4 octobre > Poésie France > Yves Simon

Il est un moment, inévitable dans la carrière d’un artiste, où la durée d’un parcours, l’ampleur d’une œuvre, l’âge aussi, invitent à regarder dans le rétroviseur, à publier compilations, anthologies, rétrospectives ou intégrales. Voici venu le tour d’Yves Simon, en attendant son autobiographie, annoncée chez Flammarion pour le printemps et qui, confie l’auteur, pourrait s’intituler Une vie comme ça, par ailleurs le titre d’une de ses chansons et d’un album sorti en 1981. Rien de surprenant car, chez Simon, tout a commencé par l’écriture. Ses deux premiers livres, Les jours en couleurs et L’homme arc-en-ciel sont parus chez Grasset en 1971, alors que son premier disque abouti et revendiqué, Au pays des merveilles de Juliet, date de 1973. D’où cette réputation de chanteur à texte, littéraire, voire intello, qu’il assume.

Génération(s) éperdue(s) rassemble donc les paroles des 140 chansons enregistrées par Yves Simon, de 1973 à 2007, jusqu’à Rumeurs, illustrées de photos de l’artiste, dans ses métamorphoses vestimentaires, capillaires ou pileuses. Lorsque la maquette le lui a permis, il a glissé en bas de page des didascalies, commentaires, explications, voyages, rencontres, hommages : à Gainsbourg, Yourcenar, Barbara. Il est aussi question des événements qui ont marqué cet intellectuel engagé, un temps attiré par le journalisme, le grand reportage - dans les années 1980, il a collaboré à Libération, époque July : la chute du mur de Berlin, par exemple. Se glissent, à la fin, quelques textes inédits, mélancoliques, qui attendent leur musique. Chansons d’amour, forcément, ou célébration de quelques Sultans of jazz disparus. Et puis, cerise sur le gâteau, deux aquarelles en couleurs, qui rappellent un peu Matisse. On ignorait que Yves Simon avait ce talent-là aussi, et on aimerait en voir plus.

Voici un livre somme, sans prétention, dont on connaît de nombreuses pages par cœur, de J’ai rêvé New York à Nés en France, en passant par L’Abyssinie ("et c’est loin"). La jeune génération, quant à elle, éperdue ou non, va découvrir Yves Simon grâce à un disque, intitulé également Génération(s) éperdue(s) (chez Because Music), où ses chansons sont reprises par tout le gratin actuel : Christine and the Queens, Feu ! Chatterton ou Juliette Armanet. Diabolo menthe pour tout le monde ? J.-C. P.

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