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Dossier Histoire : réenchanter le passé

OLIVIER DION

Dossier Histoire : réenchanter le passé

L'histoire reste le secteur phare des sciences humaines, même si elle est affectée par l'érosion structurelle des ventes. Les éditeurs rivalisent d'imagination pour proposer des ouvrages toujours plus originaux et accessibles à un grand public qui continue de répondre présent dès qu'on sait le solliciter.

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Par Charles Knappek
Créé le 17.02.2015 à 17h07 ,
Mis à jour le 06.03.2015 à 12h17

Avec une offre pléthorique et un lectorat qui s'effrite, l'édition en histoire présente quelques paradoxes. La plupart des acteurs s'accordent à reconnaître que l'érosion des ventes amorcée depuis plusieurs années se poursuit, en particulier pour les titres universitaires. "Les tirages sont globalement plus faibles que par le passé, observe Fabrice d'Almeida, directeur littéraire histoire chez Fayard depuis décembre 2011, qui explique ce resserrement par plusieurs raisons : "Le livre fait moins événement, il y a moins d'émissions historiques à la télévision ou à la radio, et il existe aussi un problème de relève des générations." Directrice éditoriale histoire chez Armand Colin, Caroline Leclerc déplore aussi que "les jeunes historiens abandonnent l'histoire populaire pour écrire dans des revues internationales qui valorisent davantage leur cursus honorum".

"Les jeunes historiens abandonnent l'histoire populaire pour des revues internationales qui valorisent davantage leur cursus honorum." CAROLINE LECLERC, ARMAND COLIN- Photo OLIVIER DION

Pour Charles Dupêchez, éditeur chez Pygmalion, "c'est l'époque qui a changé. Les jeunes n'apprennent plus l'histoire à l'école et manquent de repères, c'est un choix de société dont les humanités souffrent". Paul Garapon, des Puf, note un recul marqué des ouvrages destinés aux étudiants de licence : "Il y a sans doute une forme de désintérêt pour les livres qui ne sont pas strictement utilitaires, analyse-t-il. Les étudiants se contentent souvent des cours et n'investissent dans les livres qu'à partir du master." Du coup, "un titre qui s'écoulait à 5 000 exemplaires il y a dix ans ne se vend plus qu'à hauteur de 2 500 aujourd'hui, constate Dominique Missika, directrice littéraire chez Tallandier. Cette réalité suppose de régler la voilure pour chaque nouveauté, d'être attentif aux commémorations ou aux films qui apportent un coup de projecteur sur un sujet donné, et bien sûr de proposer une approche originale".

"On continue de sentir un goût du public pour l'histoire. C'est la raison pour laquelle notre production continue de progresser en 2012." DOMINIQUE MISSIKA, TALLANDIER- Photo OLIVIER DION

Malgré cette tendance baissière lourde, nombre de maisons d'édition développent des stratégies pour conserver un niveau de production élevé. Car de l'avis général, l'histoire, si elle décline, souffre moins que les autres disciplines en sciences humaines. "Cela fait vingt ans que je publie, et cela fait vingt ans que j'entends que l'édition historique va mourir, lâche Sophie Berlin, directrice éditoriale chez Flammarion. Même s'il faut se battre encore plus chaque année, la discipline bénéficie d'une bonne identification dans les rayons. Il faut aussi avoir conscience que les Français entretiennent un rapport particulier avec leur culture et leur histoire. En France, le public reste capable de lire des ouvrages exigeants, ce qui est moins vrai dans beaucoup d'autres pays."

"La crise ne doit pas nous éloigner du devoir de faire connaître de nouveaux auteurs et de défricher de nouveaux champs du savoir." LAURENCE DEVILLAIRS, SEUIL- Photo OLIVIER DION

Témoins, les éditeurs spécialisés Perrin et Tallandier sont capables d'enregistrer de très bons résultats avec plusieurs titres. Perrin a ainsi écoulé plus de 80 000 exemplaires de Femmes de dictateur de Diane Ducret, paru en janvier 2011. « 11-Septembre de Nicole Bacharan et L'altermanuel d'histoire de France de Dimitri Casali ont quant à eux allégrement dépassé la barre des 10 000 exemplaires", se félicite Benoît Yvert, le directeur de Perrin. Chez Tallandier, la biographie de Winston Churchill par François Kersaudy, parue en septembre, "fonctionne très bien", selon Dominique Missika. L'éditeur propose également depuis novembre une version illustrée de son best-seller, Le journal d'Hélène Berr, et revendique un bon démarrage pour France-Allemagne, l'heure de vérité, lancé en novembre. "La situation est difficile, mais on continue de sentir le goût du public pour l'histoire. C'est la raison pour laquelle notre production éditoriale continue de progresser en 2012", poursuit Dominique Missika. "Nous nous efforçons de concilier la qualité avec les exigences du commerce, ajoute Benoît Yvert, chez Perrin. Mais la commercialité des titres proposés n'est pas le critère ultime. Nous savons très bien que le travail de Laurent de Feller sur l'assassinat de Charles le Bon en 1127 [paru le 19 janvier, NDLR] a peu de chances d'être un best-seller, alors qu'un ouvrage comme Les derniers secrets du Vatican [sorti le 2 février, NDLR], par exemple, a meilleur espoir de trouver son public."

"Le gros enjeu du début d'année pour nous est la parution d'un ouvrage sur les 130 ans d'occupation française en Algérie." VÉRONIQUE SALES, VENDÉMIAIRE- Photo OLIVIER DION

Sont témoins également les éditeurs généralistes, tels Fayard avec une biographie de Jésus par Jean-Christian Petitfils, qui approche les 40 000 unités depuis sa parution à la rentrée, ou le tome 2 d'Historiquement incorrect de Jean Sévillia. Cette année, Fayard publiera, entre autres, L'année des quatre empereurs de Pierre Cosme au mois de mars et, au printemps, Les guerriers du froid, à propos des conditions de vie des soldats soviétiques pendant la Seconde Guerre mondiale. "Le livre de Cosme est particulièrement important car peu d'éditeurs continuent à faire de l'histoire ancienne", souligne Fabrice d'Almeida.

"Je suis frappée de voir que très peu de livres rédigés par des historiens figurent parmi les meilleures ventes de l'année." SOPHIE BERLIN, FLAMMARION- Photo OLIVIER DION

POLITIQUE D'EXCELLENCE

"La crise nous contraint à définir précisément notre politique éditoriale, note Laurence Devillairs, éditrice au Seuil, mais elle ne doit pas nous éloigner du devoir que nous avons de faire connaître de nouveaux auteurs et de défricher les nouveaux champs du savoir." Le Seuil, qui s'est démarqué l'an dernier avec son Histoire de la virilité en trois tomes, travaille sur un projet du même genre, "encore plus novateur et ambitieux" et toujours en droite ligne avec sa célèbre Histoire du corps. La maison édite également en février Prophètes et prophétismes.

Une politique d'excellence également revendiquée par Hélène Monsacré, directrice du département des sciences humaines chez Albin Michel : "La ligne de mon département est très exigeante. Nous publions une vingtaine de titres par an, ce sont le plus souvent des ouvrages ambitieux à faible tirage." Albin Michel a notamment publié en octobre, à 3 000 exemplaires, Les musulmans dans l'histoire de l'Europe. "Il s'agit d'un nouvel objet d'histoire, le livre a bénéficié de subventions de la part du CNL, de l'EHESS, de la Fondation des Treilles et du CNRS. Sans soutien, on ne pourrait plus publier aujourd'hui ce genre d'ouvrages", assure Hélène Monsacré. Le second tome est annoncé pour octobre prochain. En mars, Albin Michel publiera également un inédit de Lucien Febvre et François Crouzet, rédigé vers 1950 pour le compte de l'Unesco et intitulé Nous sommes des sang-mêlés : manuel de civilisation française.

Quelques bonnes surprises ont jalonné l'année des éditeurs, à commencer par les biographies de Périclès chez Armand Colin (près de 3 000 exemplaires vendus) et de l'empereur Constantin chez Tallandier, ou des ouvrages a priori peu accessibles, comme L'origine des systèmes familiaux d'Emmanuel Todd (Gallimard). "Nous en avons vendu plus de 13 000 depuis septembre, ce qui est exceptionnel pour un livre d'anthropologie historique", observe Eric Vigne, responsable des sciences humaines chez Gallimard. Chez Payot, la réédition du livre de Roland Bechmann, intitulé Les racines des cathédrales et agrémenté d'une préface inédite de Jacques Le Goff, a quant à lui trouvé 2 000 acheteurs en cinq mois. "Dans sa préface, Le Goff affirme que ce livre est un ouvrage majeur de l'historiographie du Moyen Age, pointe Christophe Guias, directeur éditorial chez Payot. A sa lecture, on se rend compte qu'il est le premier à avoir dit qu'il existait une conscience écologique au Moyen Age, liée aux questions de la déforestation." Une problématique qu'on retrouvera dans le courant de l'année en lisant Le temps des laboureurs : travail, ordre social, et croissance en Europe (XIe-XIVe siècles) de Mathieu Arnoux, chez Albin Michel

L'ORIGINALITÉ PAIE

Du côté de Flammarion, le succès d'Une histoire buissonnière de la France (plus de 10 000 unités) est aussi à mettre au crédit de l'originalité, selon Sophie Berlin. L'éditrice attend maintenant beaucoup de la publication en janvier de L'effroyable tragédie : une nouvelle histoire de la campagne de Russie de Marie-Pierre Rey. L'auteure, bilingue français-russe, a croisé pour la première fois les sources des deux pays belligérants et jette un regard neuf sur la campagne de Russie, dont on célèbre cette année le 200e anniversaire. Flammarion proposera également à l'automne La bataille de Lépante dans sa collection "Au fil de l'histoire".

Pour d'autres éditeurs, cependant, le succès en librairie relève moins de paris éditoriaux que d'une stratégie mûrement réfléchie. La Découverte, notamment, avec une offre très centrée sur l'Afrique, a su se constituer un lectorat fidèle. Kamerun, un pavé de 750 pages sur la guerre secrète de la France au Cameroun dans les années 1950-1960, s'est écoulé à 8 000 exemplaires et représente son meilleur succès en 2011. "L'histoire coloniale est dans les gènes de la maison et il se trouve que c'est un secteur historiographique encore assez peu traité ailleurs", explique le P-DG de la maison, François Gèze. En 2012, l'éditeur publie trois gros ouvrages collectifs consacrés à l'Algérie pendant la période coloniale, à une histoire des mouvements sociaux aux XIXe et XXe siècles, et à la IIIe République (La république démystifiée : une contre-histoire de la IIIe République).

Le jeune Vendémiaire privilégie de son côté les sujets inédits et les zones d'ombre historiques. L'entreprise, fondée en 2010 par Véronique Sales et Carl Aderhold, n'a commencé à publier qu'en février 2011 mais compte déjà une vingtaine de titres à son catalogue et bénéficie de la diffusion des Puf. La tondue, une enquête inspirée par une célèbre photographie de Robert Capa prise à Chartres en 1944, constitue la meilleure vente parmi les titres historiques (2 500 exemplaires depuis septembre). En avril, Vendémiaire inaugurera la collection "Révolutions", dirigée par Jean-Clément Martin, pour laquelle 4 à 5 titres sont prévus chaque année, en commençant par une enquête sur la démolition de la Bastille. "Mais le gros enjeu du début d'année pour nous est la parution en mars d'un ouvrage sur les cent trente ans de l'occupation française en Algérie pour lequel nous prévoyons un tirage de 4 500 exemplaires", souligne Véronique Sales.

Belin a créé une nouvelle collection l'automne dernier avec 4 portraits historiques qui seront suivis de 3 autres au printemps : Vélasquez, Innocent III et les architectes de Napoléon. Armand Colin valorise son fonds avec les "Classiques Colin", une nouvelle collection de semi-poches vendus à moins de 20 euros et tirés en moyenne à 2 000 exemplaires. Pour Caroline Leclerc, il s'agit de "compenser le déclin du fonds universitaire amorcé au début des années 2000". Enfin, Perrin fête cette année les 10 ans de sa collection de poche "Tempus", tandis que Seuil organise à la fin du printemps une opération destinée à renforcer la visibilité des poches, "Points histoire". Le passage en poche de Nos ancêtres les Gaulois, d'Une histoire de la violence ou encore d'Une histoire symbolique du Moyen Age sera accompagné d'une opération promotionnelle autour du livre cadeau, Rois et reines de France de Bernard Phan.

VULGARISATION : LA LOCOMOTIVE

Mais les bons résultats et les initiatives observées ici ou là ne sauraient faire oublier que ce sont bien les ouvrages de vulgarisation qui jouent les locomotives pour le secteur. Afin de conserver leurs parts de marché, plusieurs éditeurs concentrent leurs efforts sur la vulgarisation grand public, portée par les ouvrages de vedettes du petit écran ou de journalistes. "Je suis frappée de voir que très peu de livres rédigés par des historiens figurent parmi les meilleures ventes de l'année », dit Sophie Berlin, directrice éditoriale chez Flammarion. Le long-seller L'histoire de France pour les nuls (First), le tome 2 de Secrets d'histoire de Stéphane Bern (Albin Michel), paru en octobre, ou encore Au coeur de l'histoire de Franck Ferrand (Flammarion), également publié en octobre et déjà écoulé à 15 000 exemplaires, illustrent cette tendance portée à son meilleur en 2009 par Le métronome de Lorànt Deutsch (Michel Lafon). Les ouvrages de vulgarisation sont encore capables d'attirer une cible large dans la mesure où ils mêlent le ludique et le pédagogique.

Les éditeurs privilégient également le découpage de l'Histoire en séquences courtes. Larousse avait notamment inauguré l'an dernier sa collection des "Mini-Larousse" au prix unique de 3,50 euros (21 titres parus actuellement), qui a très vite trouvé son public, selon Christine Dauphant, directrice éditoriale. "Les gens ont besoin d'outils pour trier, se rappeler et se souvenir. La lecture est aujourd'hui de plus en plus fragmentée, et un ouvrage court à petit prix permet de répondre à cette tendance", assure-t-elle. Larousse récolte également pour la troisième année consécutive les fruits d'une stratégie axée autour des livres animés dans sa collection "Documents d'histoire". Ces ouvrages, truffés de fac-similés d'archives historiques, donnent au lecteur la "sensation de tenir entre ses mains une part d'intimité des grands personnages de l'histoire. L'émotion donne de la chair au livre", poursuit Christine Dauphant.

Des maisons d'édition plus généralistes exploitent également le filon grand public dans le cadre d'ouvrages énumératifs. Gallimard avec la collection "Les journées qui ont fait la France", Tallandier avec "L'histoire en batailles" ou encore Ellipses avec sa série "Les 100". "Le grand public veut des livres synthétiques et faciles à lire, constate Anne Lacambre, éditrice chez Ellipses. On retrouve aussi la tendance sur le secteur universitaire." Même son de cloche chez Belin, qui va proposer 100 notions d'histoire moderne, concentré sur 150 pages afin de répondre aux attentes des étudiants de premier cycle. Un éditeur universitaire, qui ne souhaite pas être nommé, indique quant à lui plancher sur le développement d'un schéma économique permettant de passer par le numérique pour vendre des contenus en ligne, y compris de manière découpée.

L'histoire en chiffres

L'IMPRESSION NUMÉRIQUE FAIT SON CHEMIN

Les éditeurs sont unanimes : les ouvrages d'histoire pâtissent d'une diffusion qui va en s'amenuisant avec le temps. Confrontés à un marché structurellement baissier et à la concurrence d'Internet, particulièrement pour la vente de livres du fonds, les libraires commandent moins, réduisent leurs stocks et n'hésitent pas à renvoyer les invendus très rapidement. Les éditeurs s'efforcent donc d'adapter les tirages au plus près de la demande, quitte à produire un nombre réduit d'unités. Une formule rendue possible par la généralisation de l'imprimerie numérique à faible coût.

"La technologie est connue depuis une dizaine d'années, mais les prix ont sensiblement baissé depuis l'an dernier et sont maintenant très abordables pour de tout petits tirages. Cela nous permettra même à terme de passer à l'impression à la demande [en anglais POD pour print on demand, NDLR]", explique François Gèze, P-DG de La Découverte. "Il est devenu rentable d'imprimer un titre à 300 exemplaires, se félicite de son côté André Versaille, des éditions du même nom.

Larousse et Armand Colin commercialisent déjà une partie de leur catalogue en POD, tandis que d'autres éditeurs envisagent de franchir le pas, tels Flammarion et Pygmalion au printemps prochain. Cette nouvelle mutation a l'avantage de faire vivre le fonds des éditeurs, là où les librairies privilégient de plus en plus des nouveautés qu'elles déstockent en quelques mois. L'aubaine est également notable pour les maisons réputées pour leurs faibles tirages comme L'Harmattan ou Non lieu, petite structure dédiée aux mondes arabe et balkanique. Chez L'Harmattan, par exemple, un livre historique n'est édité en moyenne qu'à 250 unités. "Si un texte est bon, il doit exister, souligne son directeur, Xavier Pryen. Mais à cette échelle de production, cela implique de limiter les charges. »

L'HISTOIRE DE FRANCE, UNE VALEUR SÛRE

Déclinée dans tous les genres, l'histoire de France séduit invariablement. First a écoulé 800 000 exemplaires de son Histoire de France pour les nuls depuis sa parution en 2004. L'éditeur poursuit cette année dans la même veine avec une bande dessinée en 12 tomes consacrée à l'histoire de l'Hexagone. Le premier titre est sorti fin 2011 et sera suivi par deux autres cette année. Belin, de son côté, achèvera en mars la publication de son Histoire de France en 13 volumes, sous la direction de Joël Cornette. "Il n'y avait pas eu de synthèse sur le sujet depuis trente ans. Les ouvrages ont été réalisés par une équipe de jeunes historiens et s'adressent à un public cultivé élargi", explique Sylvie Marcé, P-DG de Belin.

Tirés à 5 000 exemplaires chacun, la plupart des titres ont déjà fait l'objet de réimpressions depuis la sortie des premiers d'entre eux en 2009. De quoi donner des idées puisque le Seuil inaugurera l'automne prochain sa propre série consacrée à notre histoire nationale en une vingtaine de tomes. "La série prendra en compte les avancées récentes de l'historiographie, tant française qu'étrangère. C'est un chantier important, le but est d'en faire de futurs classiques de référence", indique l'éditrice Laurence Devillairs. Les ambitions de Larousse sont plus modestes, sauf sur le plan comptable, avec La petite bibliothèque de l'histoire de France, un coffret commercialisé en octobre 2011 à poser sur son bureau et comprenant 8 courts volumes, chacun consacré à une période de l'histoire de notre pays.

Pygmalion, enfin, achèvera en 2012 la publication, démarrée en 1979, de sa collection de monographies sur les rois de France de Clovis à Louis-Philippe avec les parutions de Louis II, Louis III, Philippe VI, Charles VIII et François II. "Nous sommes la seule maison à disposer d'une pareille collection ; nous cherchons des appuis en librairie car il s'agit d'une opération courageuse. Par exemple, qui sait aujourd'hui que la France eut un roi nommé Raoul au Xe siècle ? » interroge Charles Dupêchez, éditeur chez Pygmalion. Si les ouvrages consacrés à Louis XIV ou Louis XVI se sont écoulés à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires depuis leur parution, la monographie de Raoul (parue en début d'année) se vend quant à elle à moins de 1 000 unités.

LE PARI DE LA TRADUCTION

Christophe Guias, directeur éditorial chez Payot.- Photo OLIVIER DION

Plus difficilement rentable et peu subventionnée, la traduction historique est souvent une gageure pour les éditeurs. "Le marché est tendu, se lancer dans une traduction représente un vrai pari", juge Caroline Leclerc, directrice éditoriale chez Armand Colin, dont la traduction des Carnets d'un jeune Viêt-Minh, parue en février 2011, a tout de même dépassé les 3 000 ventes. Chez Payot, plus coutumier du fait, L'arme secrète du FLN, de Matthew Connelly (mars 2011), et Empires, de Jane Burbank et Frederick Cooper (octobre 2011), sont tous deux traduits de l'américain. "L'essentiel de nos ouvrages traduits le sont de l'anglais, et un peu de l'allemand. On aimerait ouvrir le champ, mais on se heurte vite au problème de la connaissance des langues », observe Christophe Guias, directeur éditorial chez Payot. Pour Dominique Missika, directrice littéraire chez Tallandier, "les dispositifs d'aide mis en place ne sont pas toujours suffisants, mais ce n'est pas forcément un frein au développement de l'histoire globale en France. Les historiens français travaillent de plus en plus avec des archives étrangères et en collaboration avec des historiens étrangers. Ils publient parfois même directement en langue anglaise ».

Les meilleures ventes histoire en 2011 : neuf fois Max Gallo

Si l'on excepte la carrière extraordinaire de Femmes de dictateur de Diane Ducret (Perrin), écoulé à plus 80 000 exemplaires depuis sa parution en janvier 2011, selon l'éditeur, le classement annuel Ipsos/Livres Hebdo des meilleures ventes de livres d'histoire est une fois encore remarquable par sa stabilité. En habitué des lieux, Max Gallo se taille la part du lion et réussit la performance de placer neuf ouvrages, toutes éditions confondues, dans le top 50, suivi par Jean-Joseph Julaud, avec quatre titres chez First. La vulgarisation historique offre ses meilleurs succès au secteur avec Secrets d'histoire de Stéphane Bern (Albin Michel, 8e et 9e), Nos ancêtres les Gaulois de François Reynaert (Fayard, 12e), La terrible vérité de l'inoxydable Pierre Bellemare (Livre de poche, 23e), Au coeur de l'histoire de Franck Ferrand (Flammarion, 34e), ou encore Grands zhéros de l'histoire de France de Clémentine Portier-Kaltenbach (Le Livre de poche, 42e).

La Seconde Guerre mondiale reste l'autre valeur sûre pour les éditeurs avec les Mémoires de guerre du général de Gaulle (Pocket, 1er) et les Mémoires de guerre de Winston Churchill (Tallandier, 18e et 30e). L'ancien résistant Daniel Cordier se maintient quant à lui à la 19e place avec ses mémoires Alias Caracalla, publiées en 2009 (Folio). Plus surprenant, le très bon résultat obtenu par l'historienne Simone Bertière pour Condé, le héros fourvoyé (de Fallois, 33e), volumineuse biographie parue en octobre 2011 de ce grand personnage du XVIIe siècle relativement méconnu aujourd'hui. A noter également que, 29 ans après la publication de son ouvrage Les croisades vues par les Arabes (J'ai Lu), Amin Maalouf occupe toujours la 26e place du classement.

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