Avant-critique Témoignage

Flora Nicol, "Mes lettres de cachets" (Studiofact Éditions) : Combats contre soi

Flora Nicol - Photo © Catherine Girma

Flora Nicol, "Mes lettres de cachets" (Studiofact Éditions) : Combats contre soi

Dans un récit limpide, la journaliste Flora Nicol décrit sa descente aux enfers à la suite d'un viol et son combat contre les addictions.

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Par Kerenn Elkaim
Créé le 14.10.2022 à 14h00

Il y a parfois un tel décalage entre l'image qu'on renvoie et ce qu'on vit en soi. Flora Nicol frôlait la perfection : un travail passionnant de journaliste et réalisatrice de documentaires, une vie privée harmonieuse et des rêves plein la tête. Mais c'était compter sans un cauchemar qui allait la pulvériser. Il faut souvent des années pour parvenir à nommer les choses... « J'avais honte de ce texte. Je le confesse », avoue l'autrice de ce récit singulier, publié dans la maison Studiofact, vouée à « raconter le réel ». Comment revenir sur cette nuit qui a tout détruit ? Le viol lui vole son existence en s'imposant constamment. « La cicatrice qu'il m'a infligée macule mon âme, elle est indélébile. » Seuls des médicaments parviennent à l'assommer par moments. Puis, la drogue prend le relais. « C'est tout ce que j'ai trouvé pour ne pas sombrer quand j'ai été engloutie par un caprice du destin. » L'ambition étant d'anesthésier le souvenir de l'horreur, mais Flora finit par s'enliser. « Je fais partie d'une nouvelle catégorie : les toxicophiles. Littéralement amoureuse du poison. C'est vache une addiction. Un véritable démon, qui terrasse la raison. » La jeune femme croit pouvoir le maîtriser, or sa vie lui échappe. « Consommer, c'est aussi me consumer, littéralement m'anéantir, me détruire. » Comprenant qu'elle se dirige droit dans le mur, Flora fait le choix difficile de se sevrer. « C'est un deuil qu'on entreprend. Personne n'est motivé par un deuil. Entre la liberté et la prison, il y a la cure de désintoxication. » Un parcours qu'elle relate merveilleusement dans ce texte, tantôt hilarant, tantôt poignant. Sa plume savoureuse croque le portrait de cet univers inhabituel et de ses congénères. « Leur corps de junkie est comme un meuble Ikea qui aurait été mal monté. » Et malgré les effets secondaires et la solitude, des liens se tissent.

« Je n'ai plus envie de mourir, mais pas toujours envie de vivre », confesse Flora Nicol qui sait que sa bataille contre les addictions est infinie. « Il ne me reste que la voie de la volonté. On n'a pas le choix d'être libre. On est libre », notamment grâce à la puissance de l'écriture.

Flora Nicol
Mes lettres de cachets
Studiofact éditions
Tirage: 5 000 ex.
Prix: 18,50 € ; 256 p.
ISBN: 9782958071271

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