Frais postaux

Depuis le 1er janvier, La Poste applique une tarification Colissimo à tout paquet de plus de 3 cm d’épaisseur, quel que soit son poids, ce qui augmente de 30 % au moins le coût d’envoi d’un livre, qui, jusque-là, selon un usage "toléré", pouvait être affranchi sous le tarif lettre. Si la hausse des tarifs postaux a clairement été annoncée, cette subtilité passée sous silence a créé il y a quelques semaines la surprise chez les éditeurs qui se sont vu retourner des sacs entiers de leurs services de presse. A charge pour eux de refaire l’envoi en bonne et due forme, avec nouvelle étiquette conforme à télécharger sur Expeditor, le logiciel de La Poste, et affranchissement ad hoc : 6,04 € HT pour un colis de moins de 500 g, contre 4,10 € en tarif lettre (3,99 € en 2014). Un paquet de 3 à 4 livres (entre 1 et 2 kg) sera expédié au prix de 8,13 € (contre 5,04 auparavant), tandis qu’un particulier paiera 8,50 € en ligne ou 8,95 € dans un bureau de poste.

Suite à une sanction par l’Arcep, en décembre 2011, "pour l’absence, au sein du service universel, d’une offre permettant d’envoyer des petits objets à un prix abordable", La Poste s’est inspirée des modèles européens pour offrir une gamme plus simple limitant les produits. En Europe, la plupart des services postaux appliquent ce seuil des 3 cm ; seule la Deutsche Post, en Allemagne, a choisi une rupture tarifaire à 5 cm.

"La crise fait que nous multiplions nos services de presse. J’expédie maintenant un minimum de 1 000 exemplaires par an", s’alarme Sabine Wespieser qui calcule déjà le coût d’envoi du livre de Diane Meur, à la prochaine rentrée littéraire : 7 000 €, au bas mot. Alertée par Jean-Paul Hirsch, directeur commercial de P.O.L, elle devrait l’accompagner avec Philippe Robinet, P-DG des éditions Kero, à une rencontre au ministère de la Culture le 26 février, à l’initiative de Vincent Monadé, président du Centre national du livre : "J’ai très vite estimé que cela ne pouvait pas se régler au CNL", précise celui-ci, prêt à jouer les médiateurs entre les éditeurs et sa ministre de tutelle, Fleur Pellerin, pour qu’elle négocie avec la direction de La Poste. "Cette nouvelle règle frappe d’abord les petits éditeurs, les gros pouvant négocier leurs tarifs. Il faut réfléchir à un tarif égalitaire, estime-t-il avant d’ajouter : c’est une mauvaise politique qui revient à privilégier un type d’opération, menée par Amazon au pire, la Fnac au mieux".

Au-delà des professionnels qui pourront toujours trouver des solutions, en se tournant par exemple vers les distributeurs parisiens de services de presse (voir encadré) aux tarifs bien plus avantageux, et déjà bien connus des grands groupes, Philippe Robinet s’inquiète de l’impact de cette hausse des tarifs sur les particuliers. "C’est un pas de désengagement de La Poste vis-à-vis des produits culturels, s’alarme-t-il. Pour les particuliers, il devient plus difficile d’envoyer des livres en cadeau. C’est dommage, au moment où on réaffirme la primauté de la culture." Atterré par la politique du service public, il déplore : "La Poste décide de passer la main à des sociétés privées qui vont la supplanter." Le spectre d’Amazon se profile.

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