Avant-portrait

Jean-Pierre Le Dantec, la cause du roman

Jean-Pierre Le Dantec. - Photo photo Catherine Hélie © Gallimard

Jean-Pierre Le Dantec, la cause du roman

Dans Un héros, Jean-Pierre Le Dantec ranime la figure exemplaire de Georges Guingouin et, mezzo voce, nous parle de lui.

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Par Olivier Mony
Créé le 30.01.2015 à 01h03 ,
Mis à jour le 30.01.2015 à 11h47

Il ne faut pas "cuisiner" longtemps Jean-Pierre Le Dantec pour qu’il avoue. Georges Guingouin, ce Héros autour duquel s’organise son livre, a beau ressortir des registres de l’exemplaire et de l’admirable, c’est pour lui plus que cela encore. C’est son père. Une version limousine plus que bretonne, mais à cela près identique, d’instituteur rural, communiste, FTP (Franc-Tireur et partisan). Chassez l’écriture de soi, elle revient au galop. Et comme Le Dantec "croit plus aux effets de vérité qu’aux biographies", son livre sera un roman.

Un rêve trop grand

Dans le genre, la vie du romancier se pose un peu là. Ses vies, plutôt. Jean-Pierre Le Dantec donc, gamin né de la guerre dans un petit village des Côtes-d’Armor. Voilà l’enfance, celle des lectures de James Oliver Curwood (plus tard de Villon, Rimbaud, Apollinaire, le Cendrars de Moravagine, et Hermann Hesse) et du serment d’être "soit celui qui chante, soit celui que l’on chantera"… Après Maths sup, Maths spé et Centrale (où il côtoie le chanteur Antoine), le jeune Le Dantec se dirige d’abord vers la seconde hypothèse.

Ingénieur il sera, mais d’abord de la révolution. Après l’Union des étudiants communistes, il fait son voyage en Chine et devient l’un des leaders de la Gauche prolétarienne et le directeur de La Cause du peuple (où il exerce ses talents d’agit-prop auprès de Sartre et de Michel Le Bris), ce qui lui vaudra à l’aube des années 1970 un séjour de plusieurs mois à la Santé. Il n’est d’ailleurs pas interdit de penser que les pages qu’il consacre dans son dernier livre aux procès montés de toutes pièces et aux séjours en prison dont fut victime Georges Guingouin résonnent d’un écho personnel…

Pour Jean-Pierre Le Dantec, la révolution était un rêve trop grand pour en faire simplement le deuil. Mao voulait que "cent fleurs s’épanouissent", il va s’y employer. Différemment. Et au passage, si l’on se trouve jamais, finir de se rencontrer… Ce sera la grande aventure de l’enseignement de l’architecture à Paris-La Villette (dont il est le directeur de 1999 à 2006) et la découverte de nouveaux horizons, du côté de l’urbanisme et surtout du paysagisme. Les fleurs, ça a besoin de jardins…

Le deuil de mai passera aussi par un retour au roman, "en fait, un retour à l’adolescence". L’un de ses meilleurs amis, Olivier Rolin, a écrit là-dessus les plus belles pages (son autre ami, c’est Jean Echenoz, ce qui prouve assez combien notre jardinier est homme de goût). Ce sera Ile-Grande (La Table ronde, 1989), beau premier roman mélancolique autour du séjour en Bretagne, dans l’île en question, de Joseph Conrad et de sa femme. Un héros est le cinquième et il brille d’une même bienveillante intelligence.

Olivier Mony

 

Jean-Pierre Le Dantec
Un héros. Vie et mort de Georges Guingouin
Gallimard
Prix : 18,90 euros, 235 p.
Sortie : 12 février
ISBN : 978-2-07-014815-8

 

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