L’envoi par Dilicom le 12 janvier d’un courriel informant de nouvelles conditions contractuelles a donc suscité un certain émoi. Le groupement interprofessionnel dirigé par Véronique Backer a en effet décidé de facturer directement aux éditeurs, les invitant à s’engager contractuellement auprès de lui s’ils souhaitent toujours bénéficier des services de référencement de leurs catalogues dans le FEL et de la transmission des commandes via Dilicom. Ce courriel fait suite à la rupture par Dilicom le 31 décembre 2020 du contrat qui le liait à Cyber Scribe. Rupture que conteste Cyber Scribe : en réaction, Michel Regnier a aussitôt appelé par courriel ses clients à ne pas tenir compte du message de Dilicom, leur indiquant que Cyber Scribe continuait d’assurer l’ensemble des services.
« Personne ne comprend ce qui se passe, s’emporte Bruno Msika. Des décisions nous sont imposées par Dilicom, un organisme avec lequel je n’ai aucun contrat commercial, sur la base d’un conflit qui existe et qui n’est pas réglé. En tant qu’éditeur, nous n’avons pas à en pâtir. » « Alors que nous entretenons d’excellentes relations avec Cyber Scribe depuis des années, on nous explique soudain que tout change et qu’il va falloir payer un service que jusqu’à présent nous n’avions pas à payer directement », s’émeut pour sa part Enguerrand Le Gueut, gérant des éditions Le Charmoiset.
Un gros manque à gagner
S’il éclate aujourd’hui au grand jour, le conflit entre Dilicom et Cyber Scribe est ancien. Les relations se sont progressivement dégradées au cours des dernières années sans que les deux partenaires parviennent à une résolution amiable. Leurs dissensions désormais publiques suscitent l’inquiétude des éditeurs. L’enjeu est de taille : les commandes passées via Cyber Scribe représentent jusqu’à 25 % du chiffre d’affaires de ces petits acteurs.
D’après les éditeurs concernés et interrogés par Livres Hebdo, les conditions commerciales proposées par Dilicom sont plus intéressantes que celles jusqu’alors en vigueur, sans pour autant emporter l’adhésion. « En faisant tampon entre Dilicom et les éditeurs, Cyber Scribe nous assure un tarif compétitif, estime le patron d’une petite maison. Si tout se fait en direct, rien n’empêchera Dilicom de relever demain ses prix et nous ne pourrons pas nous y opposer. »
De fait, peu d’éditeurs (aucun parmi ceux que nous avons contactés) semblent pour le moment avoir donné suite à l’offre de Dilicom. « Cyber Scribe nous l’ayant demandé, je n’ai pas répondu à Dilicom », confirme Bernard Ulsemer, patron d’I.D. L’Edition. « Pour le moment je ne bouge pas, nous sommes engagés avec Cyber Scribe et satisfaits de la relation », indique Cédric de Fougerolle, patron des éditions de Montbel.
Les éditeurs s’interrogent aussi sur le périmètre d’une éventuelle relation directe avec Dilicom. Outre le référencement et les commandes des libraires, Cyber Scribe a notamment un partenariat avec Amazon et propose ses services sur la Market Place du géant du commerce en ligne. « Les propositions très imprécises de Dilicom en tiendront-elles compte ? » se demande Bruno Msika. Et l’éditeur, qui appelle de ses vœux à une conciliation entre Dilicom et Cyber Scribe, de conclure : « J’ai trouvé cavalier cette manière d’agir, en particulier dans le contexte actuel de crise sanitaire. Nous n’avons pas besoin de nouvelles complications. »