Quels sont les médias qui ont le plus d'impact sur les ventes de livres aux États-Unis ?
Cela dépend vraiment du livre. Je travaille principalement avec des auteurs de fiction et de jeunes romanciers, donc je vise généralement un bon portrait de l'auteur, des critiques dans des journaux comme New York Times, Washington Post, Los Angeles Times ou USA Today, et une interview dans une émission de la NPR comme « Fresh Air » ou « All Things Considered ». Je fais aussi en sorte que mes clients figurent dans les listes des « livres les plus attendus » de l'année à venir, et retiennent l'attention des médias littéraires comme The New Yorker, The Paris Review, New York Review of Books, etc. Nous avons d'excellents late shows, mais les occasions d'interviews pour les auteurs y sont très rares. Et contrairement à la France, nous n'avons pas ici une émission de télévision consacrée à la culture du livre. Pas une !
Certains médias ont-ils gagné en d'influence ? Les réseaux sociaux peut-être ?
Certainement. En août dernier Ecco, l'éditeur du roman Le chant d'Achille, de Madeline Miller (disponible en France chez Pocket), a été stupéfait de voir qu'il se vendait soudain à 10 000 exemplaires par semaine, alors qu'il est paru il y a dix ans. Ils ont relié ce pic de ventes à une vidéo publiée sur TikTok, « ces livres vont vous faire pleurer ». Après tout, pourquoi pas ? Les journaux aux États-Unis réduisent de plus en plus la place dédiée au livre dans leurs pages, et nous perdons cette pensée critique. Donc si un lecteur est attiré par un livre parce que quelqu'un sur TikTok lui a dit que ça allait le faire pleurer, et que ce livre le bouleverse, tant mieux ! Il n'y a pas de mauvaise façon pour un lecteur de trouver un livre.
Certains influenceurs font-ils la pluie et le beau temps sur les ventes ?
Oprah Winfrey est toujours extrêmement influente - non seulement ses choix pour son club de lecture, mais aussi les livres mis en lumière dans Oprah Daily, son magazine. Et les recommandations des clubs de lecture sont très puissantes : avoir votre livre sélectionné, c'est comme gagner à la loterie. J'aime beaucoup Belletrist, celui de l'actrice Emma Roberts, mais le plus influent est sans doute celui de Reese Witherspoon. Tous ces clubs choisissent d'excellents livres qui suscitent la réflexion, c'est pour cela qu'ils durent. Et il existe aussi des comptes Instagram dédiés à la littérature. Personnellement, j'aime suivre des auteurs comme Roxane Gay et Alexander Chee.
Comment planifiez-vous un plan de communication efficace pour un livre ?
Je commence par voir avec tous mes clients comment ils parlent de leur livre. « Comment décrivez-vous votre ouvrage en une phrase ? Quelles questions voulez-vous que l'on vous pose sur votre livre et comment y répondez-vous ? », etc. Récemment, je préparais une interview radio avec une autrice, et à la question « pourquoi avez-vous écrit ce livre », elle prévoyait de répondre en parlant de son style. Mais y a-t-il quelque chose de moins intéressant pour un lecteur qu'un écrivain qui parle d'écriture ? Personnellement, je m'endors. Nous avons donc creusé un peu, et elle s'est souvenue de ce qui l'avait inspirée : la photo d'une petite fille couverte de cendres et de suie, assise sur un perron à Manhattan, à la fin des années 1800. Cela incite immédiatement les auditeurs à vouloir en savoir plus. Si l'écrivain est passionné par son travail et sait en parler clairement, vous avez déjà fait la moitié du chemin. L'autre moitié tient au livre en lui-même : quel que soit le buzz ou l'attention qu'un livre suscite, il faut qu'il soit de qualité. Vous ne pouvez pas tromper les libraires ou les lecteurs.