Baleine sous gravier. Avant de faire un détour par le true crime avec Magali (Robert Laffont 2024), Caryl Férey avait fait rugir la cause animale dans le polar Okavango, sur le braconnage en Afrique. Cap cette fois-ci sur les îles Féroé, l'archipel battu par les vents entre l'Islande et le Danemark, où un petit esquif de l'ONG Sea Shepherd, chargé d'un équipage d'activistes pour la défense des animaux, affronte un énorme baleinier battant pavillon norvégien. Avant qu'une tempête monstrueuse n'avale tous les bateaux, on assiste à une bataille navale, véritable combat entre David et Goliath. Seuls Gab, le narrateur, et Ayleen, la capitaine du bateau de l'ONG, en réchappent. Il est apnéiste- la pire terreur de l'auteur-, éco-anxieux ; elle est irlandaise, anticapitaliste. Ces rescapés échouent dans l'archipel pile au moment où se déroule un « grindadráp », une battue consistant à ramener vers le rivage des centaines de cétacés pour les exécuter au couteau, selon la culture ancestrale féroïenne. C'est dans l'écume rouge du sang des dauphins que Férey glisse un premier cadavre humain. Un flic venu du Danemark et une journaliste autochtone enquêtent et leurs regards sur le meurtre permettent de démultiplier les points de vue sur cette pratique qui allie cruauté et tradition. On connaît d'avance le méchant : l'argent. Caryl Férey nous fait néanmoins encore rêver, perdus au bout du monde, en nous emportant par son lyrisme et sa sincérité- la signature de ses polars d'aventure.