25 AOÛT - ROMAN Italie

Alessandro Piperno- Photo PIERO POMPILLI/LIANA LEVI

Alessandro Piperno a d'emblée bénéficié d'un statut de star des lettres digne de celui d'un Jonathan Franzen, dès la parution d'Avec les pires intentions (Liana Levi 2005, repris en Folio), son coup d'essai, best-seller en Italie traduit ensuite un peu partout dans le monde. Comme Les corrections, il s'agissait là d'une impressionnante histoire de famille. C'est à nouveau aussi un peu le cas de l'éblouissant Persécution, qui constitue la première partie d'un diptyque romanesque qui s'annonce grandiose.

On suivra ici les déboires de Leo Pontecorvo, l'un des "maîtres les plus novateurs de la cancérologie pédiatrique du pays", un médecin qui soigne sans relâche les enfants malades. Le héros de Piperno a 48 ans lorsque s'ouvre le livre, en juillet 1986. Juif, de gauche - ce défenseur acharné de Bettino Craxi voue également un culte à François Mitterrand, à qui il a eu l'occasion de parler une fois. Il roule en Jaguar "bleu France", collectionne les disques de Ray Charles et tient une rubrique sur la santé dans le Corriere della Sera intitulée "Mieux vaut prévenir que guérir".

Le professeur a donc tout pour lui. Il est bien né, possède un bon physique, une belle villa, une épouse aimante. La discrète Rachel Spizzichino, issue d'un milieu plus modeste que le sien, a été son étudiante et lui a donné deux fils, Filipo et Samuel. Les années passant, Leo n'a jamais cessé de lui être fidèle. Les Pontecorvo sont certes des bourgeois à la vie aisée, mais pas des oisifs.

Voici que leur quotidien bascule. Que le Sauveur va devenir un Pécheur, connaître le scandale et le déshonneur. Leo est en effet accusé au journal télévisé d'avoir entretenu "une correspondance dépravée" avec la petite amie de son fils cadet. La rouquine Camilla, à peine 13 ans, qui s'adresse en français à ses parents et que les Pontecorvo avaient emmenée avec eux en vacances en Suisse. Est-elle un monstre de perversion, une "psychopathe", ou bien a-t-elle réellement été abusée?...

Styliste et architecte accompli, Alessandro Piperno joue sur tous les tableaux avec une identique maestria. Persécution peut à la fois se lire comme le portrait d'un pays et d'un milieu social ; celui d'un couple, avec ses accords et ses désaccords. L'auteur de Proust antijuif (Liana Levi, 2007) y dépeint la construction d'un homme et sa chute, la perte de son identité, thème déjà au coeur d'Avec les pires intentions.

On attend avec impatience de lire la suite de son projet à la fois balzacien et proustien. La seconde partie mettra en scène la famille Pontecorvo dans les décennies suivantes et aura pour protagonistes les enfants de Leo. D'ici là, Persécution constitue l'un des moments forts de la rentrée littéraire étrangère.

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