Le 21 mars, sort en librairie, tiré à 4 000 exemplaires, le premier numéro de la nouvelle formule de la Nouvelle revue française, sous la direction d’Olivia Gesbert, ancienne journaliste à France Culture. Il porte le numéro 657. Après le passage éclair de sa prédécesseure, Maud Simonnot, partie pour le Seuil, la nouvelle rédactrice-en-chef a pour ambition de « remettre la revue en mouvement », citant les mots mêmes d’Antoine Gallimard. Pour ce faire, si le format précédent (18,5 cm x 23,5 cm) a été conservé, la couverture est revenue à quelque chose de plus « sage », avec le fameux logo NRF redessiné à partir de l’original (celui des fondateurs historiques, Gide et Schlumberger, en 1909). La revue se voit structurée en sections, comme un magazine, même si elle demeure « une revue de littérature et de critique entièrement écrite par des écrivains », explique Olivia Gesbert.
Dans chaque numéro, un ensemble consacré au patrimoine littéraire de la maison Gallimard (ou, plus largement, du groupe Madrigall), dont les ressources sont quasiment infinies. Dans ce numéro, on pourra ainsi lire des extraits de l’Héliogabale, pièce inédite retrouvée de Jean Genet, écrite à Fresnes en 1942, qui paraît dans « la Blanche » en avril. Les bonnes feuilles sont suivies d’une vaste analyse de Jonathan Littell, un véritable essai de plus de 65 000 signes.
« Les auteurs ont carte blanche », dit l’éditrice.
Salman Rushdie célèbre la liberté de création
Autre point fort du sommaire, un long entretien d’Olivia Gesbert avec Salman Rushdie, où l’écrivain indien victime du fanatisme islamiste célèbre encore et toujours la liberté de création, balayant tout son parcours. À propos des Versets sataniques, par exemple, il explique : « c’est mon grand roman londonien, il ne s’agit absolument pas d’un livre sur l’Islam, c’est un livre sur l’Angleterre et les immigrants du sud de l’Asie arrivés à Londres ». Sur notre XXIe siècle, il dit : « Jusqu’à présent, il est pire que le vingtième siècle. (…) Je n’ai jamais pensé que l’extrémisme religieux reviendrait au cœur de l’histoire ». Il aurait dû lire Malraux… En revanche, il ne parle presque pas, volontairement, de son prochain opus, Le couteau, récit de l’attentat du 12 août 2022 qui a failli lui coûter la vie, afin de ne pas le « spoiler ». Le livre paraît dans le monde entier le 16 avril, le 18 en France. Chez Gallimard, pour la première fois – en grand format : toute l’œuvre parue de Rushdie est déjà reprise en folio.
Dans chaque numéro de la NRF, il y aura un artiste invité. Là, c’est Patti Smith qui inaugure, avec quelques-unes de ses photos : le revolver de Verlaine, elle-même posant près de la tombe de Jean Genet, au Maroc... C’est intelligemment conçu, chic et varié. La rédactrice-en-chef, elle, attend impatiemment l’arrivée des exemplaires, sûre que ça va marcher : « On va réimprimer ! », dit-elle.
À noter que la NRF organisera aussi, à partir du mois d’avril, des rencontres, lectures et événements. La revue retrouvant son rythme trimestriel, le suivant paraîtra le 6 juin, avec un ensemble autour du surréalisme, de l’inconscient, à travers Anicet d’Aragon. On célébrera bientôt le centenaire du Manifeste du surréalisme et de la véritable révolution culturelle qui en a découlé.