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Médias : lectures pour tous

"La grande librairie" sur France 5, le 7 septembre. François Busnel reçoit Philippe Besson pour Un personnage de roman (Julliard). - Photo Olivier Dion

Médias : lectures pour tous

Avec de nouvelles émissions, matinales et talk-shows, le livre est l’une des vedettes de la rentrée radio. L’offre médiatique s’élargit à la BD et au polar. Mais le livre continue de faire peur aux chaînes de télévision, qui invitent des auteurs mais ne lancent aucun nouveau rendez-vous.

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Par Vincy Thomas,
Cécilia Lacour,
Créé le 15.09.2017 à 12h41

Quand nous demandons à Catherine Barma, la productrice d’"On n’est pas couché", quel auteur est un bon client pour la télévision, elle répond sans hésiter "Christine Angot". Pas étonnant que Laurent Ruquier ait pensé à l’auteure de L’inceste pour accompagner un autre écrivain, Yann Moix, dont cette saison sera la dernière. Alors que cette rentrée est marquée par la reconversion des politiques en chroniqueurs audiovisuels (l’ancienne ministre de la Culture Aurélie Filippetti, également écrivaine, a intégré "On refait le monde" sur RTL), plusieurs écrivains jouent les éditorialistes. Aurélien Bellanger livre ainsi une réflexion sur le monde dans la matinale de France Culture.

"On n’est pas couché", samedi 9 septembre. Christine Angot fait désormais la paire avec Yann Moix. - Photo OLIVIER DION

Après une année très politique, qui avait vu la place de la culture se réduire sur les antennes, le livre est à la fois partout et nulle part en particulier. 21 nouvelles émissions ou chroniques culturelles - dont 9 exclusivement dédiées au livre - font leur apparition dans les grilles de rentrée, la plupart sur les radios publiques. A l’inverse, seules 10 émissions sont arrêtées, principalement à la télévision, certaines n’ayant pas dépassé une saison. Parmi elles, la vénérable "Bibliothèque Médicis" de Jean-Pierre Elkabbach (Public Sénat) va s’arrêter à la fin de l’année.

Sous forme de chronique, de pastille ou de grand entretien, la culture et le livre n’ont jamais été aussi présents. Les auteurs sont devenus des invités permanents au même titre que les artistes, les politiques ou les intellectuels. Lorsque leur ouvrage colle à une actualité ou à une thématique, il devient un "déclencheur" de débats. Pour Nicolas Carreau, le Monsieur Livre d’Europe 1, "le livre est un prétexte pour parler d’autre chose, pour parler de nous, du monde tel qu’il est, de tout". Pas étonnant, dès lors, que Léa Salamé, pour son interview "politique" dans la matinale de France Inter, la plus écoutée du pays, s’offre Gaël Faye, ou Philippe Besson "en exclusivité" pour son livre sur Emmanuel Macron.

Un people comme les autres

Les talk-shows d’avant la première partie de soirée (environ 4 millions de téléspectateurs cumulés) suivent la tendance. Tous considèrent l’écrivain comme un people comme les autres. Yann Barthès ("Quotidien", qui a connu une excellente première saison sur TMC) a reçu au fil de l’année Dan Brown, Kamel Daoud, Mathieu Sapin, William Finnegan, Virginie Despentes et Leïla Slimani. Il n’y a plus un talk-show généraliste ou une matinale sans son chroniqueur culturel. Sur France Culture, Mathilde Serrell, qui présentait "Ping pong" l’an dernier, est devenue éditorialiste culturelle dans la matinale.

La télévision est en cours de mutation. Une grande partie de son public a adopté le "replay" et la diffusion en ligne, optant pour un programme à la carte plutôt que pour un menu. Malgré tout, sur le petit écran, l’écrit se fait tout petit. Hormis dans "Le grand Soir 3", la littérature est anémique dans les journaux télévisés. Le service public peine à remplir sa mission, en dehors de "La grande librairie" ("LGL", 400 000 fidèles), seule émission littéraire en première partie de soirée, "On n’est pas couché" ("ONPC", 1,4 million de téléspectateurs), ou "Stupéfiant !" (600 000 curieux), qui reprend le 2 octobre. Il faut aussi compter sur les "replay" ("ONPC" attire ainsi 120 000 téléspectateurs de plus) et les extraits diffusés sur les réseaux sociaux.

"LGL", comme "ONPC", installées depuis très longtemps et toujours aussi prescriptrices, s’offrent quelques évolutions. "LGL" a changé de rédacteur en chef en choisissant François Jougneau, passé par "Le grand journal" de Canal+. Il a décidé de rythmer davantage l’émission avec de nouvelles rubriques afin de la "rendre plus attractive". "Malgré ces changements, l’ADN de l’émission reste le même", assure-t-il à Livres Hebdo. Il prévoit aussi des émissions spéciales afin de créer de l’événement (Fabrice Luchini en octobre par exemple).

De son côté, la radio a mieux saisi le bouleversement des modes de consommation des médias, comptabilisant aussi bien l’audience que les téléchargements en podcasts : le livre reste un "produit" très attrayant. L’an dernier, les radios publiques ont réalisé d’excellentes audiences, France Inter dépassant même RTL sur de nombreuses tranches horaires.

Pop culture

A l’inverse, Europe 1 a enregistré des scores désastreux. Pour sortir de cette crise, la station du groupe Lagardère a dû revoir sa grille de fond en comble. Elle a fait une OPA sur Patrick Cohen pour assurer un grand rendez-vous du matin, de 7 h à 9 h 30. Comme son confrère Yves Calvi sur RTL avec "Laissez-vous tenter", il prolonge sa matinale avec une émission culturelle ("Melting pop"). A la même heure, les deux radios privées font face à l’invité de "Boomerang" d’Augustin Trapenard, écouté par plus d’un million d’auditeurs sur France Inter. Depuis la rentrée, Europe 1 propose aussi une émission dédiée aux livres, animée chaque samedi par Nicolas Carreau, "La voix est livre". "J’avais des chroniques littéraires mais la lecture, ça prend du temps. On peut parler d’un bouquin en trois minutes, mais je trouve que le temps long correspond davantage à la littérature", explique-t-il à Livres Hebdo.

Le changement le plus profond provient de la ligne éditoriale des radios qui veulent rajeunir l’audience et coller à l’air du temps. La culture populaire est devenue respectable. "Boomerang" avait ouvert la voie. La bande dessinée (François Busnel ne se privera pas d’Astérix, Antoine de Caunes a lancé son émission "Popopop" avec Pénélope Bagieu), le polar et même le poche, qui trouve sa place le samedi matin sur France Inter avec Jacqueline Pétroz, ne sont plus des genres marginaux. En revanche, la littérature jeunesse, qui ne bénéficie que de deux chroniques toutes stations confondues, les beaux livres et la fantasy, de même que l’édition indépendante sont absents, ou presque, des antennes.

"Notre seule contrainte, ou plutôt notre désir, est l’ouverture, souligne Marie Richeux, au micro de la nouvelle émission "Par les temps qui courent". L’objectif de France Culture est d’offrir le plus large spectre de l’actualité culturelle, explique-t-elle. Le livre est la matière première de l’entretien. Ensuite, nous cherchons à créer un univers de pensée que l’on peut déployer et déplier."

"La télévision a peur de la culture"

Mais ce qui est valable pour la radio n’est pas transposable à la télévision. François Jougneau confirme que "la télévision a certainement peur de la culture". Nicolas Carreau juge également "grave pour le service public de ne pas parler du livre. Nous sommes quand même un pays de littérature. La télévision ne parle pas du livre parce que c’est trop intello, donc on a l’impression que le livre est réservé à l’élite", déplore-t-il. "Il y a de moins en moins de culture à la télévision, renchérit la productrice Catherine Barma. Chaque année, je présente en vain mon projet d’émission culturelle avec Christophe Ono-dit-Biot, un décryptage de la société à travers toutes les disciplines artistiques." Cette année, aucune émission culturelle ou littéraire n’a été lancée sur le petit écran. Pourtant, rappelle François Jougneau, "la littérature, ce n’est pas une punition, c’est un plaisir". V. T.

 

"Ce n’est pas facile de plaire à Yann Moix"

 

La productrice Catherine Barma explique le fonctionnement d’"On n’est pas couché", deuxième émission télévisée la plus prescriptrice de livres.

 

Catherine Barma.- Photo FRANCE TÉLÉVISIONS

Catherine Barma - Les talk-shows, c’est comme les hebdos : il faut de la diversité. Comme eux, on ouvre avec de la politique et après on met de la culture. Il doit y avoir au moins un auteur par semaine. Parfois plus parce que, maintenant, des acteurs écrivent.

Nous proposons des interviews longues. Ça laisse le temps aux auteurs de s’exprimer. Seuls sont pris les livres que Laurent Ruquier a aimés. Ils ont sa bienveillance. Après, les deux autres, ils aiment ou pas. Mais si Laurent aime le livre et si l’auteur sait parler de son sujet, tout le monde y gagne.

On lit les fiches des éditeurs, les critiques, les articles. L’avis de chacun ne nous intéresse pas. Un livre doit d’abord provoquer un sujet, comme Les peaux rouges d’Emmanuel Brault ou le dernier Delphine Coulin, Une fille dans la jungle. On suit son parcours dans Livres Hebdo. Ensuite, on lit les livres. Le moment terrible, c’est la rentrée littéraire, qui commence avant la reprise. On en rate un maximum !

Ils peuvent dire qu’ils aiment ou qu’ils n’aiment pas. Mais ils ne choisissent pas.

Un pour cent des invités.

Tout le monde nous dit ça ! Mais c’est vrai que ce n’est pas facile de plaire à Yann Moix.

Un qui a été très bon, c’est Gilles Legardinier. Il voulait passer dans l’émission. Et pour Flammarion, c’était important. Les éditeurs, dès le dimanche, ils vont sur Amazon pour voir leurs ventes. Certains n’ont pas besoin de nous, comme Raphaëlle Giordano. On l’a fait venir parce qu’elle était dans les meilleures ventes de Livres Hebdo. Et je suis fière d’avoir eu Michel Houellebecq.

Si Laurent sait que les chroniqueurs n’ont pas aimé le livre, il va préférer les placer à la fin. Entre-temps, il va promouvoir le livre, lire des pages, donner la parole à l’auteur. Un auteur qui passe dans le fauteuil vers la fin a beaucoup plus de promo que celui qui passe en premier.

Laurent souhaitait une personnalité qui ne soit pas journaliste, mais plutôt une philosophe. Je lui ai proposé Christine Angot. Il a tout de suite été enchanté par cette proposition. Je savais que le duo fonctionnerait et qu’elle apporterait un nouveau souffle à l’émission, plus en lien avec ce que j’aime à la télévision : jouer le rôle de passeur entre la culture et le grand public. On renoue avec les origines, avec deux personnalités pugnaces et cultivées qui donnent leur avis subjectif mais éclairé sur la société, la politique, la culture. Sortir d’un format journalistique permet de sortir des schémas et de prendre de la hauteur. V. T.

La rentrée du livre à la radio et à la télévision

?Les nouveautés

TÉLÉVISION

"William à midi", par William Leymergie, C8, du lundi au vendredi, 12 h 40. Chronique culture assurée par Julia Molkhou.

"Les Terriens du dimanche", par Thierry Ardisson, C8, dimanche, 19 h.

RADIO

"Culturez-vous", Europe 1, du lundi au vendredi, 7 h 22.

"Melting pop", par Patrick Cohen, Europe 1, du lundi au vendredi, 9 h-9 h 30.

"Melting pop" de Patrick Cohen, Europe 1.- Photo MARIE ETCHEGOYEN/CAPA/EUROPE 1

"La voix est livre" de Nicolas Carreau, Europe 1, samedi, 15 h-16 h.

"Le réveil culturel" de Tewfik Hakem, France Culture, du lundi au vendredi, 6 h 05.

"L’édito culturel" de Mathilde Serrell, France Culture, du lundi au vendredi, 8 h 50.

"Par les temps qui courent" de Marie Richeux, France Culture, du lundi au vendredi, 21 h-22 h.

"Le rendez-vous culture", par Céline Asselot, Franceinfo, du lundi au vendredi, 15 h 24 et 16 h 54.

"Par les temps qui courent" de Marie Richeux, France Culture.- Photo DR/ABINE WESPIESER

"Livres jeunesse", Franceinfo, dimanche, 8 h 56, 10 h 56 et 14 h 26.

"Les choix culture" dans le 20h-minuit de Pierre Neveux, Franceinfo, dimanche, 21 h 21 et 23 h 51.

"Une journée particulière", par Zoé Varier, France Inter, dimanche, 14 h-15 h.

"Popopop", par Antoine de Caunes, France Inter, tous les jours, 16 h-17 h.

?Les changements

TÉLÉVISION

"Vive les livres !", par Patrick Poivre d’Arvor, CNews, vendredi, 23 h 30.

RADIO

"Social club" par Frédéric Taddeï, Europe 1, du lundi au jeudi, 19 h-21 h.

"La dispute" par Arnaud Laporte, France Culture, du lundi au vendredi, 19 h 03-20 h.

"A livre ouvert" par Gilbert Chevalier, Franceinfo, samedi, 13 h 51, 15 h 53 et 18 h 23.

"L’heure bleue", par Laure Adler, France Inter, du lundi au vendredi, 20 h-21 h.

"L’humeur vagabonde", par Kathleen Evin, France Inter, samedi, 19 h 20-19 h 55.

"Nova book box", par Richard Gaitet, Nova, 21 h-22 h.

?Et toujours

TÉLÉVISION

"Télématin", par Laurent Bignolas, la chronique d’Olivia de Lamberterie, France 2, du lundi au samedi, 6 h 30.

"Dans quelle éta-gère", par Monique Atlan, France 2, du lundi au vendredi, 9 h 25.

"Stupéfiant !", par Léa Salamé, France 2, Lundi, 23 h.

"On n’est pas couchés", par Laurent Ruquier, France 2, samedi, 23 h 15, avec Christine Angot.

"Un livre un jour", par Olivier Barrot, France 3, du lundi au vendredi, 16 h 50.

"21 cm", par Augustin Trapenard, Canal +, mensuel.

"La grande librairie", par François Busnel, France 5, jeudi, 20 h 50.

"Entrée libre", par Claire Chazal, France 5, du lundi au vendredi, 20 h 20.

"Quotidien", par Yann Barthès, TMC, du lundi au vendredi, 19 h 10.

"Salut les Terriens !", par Thierry Ardisson, C8, samedi, 19 h, avec Alex Vizorek.

RADIO

"Cultures Monde" par Florian Delorme, France Culture, du lundi au vendredi, 11 h.

"La compagnie des auteurs" par Matthieu Garrigou-Lagrange, France Culture, du lundi au jeudi, 15 h-16 h.

"Poésie et ainsi de suite", par Manou Farine, France Culture, vendredi, 15 h-16 h.

"Jacques Bonnaffé lit la poésie", France Culture, du lundi au jeudi, 15 h 54-16 h.

"Le temps des écrivains" par Christophe Ono-dit-Biot, France Culture, samedi, 17 h-18 h.

"L’invité culture" dans le 14/17 de Bernard Thomasson, Franceinfo, samedi 14 h 51 et 16 h 51.

"BD Bande dessinée", par Jean-Christophe Ogier, Franceinfo, dimanche, 10 h 54 et 15 h 56.

"Livres en poche", par Jacqueline Pétroz, France Inter, samedi, 6 h 55.

"La librairie francophone" d’Emmanuel Khérad, France Inter, samedi, 15 h.

"Boomerang", par Augustin Trapenard, France Inter, du lundi au vendredi, 9 h 10.

"L’as-tu lu mon p’tit loup ?" par Denis Cheissoux, France Inter, dimanche, 19 h 55

"Le masque et la plume", par Jérôme Garcin, France Inter, un dimanche par mois, 20 h.

Chronique littéraire par Elisabeth Philippe, France Musique, jeudi, 7 h 40.

"Sous la couverture", par Philippe Venturini, France Musique, samedi, 12 h 30.

"Livre international", par la rédaction de RFI, samedi.

"Littérature sans frontières", par Catherine Fruchon-Toussaint, RFI, dimanche, 11 h 40.

"Livre France", par la rédaction de RFI, dimanche.

"Laissez-vous tenter", par Yves Calvi, RTL, du lundi au vendredi, 9 h-9 h 30. Avec : "Le meilleur de "Laissez-vous tenter"", le dimanche à 13 h.

"Les livres ont la parole", par Bernard Lehut, RTL, dimanche, 7 h 30.

"C’est à lire", par Bernard Poirette, RTL, 9 h 33.

"Un bonbon sur la langue", par Muriel Gilbert, RTL, samedi et dimanche, 8 h 45.

C. L.

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