BEAUX LIVRES

Dossier Beaux livres : douce France, cher pays de mon enfance

Olivier Dion

Dossier Beaux livres : douce France, cher pays de mon enfance

Avec la perspective d’une quatrième année de baisse de la production,les éditeurs de beaux livres privilégient les valeurs sûresfondées sur la tendance à la nostalgie pour la France d’autrefois.

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Par Emmanuelle Bour,
avec Créé le 09.10.2015 à 02h05 ,
Mis à jour le 19.10.2015 à 10h30

Prudence. La production de beaux livres de ce second semestre 2015 se contracte de nouveau par rapport à la fin d’année 2014 : d’après nos estimations réalisées avec la base Electre, le nombre de nouveaux titres parus ou à paraître entre le 1er août et le 31 décembre s’élève à 1 700 ouvrages cette année, contre 1 808 parutions l’an dernier, ce qui représente une diminution de 6 %. Cette prudence s’explique par le bilan dégradé du secteur en 2014, avec une baisse des ventes de 2,5 % sur l’ensemble de l’année, d’après nos données Livres Hebdo/I+C. Pour la quatrième année consécutive, le rayon beaux livres est en berne et les éditeurs privilégient les valeurs sûres. "La tendance va vers la réduction du nombre de titres et vers les publications à succès", résume Jean-Jacques Baudouin-Gautier, directeur du pôle illustré de Flammarion.

Malgré sa santé vacillante, le secteur continue d’attirer de nouveaux éditeurs qui se lancent dans l’édition de beaux livres de fin d’année. Déjà producteurs de beaux livres de façon sporadique avec un à trois titres par an, Perrin entend cette année étoffer son offre avec, notamment, Nicolas II et Alexandra de Russie : une tragédie impériale de Jean Des Cars ou Napoléon : l’album de Thierry Lentz. Benoît Yvert, directeur de Perrin, s’explique : "Nous ne sommes certes pas tout seuls sur le marché mais, en ce qui concerne l’histoire, nous pouvons proposer une offre forte et légitime, pour renouveler le genre et offrir du neuf au lectorat." Suite au rachat en mars des éditions d’art Dominique Carré, La Découverte renforce son programme beaux livres avec six titres en fin d’année sous le label Dominique Carré éditeur dont Global style battles de Daniele Tamagni sur la mode urbaine, ou Partita : journal d’une photo-reporter de Myriam Viallefont-Haas. Sophie Giraud, fondatrice et directrice éditoriale des éditions de jeunesse Hélium, édite cet automne ses tout premiers beaux livres. "Nos livres pour enfants plaisent aussi aux adultes qui remarquent la beauté du design et de la fabrication. Notre démarche dans notre offre de beaux livres en découle : nous voulons faire un objet précieux, un livre d’artisan, qui fera figure d’exception dans le marché", explique-t-elle. Déjà, l’an dernier, les éditions du Sous-sol s’étaient lancées, avec le succès d’Au bonheur des lettres, publié cette année au Livre de poche. Elles réitèrent avec Au bonheur des listes du même Shaun Usher.

Sortir du lot

Présenter un bel objet livre reste encore une des manières les plus certaines de se démarquer, comme l’affirme Antoine Ladune, responsable du rayon beaux-arts de la librairie Bouillon de culture à Caen : "On assiste à une uniformisation du beau livre, ce qui permet aux éditeurs qui prennent des risques au niveau du thème, de la fabrication et du prix de sortir du lot." "Il y a un mouvement vers le très beau livre là où le beau livre normal tend à s’essouffler", renchérit Gilberte Trierweiler, de la librairie Goulard à Aix-en-Provence. Plusieurs libraires interrogés s’enthousiasment pour Klänge/Résonances, réédition de l’album de Kandinsky chez Hazan, Mémoire noire de Jacques Lamalle aux Arènes, Poésies, Une saison en enfer, Illuminations de Rimbaud chez Diane de Selliers, Fontainebleau, la vraie demeure des rois de Vincent Droguet chez Swan, Champs de bataille de Yan Morvan chez Photosynthèses ou encore l’ouvrage de la BNF en coédition avec le Seuil, un fac-similé de l’exemplaire de Dora Maar de L’histoire naturelle de Buffon illustré par Picasso. Des ouvrages hors normes, à des prix élevés. "Tout le monde fait du beau livre, et présenter une offre différente passe par le sujet traité, le prix agressif ou sélectif, ou l’originalité de la fabrication. Contrairement à la littérature, le beau livre est autant un livre qu’un produit", analyse Jean-Jacques Baudouin-Gautier.

Cap sur la nostalgie

La production de cette année suit très nettement une tendance nostalgique, avec un graphisme rétro et des sujets résolument tournés vers le passé. "La nostalgie, c’est à la fois une valeur sûre et ce que demande le public. C’est sans doute lié à cette période de crise : le lectorat ne sait pas ce que donne l’avenir, alors il se tourne vers un passé rassurant. Pour les éditeurs, c’est pratique, parce qu’il y a toujours des archives à dénicher ou un anniversaire à célébrer", commente Nathalie Bailleux, directrice éditoriale des livres illustrés chez Gallimard. "Ce retour vers les souvenirs populaires correspond au mode de vie d’un public adulescent à qui l’on a toujours présenté un avenir angoissant", renchérit Isabelle Lerein, directrice éditoriale de Hors Collection. Forte des 600 000 exemplaires vendus des titres de la série Le livre de ma jeunesse, la maison poursuit dans sa veine nostalgique avec la parution de Nos années camping, signé par Laurent Chollet et Armelle Leroy. Ouest-France publie La France, géographie et histoire curieuses et insolites de Pierre Deslais et Rodolphe Ferron. Le monde de l’école d’autrefois a le vent en poupe, notamment avec la maison Deyrolle, qui fait l’objet à La Martinière de Deyrolle, à la croisée des savoirs de Sylvie Albou-Tabart et Louis-Albertde Broglie. Armand Colin reste dans le rang avecLa classe de sciences de Georges Colomb, La classe de français de Larive et Fleury et Propre et sain ! Un siècle d’hygiène à l’école en images de Stéphane Frioux et Didier Nourrisson. A la suite du succès des trois premiers tomes vendus à 130 000 exemplaires depuis 2012, Hugo Desinge publie le quatrième volume des Pubs que vous ne verrez plus jamais : spécial Ah les filles !, toujours signé par Annie Pastor. Armand Colin propose Une histoire mondiale du livre de Roderick Cave et Sara Ayad, tandis que Robert Bared chez Citadelles & Mazenod dévoile les représentations du Livre dans la peinture.

Les métiers d’autrefois sont aussi mis à l’honneur, que ce soit pour La France des métiers oubliés chez Ouest-France, ou bien au Chêne avec Transmissions, où Gianni et Tiziana Baldizzone reviennent sur les savoir-faire traditionnels. Le thème est abordé par Actes Sud dans Le bois : savoir & faire, sous la direction de Hugues Jacquet. Larousse s’intéresse au Made in France : la France qui résiste de Jean-Sébastien Petitdemange. Le beau livre de Sarah Finger, La France d’antan à travers la carte postale ancienne, symbolise le renouveau d’HC éditions. "Il n’y avait plus de renouvellement éditorial sur le thème de la nostalgie, explique l’éditrice Isabelle Chopin. Il faut nous adapter au marché par le prix et par la forme." L’éditeur spécialisé depuis dix ans dans la carte postale ancienne se repositionne avec de nouvelles maquettes, signées Inès Bourgois, et une refonte de sa collection "France d’Antan" en 40 titres plus modernes et moins chers, labellisés "100% vintage". La capitale n’échappe pas à la vogue des cartes postales d’archives, notamment avec Paris avant-après de Gérard Denizeau chez Larousse et avec Paris 1900 de Pascal Varejka chez Prisma. Toujours sous forme de cartes postales, mais détachables, Flammarion propose un petit livre sur les Pin-ups.

Se tourner vers son histoire permet de mieux comprendre les enjeux sociétaux, comme le montre chez Textuel la publication, cinq ans après La fabrique des filles, de La fabrique des garçons : l’éducation des garçons de 1820 à aujourd’hui d’Anne-Marie Sohn. En histoire contemporaine, Gründ publie L’empire colonial français de Dimitri Casali et Nicolas Cadet, et L’Alge?rie de ma me?moire, 1930-1962 de Laurent Chollet.

Recettes éprouvées

Même les grandes plumes cathodiques, recettes éprouvées des éditeurs pour sortir du lot, sont des personnalités attachées à défendre le patrimoine français. Habitué de la rentrée beaux livres, Stéphane Bern propose deux titres chez Albin Michel, Le village préféré des Français et Secrets d’histoire illustrés. Autre émission de télévision mise à l’honneur aux éditions du Sous-sol, Le grand échiquier, avec un ouvrage élaboré à partir des archives de Jacques Chancel, décédé en 2014. Georges Pernoud fête les 40 ans de son émission culte "Thalassa" en signant Des mots à la mer au Cherche Midi, et en préfaçant l’ouvrage de Gérard Schaller, Thalassa, 40 ans : la mer et les hommes chez Hugo Image. Après un succès qui atteint 400 000 exemplaires vendus pour les deux premiers tomes, Frédéric et Marie-Isabelle Taddeï signent le troisième volume de D’art d’art ! au Chêne. Autre star de l’audiovisuel, Pierre Bellemare raconte 10 histoires de crimes chez First dans Les nouvelles histoires extraordinaires de l’histoire. Le photographe Raymond Depardon participe à trois ouvrages : il signe avec le journaliste et écrivain Eric Fottorino chez Denoël J’ai vu les derniers paysans, s’associe avec le dessinateur Loustal pour mettre en images Carthagène chez Dupuis, et certains de ses clichés sont retenus dans Mitterrand dans l’objectif de Richard Melloul chez Fayard.

Parmi les livres événements de cette fin d’année, ceux autour de Charlotte Salomon. Fort des 430 000 ventes de Charlotte, de David Foenkinos, lauréat du prix Goncourt des Lycéens et du Renaudot pour ce titre en 2014, Gallimard tire à 23 000 exemplaires une version du texte illustrée par les œuvres de Charlotte Salomon. Surtout, Vie ? Ou théâtre ?, son œuvre autobiographique, fait l’objet d’un monumental ouvrage au Tripode (1).

Dans cette période d’incertitude du marché du beau livre, les éditeurs calent leurs publications sur les anniversaires qui bénéficieront d’un écho médiatique. Le chanteur Antoine publie chez Gallimard 50 ans d’élucubrations à l’occasion des 50 ans de sa chanson, avec un DVD d’archives de l’Ina, tiré à 20 000 exemplaires. Le centenaire de la naissance d’Edith Piaf donne lieu chez Gründ à Piaf, une biographie signée Robert Belleret, dans la collection "Histoire sur le vif". En prévision de l’anniversaire des 20 ans de la mort de François Mitterrand en 2016, le Chêne publie Sa vie est un roman, biographie illustrée de l’ancien président par Jean-Pierre Bouyxou, préfacée par Frédéric Mitterrand, et Ouest-France propose François Mitterrand, un siècle de passions de Charles-Louis Foulon. Un destin à comparer avec Jacques Chirac, vie publique, archives privées de Catherine Clément, préfacé par Alain Juppé chez Hugo Image. A la tête de la France lui aussi, mais à une tout autre époque, Louis XIV est célébré à l’occasion du tricentenaire de sa mort. Autour du Roi-Soleil, Gallimard coédite avec le Château de Versailles Louis XIV intime d’Hélène Delalex, et Larousse prépare Louis XIV, roi de la démesure par Henry-Jean Servat et Mathieu Banq. Le Chêne mise sur le talent et la notoriété de Max Gallo pour Louis XIV, une biographie illustrée, et Atlas prévoit Le grand atlas de Louis XIV : le règne éblouissant du Roi-Soleil.

Chercheurs de tendances

A rebours de cette tendance à regarder en arrière et à célébrer le passé, quelques ouvrages sont pensés pour séduire un public plus jeune en scrutant les tendances actuelles. Les arts alternatifs occupent une belle part du cru 2015, avec une dizaine ouvrages sur le street art. Tana et Gründ font paraître respectivement Street art, poésie urbaine de Sophie Pujas et Street art : 340 œuvres sur les murs du monde de Lee Bofkin, tandis que Hugo Desinge lance Street art de Garry Hunter ou Urban art legends, le volume 2 de Plane?te Banksy 2 de Ket. Claude Abron, chez Place des Victoires, dresse un panorama de cet art avec Graffiti : 30 années de street art à Paris. Alternatives, habitué du genre, édite Banksy avec Vous représentez un niveau de menace acceptable, vous le sauriez si ce n’était pas le cas (70 000 exemplaires vendus dans la version anglaise) et la 11e édition de Guerre et spray, mais aussi Les murs révoltés d’Yvan Tessier et Stéphanie Lemoine, et The wrinkles of the city par JR. Phaidon aussi publie une monographie de l’artiste urbain, JR : l’art peut-il changer le monde ? et Pyramyd s’adresse aux plus jeunes en éditant Dans l’objectif de JR : le projet 28 millimètres pour les 11-15 ans. Albin Michel, qui avait fait une incursion réussie dans l’art urbain l’an passé avec Tour Paris 13, persiste et signe avec Christian Guémy, alias C215. L’éditeur proposera deux livres, une monographie accompagnée d’un pochoir, médium de prédilection de l’artiste, ainsi que C215 au CEA, sur une œuvre pour le mur du Commissariat à l’énergie atomique.

Indispensable à la tenue du jeune urbain branché, le vélo est analysé dans Vélos urbains de Laurent Belando chez Tana, tout comme le sont les tatouages dans Tattoo street style de Nicolas Brulez et Mylène Ebrard chez Tana et la barbe dans Barbes et moustaches de Jean Feixas et Emmanuel Pierrat, collaborateur de Livres Hebdo, chez Hoëbeke. Le beau livre du look se complète avec Arthaud et son ouvrage sur les baskets, Sneakers : le guide complet des éditions limitées de U-Dox et avec Culture sneakers de Max Limol chez Hugo Image. Dans les cultures alternatives, Taschen présente un travail photographique sur le festival Burning Man dans le Nevada (Art of burning man) ainsi qu’un étonnant livre sur le yoga, On yoga : the architecture of peace de Michael O’Neill. Prisma s’intéresse à la Surf culture avec Alain Gardinier et ose l’humour avec Les pépites du site Leboncoin.fr. Les jeunes geeks auront aussi de quoi se régaler avec plusieurs ouvrages sur les jeux vidéo. Hors Collection poursuit sur sa lancée avec Push start, l’évolution graphique des jeux vidéo et avec Skyrim : Elder Scrolls V, histoires et personnages, tandis que Larousse s’intéresse à Assassin’s creed, le jeu aux 91 millions d’exemplaires vendus dans le monde. Ouest-France tente d’allier les deux tendances - public jeune et nostalgie - avec Retrogaming, consoles et jeux vide?os de notre enfance par Antoine Pascal.

Actualité, sport et cinéma

L’actualité du monde résonne aussi dans la programmation beaux livres de fin d’année. Celle, dramatique, de janvier dernier, avec la disparition des dessinateurs de Charlie Hebdo dans l’attentat qui a touché leur rédaction, donne lieu chez Michel Lafon à un hommage à Cabu, avec L’intégrale du nouveau beauf, et, au Chêne, à Tignous, avec un ouvrage regroupant des dessins choisis par sa veuve, Chloé Verlhac, et des textes de Daniel Pennac, François Morel ou Patrick Pelloux. La Martinière prévoit de son côté deux publications, Siné graphiste de François Forcadell et Dans le ventre de Hara-Kiri avec des textes de Pacôme Thiellement, Delfeil de Ton, Denis Robert, entre autres.

L’actualité sportive a sa place, portée par la Coupe du monde de rugby, en Grande-Bretagne du 18 septembre au 31 octobre, qui est l’occasion de revenir sur ce jeu, notamment avec Attitude rugby chez Solar, qui montre aussi un ton plus féroce dans Boucherie ovalie. Flammarion sort une Anthologie mondiale signée Jacques Verdiez, Gründ les 100 histoires de légende du rugby de Gérard et Julien Holtz ainsi que L’histoire du rugby de Richard Bath. La Martinière s’intéresse à l’histoire des jerseys dans 1 000 maillots de rugby de Pierre Ammiche. Hugo Sport publie L’histoire passionnée du rugby français et international d’Olivier Villepreux, Romain Allaire et Jean-Pierre Gonguet, et Larousse prévoit pour la fin du championnat Coupe du monde de rugby 2015 : les plus grands moments de Cédric Beaudou. Les rugbymen des Dieux du stade : calendrier 2016 par Fred Goudon sont rassemblés nus chez TeNeues.

Les programmes de cinéma auront aussi un impact sur la production illustrée, notamment la sortie, le 16 décembre, du Réveil de la Force, l’épisode VII de Star wars, qui irriguera tous les rayons, dont le beau livre, avec les titres des éditions Huginn & Muninn, ou la sortie, le 11 décembre, de Spectre, le dernier James Bond, qui draine plusieurs publications, avec une encyclopédie prévue chez Gründ signée John Cork, et une autre signée Guillaume Evin chez Hugo Image. Le Chêne s’intéresse aux voitures de l’espion dans James Bond cars de Frédéric Brun, et Le Cherche Midi à ses montres dans James Bond, l’espion qui aimait les montres de Frédéric Liévain. Quant aux éditions Taschen, elles actualisent leur monumental ouvrage intitulé The James Bond archives, 007, de Paul Duncan.

La Cop 21, prévue à Paris du 30 novembre au 11 décembre, s’immisce dans le rayon beau livre : son ambassadeur Elyx, silhouette imaginée par Yak, fait l’objet d’un ouvrage au Chêne, qui publie aussi Empreinte : des initiatives écologiques réussies du collectif Argos, tandis qu’Actes Sud publie Demain, le beau livre de l’aventure de Mélanie Laurent et Cyril Dion. De quoi se tourner un peu vers l’avenir.

(1) Voir LH 1054 p. 30.

Les beaux livres en chiffres

25 expositions à ne pas manquer

L’actualité muséale de l’automne sera marquée par la réouverture, le 17 octobre, du musée de l’Homme, fermé depuis 2003, et par celle du musée Rodin, le 12 novembre, après trois ans de travaux. 165 catalogues (voir bibliographie p. 66) accompagnent les expositions dans la France entière, dont voici une sélection de 25 parmi les principales.

Martin Scorsese à la Cinémathèque.- Photo MARTIN SCORSESE COLLECTION

Une brève histoire de l’avenir, Louvre, jusqu’au 4 janvier.

Elisabeth Louise Vigée Le Brun, Grand Palais, jusqu’au 11 janvier.

Splendeurs et misères. Images de la prostitution (1850-1910), musée d’Orsay, jusqu’au 17 janvier.

Tristan Tzara, " L’Homme approximatif ", musée d’Art moderne et contemporain de Strasbourg, jusqu’au 17 janvier.

Robert Doisneau, un photographe au Muséum, Muséum national d’histoire naturelle, jusqu’au 18 janvier.

Fragonard amoureux. Galant et libertin, musée du Luxembourg, jusqu’au 24 janvier.

Florence, portraits à la cour des Médicis, musée Jacquemart-André, jusqu’au 25 janvier.

Osiris, mystères engloutis d’Egypte, Institut du monde arabe, jusqu’au 31 janvier.

Warhol. Unlimited, musée d’Art moderne de la Ville de Paris, jusqu’au 7 février.

Villa Flora, les temps enchantés, musée Marmottan-Monet, jusqu’au 7 février.

Wifredo Lam (1902 - 1982), Centre Pompidou, jusqu'au 15 février.

Picasso.mania, Grand Palais, jusqu’au 29 février.

Darwin, l’original, Cité des sciences et de l’industrie de La Villette, 15 décembre- mi-août 2016.

Marc Chagall, le triomphe de la musique, Philharmonie de Paris, du 13 octobre au 31 janvier.

L’art et la machine, musée des Confluences de Lyon, 13 octobre-24 janvier.

Martin Scorsese, Cinémathèque française, du 14 octobre au 14 février.

Philippe Halsman. Etonnez-moi !, Jeu de paume, 20 octobre-24 janvier.

Marc Chagall : les sources de la musique, Piscine de Roubaix, 24 octobre- 31 janvier.

Sepik. Arts de Papouasie-Nouvelle-Guinée, musée du Quai Branly, 27 octobre-31 janvier.

Esthétiques de l’Amour. Sibérie extrême-orientale, musée du Quai Branly, 3 novembre-17 janvier.

Images du Grand Siècle. L’estampe française au temps de Louis XIV (1660-1715), BNF, 3 novembre-31 janvier.

J’aime les panoramas, Mucem, 4 novembre-29 février.

Georgia O’Keeffe et ses amis photographes, musée de Grenoble, du 7 novembre au 7 février.

Lucien Clergue, les premiers albums, Grand Palais, 14 novembre-15 février.

Anselm Kiefer, Centre Pompidou, 16 décembre-18 avril. Egalement à la BNF du 20 octobre au 7 février.

"Nous faisons de l’anti-coffee table book"

"Nous sommesune maison d’édition engagée et je n’ai pas bougé d’un millimètrelà-dessus." Marianne Théry, Textuel- Photo OLIVIER DION

Fondatrice et directrice de Textuel depuis 1994,Marianne Théry revient sur les 20 ans d’existencede sa maison.

M. T. - On ne peut que s’enchanter d’être encore vivant ! Mais, avec le recul, je me rends compte que 20 ans, pour un éditeur, c’est très jeune : je mesure à quel point il est long de constituer un catalogue. J’espère surtout que nous avons gardé le côté rock’n’roll du projet initial. Nous sommes une maison d’édition engagée et je n’ai pas bougé d’un millimètre là-dessus. Il faut dire que le contexte global d’aujourd’hui nous encourage dans cette voie. Comme son nom l’indique, Textuel s’intéresse au texte, et nous cherchons toujours des penseurs critiques pour décrypter notre époque encore plus injuste.

Nous faisons de l’anti-beau livre ou, plus précisément, de l’anti-"coffee table book". Nous ne voulions pas faire de l’histoire de l’art car d’autres maisons le faisaient déjà très bien. Nous avons pris le parti d’être l’éditeur des beaux livres des autres rayons : celui de la musique, de la littérature, de la danse et des arts de la scène, de la photographie… L’idée est de mettre en avant des artistes contemporains, ce qui nous permet de créer des partenariats avec des maisons à l’étranger, comme Thames & Hudson en Grande-Bretagne ou Aperture aux Etats-Unis. Je pense aussi que, contrairement à d’autres maisons françaises, nos beaux livres ne forment pas une collection. Pour chaque titre, nous repensons tout à partir de zéro : le format, le papier, le design… Si bien que chaque ouvrage est une double création, éditoriale et graphique.

Ce qui a le plus changé, c’est la perception des prix. A nos débuts, un beau livre qui vaut 47 euros aujourd’hui était qualifié de populaire. Le prix psychologique du beau livre a chuté et beaucoup d’éditeurs produisent des ouvrages à 30 euros. Ils créent une fausse économie avec ce prix absurde.

Je remarque également une surproduction étouffante, sans doute due à l’explosion de certains rayons comme le pratique, la cuisine ou les arts de vivre. Je suis très vigilante à ne pas céder à la tentation de la surproduction. Nous publions environ 25 livres par an, notre volonté est de publier peu mais bien. L’idée est aussi de prendre des risques.

Textuel organise du 1er au 4 décembre une session de rencontres et d’expositions à la librairie Mollat de Bordeaux, en présence de Laurent Balandras (à propos de Gainsbourg), Jean-Louis Cohen (Le Corbusier), Rudy Ricciotti et Harry Gruyaert.

Le grand Tetris de fin d’année

Libraires et éditeurs travaillent de concert pour trouverune place à tous les beaux livres dont la parutionse concentre en fin d’année dans les points de vente.

Le libraire du rayon beaux livres, qui reçoit les représentants des maisons d’édition pendant l’été, se voit confronté à l’automne à un arrivage massif de la production. "Tant qu’on n’a pas le livre entre les mains, il reste difficile de préparer la présentation en amont. Je procède toujours à un ajustement des commandes et de la présentation en novembre", explique Thomas Le Seac’h, de la librairie des Halles à Niort. Une préparation d’autant plus complexe quand la programmation est éparse et que les éditeurs "font preuve de prudence, avec peu de titres originaux cette année, comme le juge Jean-Marie Aubert, de la librairie Masséna à Nice. C’est alors à nous de mettre en avant ce qui en vaut la peine. Dans mon cas, j’essaie de pousser le client vers les productions très finies en termes de fabrication." Le conseil du libraire est primordial pour ce rayon, dont les livres sont moins médiatisés qu’en littérature générale. Un travail qu’il prépare en amont. En attendant l’arrivée des livres, Jean-Marie Aubert montre par exemple aux clients les "blades" (échantillons présentant les bonnes feuilles d’un ouvrage) des titres qui lui ont tapé dans l’œil à la présentation. D’autres professionnels, comme Armelle Kirch, du Hall du livre, à Nancy, s’efforcent de mettre en valeur le plus d’ouvrages possible sur des tables, quitte à bouleverser régulièrement l’aménagement, afin de faciliter la prise en main et pour que les clients soient attirés immédiatement par les couvertures : "C’est un peu comme jouer à Tetris, plaisante la libraire. D’octobre à décembre, le beau livre est en déplacement perpétuel, pour que le plus de titres possible aient droit à une exposition sur tables." Pour certains titres coups de cœur, les libraires organisent une soirée dédiée au beau livre, en présence de l’auteur ou de l’éditeur.

Diane de Selliers est une habituée du procédé et prend régulièrement la route. Elle reconnaît que son choix de ne produire qu’un seul livre par an facilite ce type de tournée promotionnelle. L’éditrice assure aussi "tout faire pour accompagner les libraires et considérer toutes leurs demandes". Car de manière générale, les éditeurs de beaux livres renforcent leur collaboration avec les libraires et mettent de plus en plus de matériels à leur disposition. Chez Textuel, Marianne Théry, qui a choisi de fêter les 20 ans de la maison notamment par une série de rencontres chez Mollat à Bordeaux (voir p. 10), met un point d’honneur à fournir un matériel de vitrine à la demande et sur mesure, tout comme Virginie Migeotte, chargée des relations libraires pour Le Sous-sol, qui, pour le premier beau livre de la maison, Au bonheur des lettres de Shaun Usher, avait organisé des vitrines avec des agrandissements de lettres choisies par les libraires dans le livre.

Médiatisation des catalogues

Parmi les beaux livres présentés en librairie, les catalogues d’exposition font figure d’exception car ils prennent non seulement une place croissante, mais sont de plus en plus demandés, du fait de leur médiatisation, même par un public qui ne fera pas le déplacement au musée. Un lectorat différent de celui du beau livre traditionnel. "Les clients des catalogues d’exposition ne sont généralement pas ceux qui flânent dans le rayon. Ils savent ce qu’ils veulent en arrivant dans la librairie", constate Gilberte Trierweiler, de la librairie Goulard à Aix-en-Provence. "C’est médiatisé, alors c’est demandé", résume Thomas Le Seac’h.

Il s’agit de trouver l’équilibre entre la mise en avant de coups de cœur du libraire, l’exposition d’ouvrages médiatisés et l’organisation de soirées. Mais quand le charme opère, cela peut se révéler particulièrement gagnant. "Un ou deux gros succès peuvent porter entièrement le rayon", précise Antoine Ladune, de la librairie Au brouillon de culture à Caen. D’où la nécessité d’une minutieuse préparation chez les libraires comme chez les éditeurs. "Ce rendez-vous annuel est un travail de longue haleine, qui se prépare tout au long de l’année", conclut Jean-Marie Aubert.

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