12 octobre > Récit France > Caryl Férey

Bien longtemps que l’autodidacte et écrivain comblé Caryl Férey, 50 ans cette année, a obtenu ses diplômes de baroudeur. Depuis trente ans, ses voyages ont inspiré des thrillers politiques que l’on s’arrache. Nouvelle-Zélande, Australie, Californie, Afrique du Sud, Argentine, Chili…, jusqu’à présent ses aventures l’avaient plutôt porté vers des contrées de soleil. Aussi, la proposition des "filles" de chez Paulsen d’un tour en Sibérie pour la collection "Démarches" ne l’a pas d’emblée emballé. Il faut dire que Norilsk, 200 000 habitants, une ville minière exilée à 400 kilomètres au nord du cercle polaire, inaccessible sans visa spécial, ancien goulag, et détenant entre autres records enviables le titre de ville "la plus polluée du monde", n’a pas franchement les attributs du bon plan. Mais l’auteur de Zulu et de Mapuche n’a pas le goût des paysages de carte postale. Lui, ce sont les histoires de damnés de la terre qui l’intéressent. Et puis il décide de partir accompagné car "Voyager, c’est comme faire l’amour : seul, c’est nul". Et comme c’est le genre ami à la vie, à la mort, il part pour dix jours flanqué du plus ancien et fidèle d’entre les potes, "La Bête", le vieux complice de l’adolescence bretonne, le pirate photographe, le borgne qui a inspiré le personnage de l’inspecteur Mc Cash. "Rencontrer des gens pour écrire un truc sur leur ville pourrie." Pour mener à bien ce programme, les deux compères ont pour guide Valentina, rebaptisée aussi sec "Bambi", une jeune femme qui a passé les vingt premières années de sa vie dans ce "décor de Blade Runner". Elle les conduira au Zaboy, le bar d’une de ses copines au nom inspiré d’une spécialité russe, "le zapoi", qui consiste "à se saouler plusieurs jours de suite, à la vodka de préférence, matin, midi et soir". Là, ils fraterniseront jusqu’au bout des courtes nuits, dans un froid de gueux, avec la jeunesse de Norilsk : forçats de la mine, graphiste, comédien de théâtre, psychothérapeute pour enfants, violoniste au look métalleux…

Dans Pourvu que ça brûle, autoportrait paru en janvier dernier, Férey, ce grand sentimental furieux, racontait ce qui nourrissait son énergie d’écorché vif cherchant l’intensité, sensible à la beauté du chaos. A Norilsk, il n’a pas été déçu. Véronique Rossignol

06.10 2017

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