C'est ça, l'amour fou, ça commence dès le matin. A la première image, le ton est donné. Sur la page de gauche une maman s'étire et bâille tout son saoul sous une énorme couette blanche. De l'autre côté des plumes, une petite frimousse bouclée apparaît à travers la porte. « Mais qui voilà ? C'est mon tigron ? », demande la maman.

En écho sur la page de droite, la même scène, mais vue par la petite fille dont l'ombre - augmentée de celle de son doudou - est projetée sur la couette où se prélasse la mère. Une « montagne blanche qui bouge », selon l'enfant.

Ainsi la journée peut bien commencer « par un long câlin dans la montagne ». Petit déjeuner où chacune raconte ses rêves, séance d'habillage, chignon pour la mère, chignon pour la fille, et hop ! les voilà lancées toutes deux dans leur journée de boulot respective, école pour l'une, et bureau pour l'autre. Loin des yeux mais pas du cœur...

Mais voilà déjà l'heure du goûter, le temps d'un passage à la boulangerie et d'un petit caprice, de la douche et du dîner, et il est déjà temps d'aller au lit. Sur le thème éculé de l'amour fusionnel de et pour l'enfant, cet album réussit l'exploit de l'originalité. Le texte épatant, signé Pauline Delabroy-Allard, primo-romancière remarquée lors de la dernière rentrée littéraire, fourmille de trouvailles poétiques empruntées à la vision même de l'enfance, mais surtout prend à bras-le-corps le lien charnel, physique.

L'enfant : « Je fais le tour de sa cuisse avec mes bras. J'hésite à poser ma tête sur sa fesse droite ou sa fesse gauche, elle en a deux. » La mère  : « Je ne résiste pas à de petits baisers sur son ventre rebondi, là, juste là, où la peau est à la fois sucrée et salée. »

Dans cet album, on se papouille, on se câline à tout-va. On s'aime et on le fait savoir. L'illustration signée Miyoko Hifumiyo est elle aussi miraculeuse.