« Présentez-vous simplement », lui a-t-on recommandé pour le premier contact. Il y a quatre ans, au début de l'aventure humaine et militante qu'elle raconte dans son premier récit, Valentine Cuny-Le Callet ne semblait pas avoir grand-chose en commun avec le condamné à mort américain avec qui elle s'apprêtait à entrer en relation. Un monde sépare alors l'étudiante à l'Ecole supérieure nationale des arts décoratifs, à Paris, rêvant de devenir illustratrice, du détenu Renaldo McGirth, en attente de son exécution dans le couloir de la mort d'un pénitencier de Floride depuis 2008. Elle a 19 ans et lui dix de plus quand elle devient l'une de ses correspondantes, par l'intermédiaire de l'ACAT (l'Action des Chrétiens pour l'abolition de la torture), l'association œcuménique qui a mis en place ce réseau de soutien épistolaire. « Je ne suis pas croyante mais je partage les valeurs de l'association » et avec eux, « la conviction que personne ne devrait être condamné à mort, sous aucun prétexte », écrit-elle au jeune détenu dans sa première lettre.

Une relation à distance et très encadrée par l'administration pénitentiaire - la longue liste de motifs de rejets frise souvent l'absurde -, s'installe ainsi. Lettres, photos et dessins s'échangent. Des liens se nouent, renforcés par la première visite de trois jours accordée à la jeune femme en novembre 2017, alors qu'elle passe un semestre d'étude dans une école d'art à Chicago. Des nouvelles réactivent aussi l'espoir comme la perspective, à la faveur d'un changement de législation rétroactif, d'une « re sentence », la première ayant été jugée inconstitutionnelle. De son côté, le prisonnier étudie le droit « pour prouver mon innocence ». « Qu'il soit coupable ou non ne fait pour moi aucune différence », affirme-t-elle dans ce convaincant plaidoyer qui documente de l'intérieur, dans ses détails les plus concrets, ce Monde dans 5 m², où, confie le condamné à sa correspondante, « Je vis un instant à la fois. »