Pocket, 694 700).

Inscrit dans le débat d’idées, Le suicide français d’Eric Zemmour se place en 12e position du Top 50 (338 200), devançant la rentrée littéraire et Charlotte de David Foenkinos, prix Renaudot et Goncourt des Lycéens (14e, 319 900), Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier de Patrick Modiano, prix Nobel de littérature 2014 (15e, 285 400), Le Royaume d’Emmanuel Carrère (19e, 260 000), Pas pleurer de Lydie Salvayre, prix Goncourt (25e, 227 100). Notons les bons scores de Comme un chant d’espérance de Jean d’Ormesson (28e, 205 900), Le collier rouge de Jean-Christophe Rufin (31e, 185 600) et, du côté des documents, de Voyages en absurdie de Stéphane De Groodt (27e, 207 400). Mémé de Philippe Torreton (170 000) crée la surprise.

Les livres pour la jeunesse apparaissent exceptionnellement dans le Top 50 grâce au cinéma. On retrouve Nos étoiles contraires de John Green, adapté au cinéma par Josh Boone (431 500), en 7e position, et les trois volumes de Divergente de Veronica Roth, dont le premier tome a été adapté par Neil Burger, en 33e, 36e et 46e positions pour un total de 509 900 ventes.

Un Top 50 en baisse

Dix-huit des cinquante titres de la liste sont des poches. Pocket est leader avec 9 titres, suivis du Livre de poche. De Fallois qui a lancé son propre poche pour La vérité sur l’affaire Harry Quebert de Joël Dicker a gagné son pari avec 375 700 ventes. Tandis que le recueil collectif 13 à table !, vendu au profit des Restos du cœur, atteint 257 100 ventes.

Selon GFK, notre nouveau prestataire après l’arrêt du service d’Ipsos (1), le total des ventes des 50 "blockbusters" est cependant en régression en 2014 avec 13 315 900 volumes vendus, pour un chiffre d’affaires de 174 millions d’euros, contre 14 092 868 volumes vendus et un chiffre d’affaires de 182,6 millions d’euros en 2013, soit une baisse de 5,5 % en volumes et de 4,7 % en valeur.

(1) Voir LH 1024, du 9.1.2015, p. 34.

La revanche d’une femme quittée

Valérie Trierweiler.- Photo OLIVIER DION

Ce fut un événement dans tous les sens du terme. Merci pour ce moment de Valérie Trierweiler, l’ex-compagne de François Hollande, a marqué fortement l’année 2014. Avec une parution tenue secrète par son éditeur Les Arènes (les libraires ont été contactés trois jours avant sa sortie le 4 septembre), un contenu très "people", des records de ventes et de nombreuses polémiques, le livre a bousculé le monde de l’édition et réveillé un marché du livre un peu atone.

Merci pour ce moment a joué sur la curiosité des lecteurs, les plongeant dans l’intimité d’une relation amoureuse et dans les coulisses du pouvoir. Au-delà de l’identification (même les hommes politiques connaissent une rupture), il a aussi éclairé la personnalité d’un président qui demeure énigmatique. Reste que la rapidité et l’ampleur des ventes ont surpris. Tiré dès le départ à 200 000 exemplaires, le livre s’est vendu à 145 000 exemplaires en quatre jours. Aujourd’hui, fort de 603 300 ventes, il est en tête du palmarès des documents comme du Top 50 tous genres confondus. Le tout sur fond de controverses qui ont assuré la promotion sans que l’auteure ne s’exprime : l’ex-compagne d’un président peut-elle étaler ses déboires amoureux ? Laurent Beccaria, fondateur des Arènes, éditeur de la revue XXI connu pour son exigence, devait-il publier un tel document ? Les libraires devaient-ils refuser de le vendre ?

Vendu dans 14 pays

Cette passion "à la française" a été suivie à l’étranger. Anna Jarota, l’agente de Valérie Trierweiler, a vendu les droits du livre dans 14 pays. Il est paru au Royaume-Uni, où l’auteure s’est déplacée pour la promotion, en Italie, en Espagne, au Portugal et en Roumanie, avec des "ventes moindres qu’en France mais variant entre 10 000 et 20 000 exemplaires, ce qui est déjà très bien", se félicite Anna Jarota. Valérie Trierweiler gère elle-même les droits audiovisuels, qui ne seraient pas encore vendus en dépit de ce qu’on peut lire dans la presse et sur les réseaux sociaux. Isabelle Adjani a démenti en être l’interprète. La productrice Saïda Jawad a juste annoncé début janvier dans Gala qu’elle en écrivait l’adaptation. Nouvelles polémiques, et nouvelles ventes, en perspective ?

Comment GFK calcule les chiffres de ventes

Le classement des meilleures ventes de l’année est réalisé par GFK pour Livres Hebdo.

Les chiffres indiqués sont des estimations obtenues à partir des ventes réelles (comptabilisées aux caisses des magasins), enregistrées du 1er janvier au 31 décembre 2014, en France métropolitaine, auprès d’un panel représentatif de près de 4 000 points de vente. Ce classement inclut à hauteur de leurs parts de marché tous les circuits de distribution de vente au détail : librairies de 1er et 2e niveaux, grandes surfaces culturelles, grandes surfaces alimentaires, Internet. Il exclut les ventes réalisées à l’export et dans les Dom, les ventes aux grossistes, les clubs et la VPC.

Romans : éclectiques !

 

Du thriller, une comédie romantique, un personnage historique… les lecteurs dévoilent des goûts éclectiques pour la fiction, dont les ventes apparaissent en recul par rapport à 2013.

 

Photo OLIVIER DION

Est-ce la rançon du succès de Merci pour ce moment de Valérie Trierweiler ? L’année 2014 a été moins favorable aux romans. Malgré les 556 600 ventes de Central Park, semblables à celles du 2e volume de Fifty shades en 2013, le chiffre d’affaires 2014 de la fiction, qui s’élève à 176,5 millions d’euros avec 9 161 900 exemplaires vendus, reste largement inférieur à celui de 2013 (201,6 millions d’euros pour 10 372 540 volumes vendus).

Avec Central Park, en tête du palmarès, Guillaume Musso a réussi son retour au thriller. De son côté, Katherine Pancol exploite avec succès la veine de la comédie romantique, dans la lignée de sa trilogie new-yorkaise (Les écureuils de Central Park sont tristes le lundi) : les trois volumes de Muchachas totalisent 782 300 ventes.

Avec ou sans prix

En 3e position, Charlotte, dans lequel David Foenkinos fait revivre Charlotte Salomon, peintre juive allemande morte à Auschwitz, s’est vendu à 319 900 exemplaires et prouve que l’auteur de La délicatesse a définitivement conquis le cœur des lecteurs ; s’y ajoutent les 58 400 exemplaires de La tête de l’emploi qu’il signe également chez J’ai lu. Charlotte, prix Renaudot et Goncourt des Lycéens, devance le Goncourt de Lydie Salvayre, Pas pleurer (227 100 ventes). On retrouve aussi dans le palmarès Constellation d’Adrien Bosc, grand prix du Roman de l’Académie française (109 700 ventes), et L’amour et les forêts d’Eric Reinhardt, prix Renaudot des Lycéens et prix Roman France Télévisions (93 100).

Les lecteurs ont aussi plébiscité le prix Nobel de littérature attribué à l’automne à Patrick Modiano. Son dernier livre, Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier, atteint 285 400 ventes. Tandis qu’Au revoir là-haut de Pierre Lemaitre, Goncourt 2013, a continué à se vendre en 2014 (167 800). Bien qu’il n’ait pas reçu de prix littéraire, Le Royaume d’Emmanuel Carrère atteint le score important de 260 000 ventes. Mais le véritable phénomène cette année est En finir avec Eddy Bellegueule, premier roman d’Edouard Louis dans lequel il raconte son enfance défavorisée dans le Nord (184 700 ventes, voir encadré p. 20). Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud, également un premier roman, paru en mai (75 000), et La petite communiste qui ne souriait jamais de Lola Lafon, qui vient de recevoir le prix Version Femina 2014 (68 400), ont aussi été de jolies surprises. Tandis que L’extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea de Romain Puértolas, phénomène de l’année 2013, a continué sur sa lancée (80 900). Du côté de la littérature étrangère, signalons les bons scores de Donna Tartt, revenue avec Le chardonneret après dix ans d’absence (123 500) et de Philipp Meyer avec Le fils (46 600).

Jean-Christophe Rufin (Le collier rouge, 185 600 ventes), Maylis de Kerangal (Réparer les vivants, 145 300 ventes), Grégoire Delacourt (On ne voyait que le bonheur, 84 600) ont désormais un lectorat fidèle. Gilles Legardinier a incontestablement franchi un cap avec 120 900 exemplaires de Ça peut pas rater ! tout en engrangeant de nouvelles ventes sur le précédent, Et soudain tout change (52 700), pour un total de 173 600 ventes.

Erotisme toujours

En ces temps de crise économique, les lecteurs continuent d’apprécier les livres qui font du bien comme Le jour où j’ai appris à vivre de Laurent Gounelle (135 300), Pars avec lui d’Agnès Ledig (53 000), Entre mes mains le bonheur se faufile d’Agnès Martin-Lugand (40 500). Et si l’année 2013 était placée sous le signe de la littérature érotique, 2014 a montré qu’il fallait désormais compter avec les séries de E. L. James, dont les trois Fifty shades cumulent 158 300 ventes encore en 2014, tandis que le premier volume en poche s’est vendu à 575 600 exemplaires et se retrouve en 2e position du Top 50 tous genres confondus ; de Christina Lauren (4 titres, 224 200) et d’Emma Chase (1 titre, 40 800).

Le garçon qui avait un drôle de nom

Edouard Louis.- Photo O. DION

Un jeune auteur de 21 ans, Edouard Louis, et un livre au titre étrange - En finir avec Eddy Bellegueule (Seuil) - ont créé la surprise de l’année 2014. Publié en janvier avec un premier tirage de 4 500 exemplaires, le titre atteint 184 700 ventes. Un sacré score pour une première publication, qui se trouve propulsée en 11e position du palmarès des romans et à la 32e du Top 50, tous genres confondus. Les droits en ont été cédés à 16 éditeurs étrangers, notamment en Allemagne, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, et il vient d’être édité en Italie (à 30 000 exemplaires), au Kosovo, aux Pays-Bas et au Portugal.

Le roman est autobiographique, Edouard Louis y raconte son enfance dans une famille très pauvre de Picardie, avec un père chômeur et alcoolique qui bat ses enfants, où l’on est raciste parce qu’on répète ce que disent les autres, où l’on fréquente discrètement les Restos du cœur et où on vit dans une maison si humide que les lits superposés des enfants s’écroulent. Un milieu dans lequel Eddy, gay, se sent différent et se cache.

L’histoire est d’autant plus sombre qu’elle se déroule en France au début des années 2000. Edouard Louis, diplômé de l’Ecole des hautes études en sciences sociales, élève à Normale sup, pose sur son enfance un regard de sociologue. Depuis, il a dirigé un essai aux Puf sur Pierre Bourdieu, réalisé un documentaire sur Foucault pour Arte et dirige la collection "Des mots" aux Puf. Il travaille à sa thèse sur "les trajectoires des transfuges de classe". C.C.

Essais : l’état de la France

 

En 2014, les Français se sont beaucoup interrogés sur l’état du pays et sur les amours présidentielles, avec une grande envie de prendre tout cela avec humour.

 

Photo OLIVIER DION

On ne s’attendait pas à un tel raz-de-marée : Merci pour ce moment de Valérie Trierweiler, ex-compagne du président de la République, a vraiment surpris par l’ampleur de ses ventes (603 300 exemplaires), un score plutôt rare dans la catégorie des essais (c’est deux fois plus que Le meilleur médicament, c’est vous !, meilleure vente en 2013), et par sa longévité dans nos listes. Le livre a porté l’ensemble du secteur et le chiffre d’affaires de 80,3 millions d’euros pour 4 487 800 volumes vendus (contre 61,7 millions d’euros pour 3 505 873 volumes vendus) est en hausse de 30,2 % en valeur et de 28 % en volumes par rapport à 2013.

Polémiques d’essayistes

Polémiques et enquêtes sur l’état de la France, livres d’humour et quête du bonheur : les essais reflètent les états d’âme des Français. Avant même l’attentat contre Charlie Hebdo, la polémique sur l’état du pays allait bon train, alimentée notamment par Le suicide français d’Eric Zemmour, qui atteint 338 200 ventes et arrive en 2e position dans le palmarès. Edwy Plenel, cofondateur de Mediapart, lui a répondu avec Dire non, qui prône notamment la laïcité et une refonte des institutions, et surtout avec son plaidoyer Pour les musulmans (65 100 ventes cumulées). Les lecteurs ont aussi plébiscité En France, un recueil des reportages pour Le Monde de Florence Aubenas, brossant le portrait de la France "d’en bas" (39 500 ventes). La vraie surprise vient du Capital au XXIe siècle de Thomas Piketty, un pavé de 1 000 pages plutôt ardu (114 400 ventes), qui connaît aussi une brillante carrière à l’étranger.

Beaucoup d’humour

Les lecteurs ont compensé avec les livres d’humour comme Voyages en absurdie et Retour en absurdie du comique Stéphane De Groodt, qui cumule 309 200 ventes sur deux titres, les trois titres de Laurent Baffie, 500 questions que personne ne se pose, C’est quoi ce bordel ?! et Le dictionnaire de Laurent Baffie (les deux derniers étant parus en 2013) qui cumulent 114 000 ventes, Mots d’excuse de Patrice Romain, qui a recensé les lettres des parents aux enseignants (41 600), Tout est normal de Stéphane Guillon, l’humoriste de Canal+ (27 800), Encore des nouilles, un recueil des chroniques culinaires de Pierre Desproges pour Cuisine et vins de France (38 500), Le bouquin des méchancetés et autres traits d’esprit de François Xavier Testu (33 800), et Voleuse de rêves de Plantu (20 500). Sans parler des anecdotes drôles d’un croque-mort avec Mes sincères condoléances de Guillaume Bailly (38 500 ventes) ou des échanges SMS d’une mère et de son fils dans Avec maman d’Alban Orsini (23 900).

Quête du bonheur

Ce besoin de rire fait partie d’une quête du bonheur très présente dans les succès de librairie : avec Devenir soi, Jacques Attali entend autant résoudre la crise que nous inciter à une révolution personnelle (82 900 ventes), la promesse de Frédéric Lenoir, Du bonheur, passionne les lecteurs depuis 2013 (127 900 ventes), tout comme celle de Christophe André, Et n’oublie pas d’être heureux (82 100 ventes). Le succès de Mémé, les souvenirs d’enfance du comédien Philippe Torreton, relève de cette recherche de l’insouciance et de l’innocence (170 000 ventes). Prendre soin de l’enfant intérieur, conseille le maître bouddhiste, Thich Nhat Hanh (23 700). Tandis que les randonnées d’Axel Kahn (Pensées en chemin, 46 600 ventes), et de Jean-Christophe Rufin (Immortelle randonnée, parue en 2013, encore vendue à 35 700 exemplaires en 2014), semblent aussi apporter une solution. A moins que ce ne soit les conseils d’un vieux monsieur de 84 ans, Paul Veyne, Et dans l’éternité, je ne m’ennuierai pas, prix Femina de l’essai (29 700).

Le numéro 1 de 2013, Le meilleur médicament, c’est vous !, a continué à se vendre (39 800 ventes). La revue XXI inscrit encore quatre numéros dans la liste, totalisant 87 200 ventes, et Extra pure, l’enquête sur la drogue de Roberto Saviano, l’auteur de Gomorra adaptée en série diffusée depuis cette semaine sur Canal+, s’est vendue à 38 100 exemplaires.

Besoin de rire

Stéphane De Groodt.- Photo O. DION

Après Laurent Baffie, Stéphane De Groodt : incontestablement, les lecteurs ont envie de rire et se sont tournés vers le comédien et comique belge de Canal+. Son Voyages en absurdie (Plon), vendu à près de 100 000 exemplaires, avait déjà constitué la surprise de l’année 2013. Le livre a continué à se vendre en 2014 et atteint 207 400 ventes. Stéphane De Groodt a récidivé avec Retour en absurdie, publié à l’automne chez le même éditeur, qui s’est vendu à 101 800 exemplaires. Si bien que les deux livres totalisent 309 200 ventes.

Les deux volumes sont des recueils de chroniques écrites avec Christophe Debacq pour l’émission "Le supplément" de Maïtena Biraben sur Canal+. Le comique de Stéphane De Groodt n’est pas le plus accessible, parfois trop rapide pour être saisi à l’oral, mais il se déguste à l’écrit. Digne héritier de Bobby Lapointe et de Raymond Devos, l’auteur manie jeux de mots et calembours en cascade. Ainsi croise-t-on au fil des pages "Madiba-de-laine" (Mandela), Marilyn Monroe qui s’en "fich’d’Gerald", Marlon qui prépare une "Brandade de morue", ou Picasso qui croise "Dali qui demande-à-lire". "Du pur surréalisme belge", ont jugé certains critiques.

Si Stéphane De Groodt bénéficie d’un fort capital en sympathie, il fait aussi partie de ces comiques belges très prisés par les Français, de l’auteur de BD Philippe Geluck à la journaliste Charline Vanhoenacker, chroniqueuse sur France Inter. Depuis la rentrée, il se consacre à l’écriture de son premier long-métrage.

BD : la vie sans Astérix

Contrecoup d’une année 2013 marquée par le très gros succès d’Astérix chez les Pictes, les ventes cumulées du Top 50 BD GFK/Livres Hebdo, hors export, régressent en 2014 à 3,3 millions d’exemplaires (- 26,4 %) pour un CA de 44,2 M€ (- 19,9 %), mais sans l’effet Astérix les évolutions sont respectivement de + 5 % et de + 10 %.

Emmenées par Blake et Mortimer et Le Chat, déjà dans le trio de tête il y a un an, derrière Astérix, encore présent au 5e rang, les locomotives traditionnelles du secteur composent l’essentiel de la liste avec Joe Bar team, Largo Winch, Lucky Luke, Les Légendaires (4 titres), XIII, Walking dead (5 titres), Boule et Bill, Les sisters, Les Tuniques bleues, etc. Mais le palmarès surprend aussi avec l’apparition de la jeune série Les carnets de Cerise (29e) ; la belle performance du tome 1 de l’excellente autobiographie de Riad Sattouf, L’Arabe du futur (7e) ; le succès inattendu par son ampleur de la série Les vieux fourneaux (16e et 28e). Egalement dans la liste : Zep, Larcenet, Tardi, Loisel et Tripp ou encore Bilal, entre autres signatures.

15 éditeurs s’inscrivent au palmarès 2014 dominé par Média-Participations avec 17 titres (Dargaud 7, Kana 5, Dupuis 2, Blake et Mortimer 2, Lucky Comics 1) et le groupe Delcourt avec 11 (Delcourt 9, Soleil 2). Hachette place 7 titres (Pika 6, Albert-René 1), comme le groupe Glénat 7 (Glénat 6, Vents d’ouest 1). Casterman est présent avec 4 titres, Bamboo avec 2, Les Deux Royaumes et Allary 1 chacun. F.P.

Jeunesse : les étoiles du cinéma

En 2014, la fiction jeunesse s’est placée sous le signe du cinéma. Nos étoiles contraires de John Green, adapté au cinéma par Josh Boone et sorti en France le 20 août, a battu tous les records en librairie avec 431 500 ventes (Nathan). On retrouve aussi sur la liste trois trilogies pour les adolescents qui ont été adaptées au cinéma : Divergente de Veronica Roth, qui totalise 509 900 ventes (Nathan), dont le premier volet réalisé par Neil Burger est sorti en avril ; L’épreuve de James Dashner, qui atteint 299 700 ventes, dont le film Le labyrinthe, tiré du premier tome, a été réalisé par Wes Ball (octobre) ; ou encore Hunger games, présent depuis trois ans dans le palmarès et qui s’est encore vendu à 204 800 exemplaires grâce au troisième film (novembre). Le succès de Nos étoiles contraires a fait vendre Qui es-tu Alaska ?, du même auteur, réédité pour l’occasion par Gallimard Jeunesse (35 800 ventes). Tandis que les quatre volumes présents du Journal d’un dégonflé atteignent 152 900 ventes.

Les albums sont eux aussi placés sous le signe du cinéma avec La reine des neiges, le film Disney de Noël 2013 qui a battu tous les records au box-office. On retrouve pas moins de 9 titres chez Disney Hachette et chez Hemma, totalisant 530 300 exemplaires. Quant à Gallimard Jeunesse, il a vendu 161 600 exemplaires des trois volumes issus du jeu vidéo Minecraft. C.C.

Poches : le règne d’Eros

La trilogie érotique Fifty shades règne en maître sur les 50 meilleures ventes "Poches" de 2014. Les 3 volumes, publiés au Livre de poche entre février et avril, occupent les 1er, 4e et 5e rangs, cumulant des ventes de près de 1 400 000 exemplaires.

Comme en 2013, J’ai lu est en 2e position avec le premier volume de La femme parfaite est une connasse ! d’Anne-Sophie et Marie-Aldine Girard, la suite de ce guide humoristique se retrouvant au 11e rang. Pocket, qui s’intercale à la 3e place avec Demain de Guillaume Musso, domine largement le reste du classement. En effet, avec 22 titres (contre 14 en 2013), la marque d’Univers Poche concentre à elle seule près de 45 % des ventes cumulées de la liste. Vient ensuite Le Livre de poche avec 14 titres (contre 16 en 2013) et un peu plus de 29 % du total.

Folio est encore présent avec 4 livres dont Le grand Cœur de Jean-Christophe Rufin (19e) et L’étranger d’Albert Camus (27e) dont on a célébré le centenaire de la naissance en 2013. J’ai lu place 3 ouvrages, quand Points et Babel (Actes Sud) n’en ont que 2 chacun.

Avec 9 071 000 exemplaires, le total des 50 meilleures ventes "Poches" de 2014 est supérieur à celui de 2013 (+ 15,1 %). S.L.

Poches jeunesse : girls, girls, girls

La Violettamania est le phénomène jeunesse de l’année 2014. Les 10 titres de Violetta, du nom de l’héroïne de la série télévisée diffusée sur Disney Channel et sur NT1, qui raconte l’histoire d’une jeune fille, dont la mère vient de mourir, partie à Buenos Aires apprendre le chant et la danse, se retrouvent en intégralité dans le palmarès, totalisant 614 700 ventes chez Hachette Jeunesse. Ce succès confirme aussi le goût des lectrices pour les héroïnes, puisqu’on voit apparaître dans la liste les deux premiers volumes de la série Les filles au chocolat de Cathy Cassidy (Pocket Jeunesse) et Le journal d’Aurélie Laflamme d’India Desjardins (Michel Lafon).

On retrouve en poche des titres liés au cinéma comme La reine des neiges ou de Qui es-tu Alaska ? de John Green, l’auteur de Nos étoiles contraires, aux côtés de Harry Potter, du Royaume de Kensuké et de La rivière à l’envers de Jean-Claude Mourlevat, qui font désormais partie des classiques pour la jeunesse.

Comme l’an dernier, Hachette Jeunesse domine le marché du poche avec 16 titres (15 en 2013), devant Gallimard Jeunesse (11 titres au lieu de 14), Pocket Jeunesse (7), Bayard et Casterman (4 chacun). Le poche jeunesse se porte bien : 2 076 300 volumes ont été vendus en 2014 pour un chiffre d’affaires de 12,3 millions d’euros, contre 1 141 421 volumes et un chiffre d’affaires de 6,86 millions d’euros en 2013. C.C.

Beaux livres : des stars et des expos

Comme on pouvait s’y attendre, la parution fin octobre de la version illustrée du best-seller de Lorànt Deutsch Hexagone s’installe directement en tête du palmarès du rayon beaux livres, avec des volumes de ventes deux fois plus importants que le titre suivant dans le classement. Métronome illustré, paru en 2010, reste par ailleurs dans le classement en 14e position. Ce succès rejoint la bonne tenue des titres portés par un nom connu, star du petit écran ou des lettres, comme la journaliste Audrey Pulvar qui signe Libres comme elles (3e), la romancière Nathalie Rheims avec Le Père-Lachaise (7e) ou la styliste des émissions de M6, Cristina Cordula, avec Style et allures (10e). Ce sont en tout 10 titres signés de personnalités - Louis Bertignac, Frédéric Lopez, Stéphane Marie de l’émission "Silence, ça pousse !", Pierre Bellemare ou le romancier Christian Signol - qui se placent dans le top 50 des ventes du rayon.

Les ouvrages dans le sillage des expositions (catalogues ou monographies) ont réalisé de bonnes ventes avec 12 titres dans le palmarès. C’est l’artiste japonais Hokusai qui tire son épingle du jeu : le catalogue termine en 2e position. Mais sont aussi présentes les rétrospectives consacrées à Niki de Saint Phalle, Henri Cartier-Bresson, Sebastião Salgado, Raymond Depardon, Cartier, Mapplethorpe, Van Gogh-Artaud, Bill Viola, Gustave Doré ou Nicolas de Staël. A.-L.W.

Pratique : colorier, c’est gagné

Alors que, en 2013, seul Art-thérapie d’Hachette Pratique faisait timidement son entrée dans le palmarès du rayon pratique, à la 44e place, le secteur aura été vampirisé en 2014 par la mode du coloriage anti-stress et de son ancêtre le mandala (pratique venue du bouddhisme qui permet de méditer en dessinant). 23 des 50 meilleures ventes de l’année du rayon sont des carnets de coloriage, avec en tête Jardin secret publié par Marabout, qui compte 2 autres titres sur le sujet dans le classement. Hachette Pratique parvient à placer 13 références, Dessain et Tolra 6, tandis que First a très bien vendu 100 messages à colorier (11e).

Cette mode s’inscrit dans une tendance de fond initiée en 2012, le succès des livres de bien-être qui permettent de trouver une certaine sérénité. C’est le cas des Quatre accords toltèques (Jouvence) qui dominait le podium l’an passé et qui arrive en 3e position, ou des titres d’Eckhart Tolle (J’ai lu).

Avec cette tendance des lecteurs à prendre leur vie en main, le rayon cuisine s’est transformé. Les recettes régressives ont cédé partiellement la place à une alimentation saine et équilibrée, symbolisée par la présence en 2e position de la méthode d’Henri Joyeux qui propose de Changez d’alimentation (Rocher). A.-L.W.

Livres numériques : la loi des séries

Pour pallier l’absence de panel des ventes des livres numériques, Livres Hebdo a demandé aux principaux revendeurs la liste de leurs meilleures ventes romans. Apple, Google, Kobo-Fnac et TEA ont accepté de nous répondre. L’ordre de présentation des tableaux est alphabétique et ne préjuge pas de la part de marché de chacun d’entre eux.

Organisé lui-même autour des meilleures ventes du moment, le système de promotion numérique renforce l’effet best-seller. Et cela s’accentue lorsqu’il s’agit de séries. Celles de Katherine Pancol et de E. L James se trouvent ainsi bien placées chez les quatre revendeurs. Seul Guillaume Musso parvient à faire mieux. Veronica Roth (série Divergente) se place aussi bien sur l’iBooks Store d’Apple que chez Google. Chez ces deux revendeurs, également diffuseurs de films, cette série a pu bénéficier de son adaptation au cinéma, alors qu’elle est classée bien au-delà de la 10e place chez Kobo-Fnac et chez TEA, qui regroupe entre autres Decitre et Cultura.

La différence de prix

Alors que la dichotomie entre grand format et poche disparaît dans le numérique, la différence de prix, loin d’être toujours à l’avantage du numérique lorsque la version poche a été publiée, n’a pas dissuadé les utilisateurs de liseuses et de tablettes de charger ces versions. Les textes plus littéraires semblent quant à eux moins compatibles avec la lecture numérique, que ce soit en raison du profil de leur public, ou du type d’achat qu’ils déclenchent : Patrick Modiano, prix Nobel de littérature, et Lydie Salvayre, prix Goncourt, ont assurément été très offerts en cadeaux de fin d’année, ce qui privélégie l’achat en version papier et explique leur absence du haut des listes numériques.

En revanche, La faiseuse d’anges de Camilla Läckberg se classe plutôt mieux en numérique, en raison aussi de ses caractéristiques propres : c’est un polar, et la littérature de genre fonctionne mieux en numérique. Sa différence de prix avec la version papier est aussi appréciable (8,50 euros, soit un rabais de 36 %). En proportion, elle est tout aussi importante pour Guillaume Musso, en tête de presque tous les tableaux. H.H.


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