Roman/France 22 août Gilles Rozier

« Elle a dit : "Comment voulez-vous que mon fils soit antisémite alors que mon père est mort à Auschwitz ?" » Elle, c'est la mère du narrateur, et la scène se passe en juin 1975. Son fils vient d'être accusé, avec une de ses copines, Pascale, totalement innocente, de complicité dans une « plaisanterie » d'un goût plus que douteux. Vincent et Pierre, deux de ses camarades du collège Les Mattons, de Vizille, scolarisés en cinquième, avaient envoyé à leur professeur d'histoire, M. Guez, un brave homme pourtant apprécié de tous, une lettre anonyme ainsi libellée : « Vieux Juif, tu seras puni par le IIIe Reich », et ornée de croix gammées. Gilles ignorait le contenu du texte, mais il avait communiqué aux autres l'adresse du professeur. Convoqué avec ses parents par le principal, tandis que Vincent et Pierre sont exclus définitivement de l'établissement, lui n'écope que de quinze jours, jusqu'à la fin de l'année, et sera repris l'année suivante. Ce qu'il y a d'étonnant dans cette histoire complètement oubliée (enfouie ?), et qu'une de ses relations lui a remise en mémoire quarante ans après, c'est la réaction soudée de sa famille. Le père industriel gaulliste « de droite », et la mère communiste, lui catholique, elle juive, mais tous deux athées, s'ils ne minimisent pas l'affaire, font la morale à leur rejeton, le punissent, mais le défendent aussi, certains qu'il ne recommencera jamais. Depuis, Gilles Rozier a renoué avec ses racines juives, il a recherché les traces de son grand-père victime des nazis, et, à la fin de ce beau livre, il demande pardon à M. Guez, qu'il soit encore de ce monde ou non.

Gilles Rozier
Mikado d’enfance
L’Antilope
Tirage: 3 500 ex.
Prix: 18 euros ; 190 p.
ISBN: 9791095360964

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