L’Empire State Building aux couleurs du drapeau tricolore, cinquante chefs d’Etat étrangers à Paris, quatre millions de Français dans la rue : une mobilisation inouïe a dénoncé le scandale de l’assassinat de Cabu, Wolinski, Charb, Honoré, Tignous, Bernard Maris, Elsa Cayat, Mustapha Ourrad, Michel Renaud et de huit autres victimes innocentes dont on a besoin, encore et encore, d’égrainer les noms pour lutter contre l’effet de sidération.
Une mobilisation inouïe, et internationale, pour affirmer l’absolue nécessité de la liberté d’expression et de création, pour dire haut et fort avec l’imam de Drancy, Hassen Chalghoumi, qu’on ne répond pas à des dessins par du sang.
Et maintenant ? Le monde du livre - le monde des mots - est aux premières loges. Dans la patrie de Voltaire et de Daumier, ce ne sont pas à des tours que se sont attaqués les terroristes, mais à des créations de l’esprit. A l’essence même d’une certaine idée de la France ; à l’essence même de l’idée que nous nous faisons de nos métiers.
La mobilisation mondiale qu’a suscitée cette barbarie redonne à notre pays une fierté qu’elle était en train de perdre sous l’impact de la crise économique. On s’est rendu compte qu’implicitement de nombreux pays, d’est en ouest et du nord au sud, comptaient sur nous. Que nous représentions pour eux une boussole. Ce que nous avions oublié.
Cette tragédie nous redonne l’énergie de nous battre pour la liberté de penser, la liberté de s’exprimer, la liberté de créer. Il nous recentre sur nos valeurs fondamentales. Le monde du livre ne peut qu’en ressortir regonflé à bloc pour les combats qu’il a à mener aujourd’hui contre les pouvoirs de l’argent.
C’est avec cette conviction renforcée que la ministre de la Culture Fleur Pellerin est repartie au combat pour le droit d’auteur face à la communauté européenne. "Le monde entier a repris conscience du prix infiniment précieux de la création, de la culture, de tout ce que nous devons aux auteurs et aux artistes, a-t-elle souligné lundi 12 janvier en présentant les propositions de Pierre Sirinelli sur le droit d’auteur en Europe. Dans des circonstances comme celles que nous vivons, nous réalisons que l’Europe ne peut pas être qu’un grand marché."