Des sites pour lancer un film, on connaît depuis longtemps. Pour lancer un album musical aussi. Pour lancer un livre, c’est encore très rare. Certes, il y a les blogues d’auteurs, de plus en plus nombreux, et qui n’hésitent pas, à l’occasion, à se transformer en vitrines publicitaires — selon le bon vieil adage qui assure que l’on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même. Mais un vrai site, conçu par l’éditeur, avec la collaboration de l’auteur, pour accompagner la parution d’une nouveauté, ça, non, la profession n’en a pas encore l’usage courant. L’initiative de Gallimard avec le dernier roman de Tahar Ben Jelloun, Partir , fait donc un peu figure d’événement. En vérité, la vénérable maison de la rue Sébastien Bottin s’était déjà essayée au genre, notamment sur Alexandre Jardin (pour Les Coloriés ) et sur Daniel Pennac. Mais c’est la première fois que Gallimard propose un site aussi travaillé, avec extraits du livre, interview-vidéo exclusive de l’auteur, livres dédicacés à gagner, etc., : « Nous sommes allés jusqu’au bout de la logique de ce type de support », résume Alban Cerisier, responsable du développement numérique de l’éditeur. Lancé voici bientôt deux mois, en fait un dérivé du site amiral de Gallimard ( http://www.gallimard.fr/benjelloun.partir/ ), ce mini-site promotionnel, communiqué d’abord à tous les abonnés de la newsletter gallimardienne, a été relayé par divers médias du web (le blogue de Pierre Assouline, en premier lieu) et signalé sur des sites marchands (notamment celui de la Fnac). D’autres blogueurs l’ont à leur tour découvert et affiché en liens dans leurs posts. Bref, l’adresse du site a essaimé chaque jour davantage, et continue encore aujourd’hui d’atteindre de nouveaux internautes : pour ceux qui ne connaissent pas encore, c’est typiquement un exemple de marketing viral, cette communication publicitaire « par infusion », si l’on peut dire, propre aux nouvelles technologies (Internet, téléphones cellulaires…). Comme Gallimard a toujours répugné à communiquer sur les chiffres, quels qu’ils soient, nous n’avons pas pu savoir combien de visiteurs s’étaient promenés sur le site, mais Alban Cerisier se dit « très satisfait » du résultat. Avec un bémol, toutefois, et de taille : « Le projet nous a coûté relativement cher. Nous allons réfléchir à des formats moins lourds et moins onéreux, de façon à vraiment pouvoir user du marketing viral comme d’un vecteur à part entière de promotion du livre ». En l’occurrence, le projet « Partir » a été décidé et monté à la seule initiative de l’éditeur, mais plusieurs auteurs de la maison, qui ont suivi l’expérience avec intérêt, voudront du même traitement pour leurs futurs ouvrages. Attention, quand même à ne pas trop le banaliser : pour un film sorti en salles, il se publie vingt ou trente fois plus de livres. A l’effet mode et nouveauté pourrait rapidement succéder l’overdose et la noyade.
15.10 2013

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