A année présidentielle, traditionnellement peu favorable aux ventes de livres, rentrée littéraire toute en modestie. Un an après le cru exceptionnel de janvier 2015 où se pressaient Michel Houellebecq, Virginie Despentes et Emmanuel Carrère, Jean Echenoz, Edouard Louis, Philippe Claudel et Sylvie Germain, peu de têtes d’affiches figurent dans les programmes de littérature pour janvier et février 2017. Par effet de contraste, les trois romanciers stars de ce début d’année, Daniel Pennac et Elena Ferrante chez Gallimard, et Grégoire Delacourt chez Lattès, n’en apparaissent que plus attendus, avec des tirages particulièrement hauts pour la "petite rentrée" du calendrier littéraire. Loin de se résoudre à cette polarisation des ventes, les éditeurs ont choisi de donner un peu d’air à la production, à l’inverse de la tendance de ces dernières années. Avec 517 nouveautés programmées en littérature contre 476 l’an dernier (+ 8,6 %, source Livres Hebdo/electre.com), le nombre de romans français et étrangers augmente, revenant au niveau moyen de la dernière décennie. La hausse est plus sensible encore en littérature française, où l’on dénombre 337 romans contre 308 en 2016 (+ 9,4 %), qu’en littérature traduite, où l’on passe de 168 à 180 titres (+ 7,1 %). Mais les ventes moyennes décevantes de la rentrée de septembre dernier ajoutées aux échéances électorales du printemps prochain n’autorisent pas toutes les prises de risques, preuve en est la baisse de 9,6 % du nombre de premiers romans, de 73 l’an dernier à 66 cette année.
La rentrée des jurés
En littérature française, moins audacieux quant aux découvertes, les éditeurs préfèrent rester fidèles à des auteurs déjà à la tête d’une œuvre. Comme en septembre, Gallimard présente la rentrée la plus musclée. Outre Daniel Pennac, qui crée l’événement en reprenant sa saga sur les Malaussène (Le cas Malaussène. 1, Ils m’ont menti), la maison mise notamment sur Pierre Péju (Reconnaissance), Aurélien Bellanger (Le Grand Paris), Grégoire Polet (Vitamines) et Jean-Marie Rouart (Une jeunesse perdue) en janvier, et programme plusieurs figures des lettres en février, parmi lesquelles Anne Wiazemsky (Un saint homme), membre du jury Médicis, et Philippe Sollers (Beauté), du prix Décembre. Suivant la tradition, les jurés et auteurs multiprimés sont nombreux dans ce temps fort plus éloigné de la saison des grands prix. Le prolifique Patrick Besson, du Renaudot, a rejoint Grasset (Cap Kalafatis), où il côtoie le Goncourt 1982 Dominique Fernandez (La société du mystère) mais aussi Geneviève Brisac (Vie de ma voisine), lauréate du Femina en 1996 et transfert de L’Olivier où elle publiait depuis plus de vingt ans. La maison à la couverture jaune pourra compter sur un autre transfert, le jeune Oscar Coop-Phane (Mâcher la poussière), lauréat du prix de Flore en 2012 lorsqu’il était chez Finitude, pour porter sa rentrée. Michel Braudeau, juré du Médicis, revient au Seuil pour publier Place des Vosges, inspiré de son expérience d’auteur. A ses côtés, la jeune génération n’est pas en reste, représentée par le cinéaste et écrivain Xabi Molia (Les premiers : une histoire de super-héros français) ou Julien Decoin (Soudain le large), le fils du juré Goncourt Didier Decoin. Ce dernier partage d’ailleurs cette rentrée avec sa progéniture, puisqu’il retrouve Stock cinq ans après Une Anglaise à bicyclette pour y publier Le Bureau des jardins et des étangs. Claire Gallois, jurée du Femina, est elle aussi dans la "Bleue" en janvier, empruntant à Joe Dassin le titre de son dernier ouvrage, Et si tu n’existais pas.
Alors que Flammarion renouvelle sa confiance à Mathieu Belezi (Le pas suspendu de la révolte), publié dans la maison depuis 2011, Laurent Seksik (Romain Gary s’en va-t’en guerre) ou Alexandre Kauffmann (Stupéfiants), et accueille dans son catalogue la Québécoise Denise Bombardier (Plus folles que ça tu meurs), transfert de chez Albin Michel, et Helena Noguerra (Ciao amore), venue de Denoël, Actes Sud retrouve Régine Detambel, qui se penche sur les mariages d’August Strindberg (Trois ex), Loïc Merle (La vie aveugle) ainsi que le Renaudot 1994 Guillaume Le Touze (La mort du taxidermiste). Aux côtés de Grégoire Delacourt (Danser au bord de l’abîme), Lattès tentera de faire de la place à Valérie Tong Cuong (Par amour), dont c’est le troisième roman dans la maison, et Isabelle Miller (Le problème avec l’amour), qui arrive de Léo Scheer. Stéphanie des Horts, fidèle à Albin Michel, y publie son nouvel opus (Pamela), sur la vie de l’ambassadrice Pamela Harriman. C’est aussi à Albin Michel que Pierre Chavagné confie son nouveau livre, Les duellistes, son premier roman ayant paru chez Grasset.
Plusieurs auteurs confirment d’ailleurs leur talent en publiant leur deuxième roman cet hiver. C’est le cas de Frédéric Viguier (Aveu de faiblesses), toujours chez Albin Michel, de Pierre Adrian aux Equateurs (Des âmes simples), repéré l’an dernier avec La piste Pasolini, d’Alexandre Civico toujours chez Rivages (La peau et l’écorce), de Marina Carrère d’Encausse chez Anne Carrière (Une femme entre deux mondes), de Léa Wiazemsky, programmée chez Michel Lafon (Le bruit du silence) aux côtés de la nouveauté d’Angélique Barbérat (La vie enfuie de Marta K.), d’Astrid Manfredi (Havre nuit) et Julien Dufresne-Lamy (Deux cigarettes dans le noir) chez Belfond, ou encore de Loulou Robert (Hope) et Anne Akrich (Il faut se méfier des hommes nus) chez Julliard, maison où l’on retrouve les plus expérimentés Philippe Besson (Arrête avec tes mensonges) et Mazarine Pingeot (Théa).
Piliers et transferts
La "rentrée d’hiver" reste un moment fort de l’année littéraire, que choisissent les maisons pour publier certains de leurs auteurs phares, qu’ils soient des piliers du catalogue ou des prises de guerre. Eugène Green (Les voix de la nuit) portera la rentrée de Robert Laffont, qui suit également Armel Job (En son absence) et Sylvie Ohayon (Micheline). P.O.L continue à accompagner Pierric Bailly (L’homme des bois) et Emmanuelle Pagano, cette dernière poursuivant, avec Sauf riverains, sa Trilogie des rives.Gaëlle Obiégly reste chez Verticales pour N’être personne, contant les doutes et frustrations d’une hôtesse d’accueil enfermée tout un week-end dans les toilettes de son entreprise. Indissociables des éditions de Minuit, Eric Chevillard et Tanguy Viel y publient respectivement Ronce-Rose et Article 353 du Code pénal, tandis que L’Olivier mise sur Christian Oster (La vie automatique) et Dominique Fabre (Les soirées chez Mathilde). Le Goncourt 2007 Gilles Leroy tirera la rentrée du Mercure de France (Dans les westerns), Nan Aurousseau, qui avait publié cinq romans chez Stock, celle de Buchet-Chastel avec un texte inspiré de son séjour en prison (Des coccinelles dans des noyaux de cerise), alors que Philippe Ségur, après un détour par Belfond en 2014, revient chez Buchet-Chastel avec Extermination des cloportes. Auparavant au Seuil, Camille de Toledo passe chez Gallimard (Le livre de la faim et de la soif) et Dmitrij Bortnikov, qui appartenait au catalogue étranger d’Allia et Noir sur blanc, publie son premier roman en français chez Rivages (Face au Styx).
Les maisons de taille plus modeste profitent elles aussi du début de l’année pour programmer des auteurs ayant grandi au sein de leur catalogue. Ainsi de Michèle Lesbre chez Sabine Wespieser (Chère brigande : lettre à Marion du Faouët), Cécile Coulon chez Viviane Hamy (Trois saisons d’orage), Arnaud Dudek (Les vérités provisoires) et Pierre Raufast (La baleine thébaïde) chez Alma, Pauline Klein chez Allia (Bois), Joseph Incardona chez Finitude (Chaleur), Catherine Locandro chez Héloïse d’Ormesson (Pour que rien ne s’efface), Brahim Metiba au Mauconduit (La voix de Papageno) ou encore Alizé Meurisse chez Léo Scheer (Ataraxia) et Hubert Haddad chez Zulma (Premières neiges sur Pondichéry). Cependant HC éditions prend le contre-pied de cette stratégie en ne programmant que Charles Nemes (Deux enfants du demi-siècle), transfert des Presses de la Cité.
Comme à chaque début d’année, les journalistes et critiques sont nombreux à prendre la plume pour basculer du côté de la fiction. Chez Lattès, on notera la présence dans les programmes de Pierre Vavasseur, journaliste culture au Parisien, qui publie son cinquième roman dans la maison (Un pas de danse), mais aussi de Michel Richard, directeur adjoint de la rédaction du Point, racontant sa maladie dans le bref Cancer Rhapsodie. Etienne de Montety, journaliste au Figaro littéraire, publie son troisième roman chez Gallimard (L’amant noir), et Fabrice Tassel, responsable des enquêtes chez GQ, qui avait donné son premier roman chez Denoël en 2012, livre son second, Courir dans la neige, au jeune département français des Escales. Critique littéraire en particulier à Livres Hebdo, Sean Rose évoque, dans son deuxième roman, Le meilleur des amis chez Actes Sud, l’influence d’un premier amour dans l’existence, et Jacky Durand, journaliste culinaire à Libération, donne son premier roman, Marguerite, à Carnets Nord, après y avoir publié plusieurs recueils de chroniques.
Politique-fiction
Moins présente que lors des dernières rentrées littéraires, l’exofiction fait de la résistance sous la plume de Barbara Lecompte, qui publie L’encrier de Madame de Sévigné chez Arléa, Paul Vacca chez Belfond (Au jour le jour), se penchant sur la vie d’Eugène Sue, Marie-Eve Lacasse et son portrait de la styliste Peggy Roche chez Flammarion (Peggy dans les phares) ou Isaure de Saint Pierre chez Albin Michel (Gabrielle d’Estrées ou Les belles amours), qui romance le destin de la favorite d’Henri IV. Mais c’est surtout la politique, et ce n’est pas un hasard, qui relie plusieurs ouvrages de cette "rentrée d’hiver". Certains écrivains se placent directement en observateurs de l’élection présidentielle, comme Eric Pessan chez Albin Michel (La nuit du second tour), imaginant des émeutes après une victoire du Front national, ou les Kids du Bondy Blog Mehdi Meklat et Badroudine Saïd Abdallah, qui arrêtent le temps dans leur deuxième roman au Seuil (Minute) pour suivre le parcours d’un écrivain, d’un sans-abri, d’un réfugié et d’un couple une minute avant l’annonce des résultats.
D’autres préfèrent mettre en scène la vie politique et ses protagonistes, nommément à l’instar de David Desgouilles dans Dérapage au Rocher, chez qui Nicolas Sarkozy se retrouve enlevé par un commando libyen pour venger la mort de Mouammar Kadhafi ou, de façon moins frontale, comme Cécile Guilbert chez Grasset (Les républicains), qui se livre à un portrait cruel de nos élites, et Hélène Risser chez Plon (La plus folle de nous deux), dont le personnage principal est une femme dans la course pour l’élection. Optimiste, D. J. F. Audebert dépeint lui, dans Le dernier chômeur chez Albin Michel, un président ayant réussi à éradiquer le chômage, mais confronté à la résistance d’un ultime demandeur d’emploi. Plus ancrées dans le temps présent, enfin, quelques plumes masculines font des attentats qui ont touché la France la toile de fond de leur dernier livre. Chez Gérard Krawczyk au Cherche Midi (Foudroyé), l’intrigue démarre le 7 janvier 2015, jour de l’attaque de Charlie Hebdo. Arthur Dreyfus retrace dans Sans Véronique, chez Gallimard, le parcours d’un terroriste en parallèle du deuil de la famille d’une victime. Pascal Manoukian raconte chez Don Quichotte (Ce que tient ta main droite t’appartient) l’infiltration d’un jeune musulman dans les rangs de Daesh pour mieux frapper l’organisation en son cœur. M. D.
Sept incontournables français
Premiers romans : la parité se maintient
Parmis les auteurs faisant en janvier-février leur entrée en littérature figurent autant d’hommes que de femmes. Beaucoup privilégient les grands thèmes de la littérature romanesque comme l’art d’exister, la famille ou l’histoire.
Sur les 66 premiers romans français à paraître en janvier et février, recensés par Livres Hebdo, 35 ont été écrits par des hommes et 32 par des femmes, dont un, chez Ecriture, écrit à quatre mains par une femme et un homme. Une parité quasi parfaite et inédite. Comparé au cru record de 2016, le nombre de premiers romans publiés se contracte de près de 9,6 %. City, Lattès et Plon se distinguent avec, chacun, 3 premiers romans.
Parmi les professions les plus représentées chez les primo-romanciers se trouvent les journalistes, avec 10 représentants dont Jacky Durand (Libération), Laurent-David Samama (LesInrocks, L’Optimum, La Règle du jeu) et Stéphane Arfi (Bonheurs magazine). Le grand écran n’est pas en reste avec 6 personnalités issues du monde du cinéma comme l’actrice Aure Atika (dans La vérité si je mens !), le scénariste Jean-Louis Milesi ou le réalisateur David Zaoui. Les enseignants sont aussi largement représentés avec, notamment, trois professeurs de français, Bernard Allays, Axelle Faussadier et Maryam Madjidi. D’autres exercent des métiers plus inattendus comme Ludovic Robin qui travaille à l’entretien des rives du canal de Nantes à Brest, ou Michel Voisin, steward pendant quinze ans.
L’art d’exister
Cette saison, les primo-romanciers se penchent sur des questions existentielles. Arnaud Modat signe, avec Arrêt non demandé (Alma), un récit en six épisodes sur l’art d’exister, d’un humour décapant. Qu’est-ce qu’une vie réussie ? C’est le mystère que tente de percer Jeanine, 65 ans, dans L’abandon des prétentions de Blandine Rinkel (Fayard). Sophie Aubard évoque la reconstruction, dans Pas de deux (Atelier Mosésu), après que Manon et Solyne, qui ont survécu à une collision entre leur voiture et un avion. Dans 11 ans, Jean-Baptiste Aubert (Christophe Lucquin) met en scène Kévin, un jeune garçon qui veut mettre fin à ses jours mais qui rate sa tentative de suicide.
La famille et ses drames
Autre thème présent : les drames familiaux. Frank, un père de famille au foyer, reçoit des lettres anonymes lui annonçant l’infidélité de son épouse dans Sous le compost (Fleuve éditions), de Nicolas Maleski. L’infidélité encore avec l’héroïne de Jean-Louis Milesi (Les bottes de Clint Eastwood, Le Passage) qui a toujours trompé son mari mais qui est cruellement affectée par son décès. Dans Principe et suspension (Liana Levi), Vanessa Bamberger dresse le portrait d’Olivia qui observe son époux plongé dans le coma. Enfin, Ludovic Robin conte, dans Aller en paix (Rouergue), la dissolution d’un couple malgré l’amour que porte le père de famille à sa femme.
L’histoire
La Seconde Guerre mondiale est aussi à l’honneur. Jacky Durand aborde, dans Marguerite (Carnets Nord), la solitude et l’attente d’une femme, mariée avec Pierre, mobilisé en 1939, jusqu’à sa rencontre avec Frantz, un soldat allemand. Dans La vie magnifique de Frank Dragon (Grasset), Stéphane Arfi raconte l’histoire d’un jeune garçon muet dont les parents sont déportés en 1940. Après la Libération, son père lui raconte ce qui s’est passé dans les camps, et se pend. Manuel Benguigui raconte l’histoire d’Un collectionneur allemand (Mercure de France). Ludwig ne vit que pour l’art et se fiche de la nature du régime nazi, jusqu’au jour où, à Paris, il croise le chemin de Lucette, une résistante. Dans Nous, les passeurs (Robert Laffont), Marie Barraud enquête sur son grand-père, médecin et résistant, qui a disparu pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle découvre son destin à la fois héroïque et tragique. C. L.
Romans étrangers : du monde entier
Le programme de littérature étrangère de l’hiver sera plus nourri et plus ouvert que le précédent, avec des auteurs de contrées très variées et de nombreux premiers romans.
Le département de littérature étrangère reste toujours aussi stratégique pour les maisons littéraires et ce ne sont pas les derniers mouvements d’éditeurs qui le démentiront. Le tandem Jean Mattern-Joachim Schnerf a quitté la collection "Du monde entier" (Gallimard) pour rejoindre Grasset en mai, tandis que Katharina Loix Van Hooff est arrivée chez Gallimard. Stock a choisi Raphaëlle Liebaert, remplacée chez Autrement par une ancienne de L’Olivier, Emilie Lassus, pour reprendre "La cosmopolite", alors que sa précédente directrice éditoriale, Emmanuelle Heurtebize, est en train de lancer un département littérature chez Delcourt. La directrice littéraire Sarah Hirsch apporte un nouveau souffle à Nil, et Sabrina Arab développe HarperCollins France.
20 % d’Américains
Ces changements n’influeront pas directement sur les programmes de l’hiver 2017, préparée depuis plus d’un an. La prochaine cuvée réunit entre janvier et février 180 romans et nouvelles traduits contre 168 en 2016 (+ 7,1 %). Révélations ou grands noms, il y a un engouement pour l’ailleurs, une façon de voyager en traversant les frontières culturelles et linguistiques. Si les écrivains américains restent prisés avec le retour de Lauren Groff ou Poppy Z. Brite, ils ne représentent "que" 20 % de cette rentrée étrangère, qui présente des textes venus du monde entier : Russie, Australie, Chili, Kenya, Argentine, Pays-Bas, Chine, Afrique du Sud, Italie, Canada, Corée, Brésil, Espagne, Irlande, Roumanie, Turquie, Israël, Allemagne, Mexique, Inde, Islande, Pologne, Finlande, Irak, Libye, voire Trinité-et-Tobago avec Earl Lovelace.
Diversité géographique mais aussi de lectorat avec une offre allant de la fresque grand public, Martha Batalha dans le Brésil des années 1950, à des textes plus littéraires (Javier Marías, Jaume Cabré, Rosa Montero, Zeruya Shalev), des découvertes mais aussi des rendez-vous attendus comme le retour de l’Islandais qui avait porté la rentrée 2015 de Métailié, Eiríkur Orn Norddahl, le troisième volume de la saga d’Elena Ferrante ou la suite de Shantaram de Gregory David Roberts. Peu de grands noms écrasent la production de cette saison, qui reste ouverte. Confiants, les éditeurs programment une vingtaine de premiers romans. Dans Un impossible conte de fée, Han Yu-joo (Decrescenzo), la traductrice coréenne de Michael Ondaatje, tente de sauver une enfant maltraitée. Un même élan anime le héros de Julia Montejo dans Une vie à t’écrire (Les Escales). Un clandestin essaye aussi de s’en sortir, grâce à la boxe et la librairie, chez la Mexicaine Aura Xilonen (Liana Levi). Tim Murphy - L’immeuble Christodora (Plon) - aborde les années sida à travers plusieurs New-Yorkais. Auront-ils Le bel avenir promis par Robin Kirman (Albin Michel) ?
Pimenter le réel
Les Américains continuent à explorer leur société fissurée, comme le rappelle Le grand combat (des Noirs) de Ta-Nehisi Coates (Autrement), déjà remarqué avec Une colère noire. Des failles intimes reflètent un pays souffrant, estime Michael Collins dans Des souvenirs américains (Bourgois) ou Melanie Wallace dans Passer l’hiver (Grasset). L’Histoire inspire toujours autant les romanciers. Ainsi, le récit poétique de Susana Romano SuedPour mémoire (Argentine 1976-1983) (Des Femmes/Antoinette Fouque) dénonce le sort de toutes celles qui ont été internées sous la dictature. La catastrophe de Bhopal renaît sous la plume d’Amulya Malladi (Mercure de France). La fin de l’URSS marque les destins des héros d’Alexeï Nikitine (Noir sur blanc). Un inédit de l’auteur d’A l’ouest rien de nouveau, Erich Maria Remarque (Stock), nous offre un ultime regard de l’écrivain sur la Shoah et l’exil. L’exofiction ressuscite Edgar Allan Poe (Cullen Lynn chez Galaade), Eva Braun (Jane Thynne, Lattès), Nietzsche (Svetislav Basara, Noir sur blanc) et John Lennon (Mo Daviau aux Presses de la Cité). L’actualité perce dans la fiction avec Le dernier arrivé (Marco Balzano, Philippe Rey) sondant la thématique des réfugiés ; ou dans le roman de Sunil Yapa (Rivages) sur l’altermondialisation. Derniers refuges, la famille, l’amour, la nature et l’écriture continuent d’alimenter les promesses littéraires. L’avenir semble incertain, alors il reste au moins une potion magique : La petite librairie des gens heureux de Veronica Henry (City). K. E.