Le forum Livres Hebdo sur « Les jeunes adultes et la lecture. Quelles pratiques ? Quelles tendances ? » a attiré plus de 200 personnes jeudi 5 novembre, autour de l'enquête Ipsos/Livres Hebdo sur les pratiques de lecture des 18-30 ans et du débat qui a suivi avec Olivier Donnat, auteur des Pratiques culturelles des Français (La Découverte, 2009), Laurence Dolivet, responsable du pôle musique et livre numérique chez SFR, Claude Poissenot, sociologue, Jérôme Dayre, directeur de la librairie Atout Livre (Paris, 12e), et l'écrivain Anna Gavalda.
Les nombreuses questions et interventions ont reflété les préoccupations des éditeurs, libraires et bibliothécaires face à cette tranche d'âge qui globalement lit moins de livres que ses aînés, s'enthousiasme pour la littérature de genre (SF, fantasy...), consacre beaucoup de temps aux loisirs hors du domicile et qui préfère choisir ses livres elle-même ou sur les conseils de son entourage plutôt que suivre les prescriptions médiatiques traditionnelles. Autant d'éléments qui poussent les professionnels à modifier leurs pratiques devant « la puissance des effets générationnels », selon Olivier Donnat, qui a rappelé que « les habitudes acquises pendant la jeunesse se poursuivent tout au long de la vie. »
"Ce qui est important, ce n'est pas tellement les livres mais la curiosité intellectuelle."
Selon les participants, pour attirer à nouveau les jeunes dans les libraires et bibliothèques qu'ils désertent, il faut repenser l'approche culturelle en termes de demande et non plus seulement d'offre. « Comment faire pour que la bibliothèque soit appropriée par les jeunes d'un point de vue personnel ? Cela pose la question de la sociabilité. Ce qui compte, ce sont les échanges, pas les institutions », a rappelé Claude Poissenot. Les libraires aussi s'interrogent, car le public des 18-30 ans lui préfère largement les grandes surfaces culturelles spécialisées. « La plupart des libraires n'ont pas une offre adaptée à la demande des 18-30 ans », a souligné Jérôme Dayre, qui envisage de créer un rayon « jeunes adultes » comme cela existe aux Etats-Unis. « Je n'ai peut-être pas l'environnement qui les attire. Il faut désacraliser la littérature, arrêter de penser que la librairie est le lieu du savoir, et montrer que l'on est vivant, qu'on écoute de la musique, qu'on peut leur parler... », dit le libraire qui organise régulièrement de petits concerts d'une heure, de la même façon que la Fnac proposer des show-case.
Jouant le décalage à la perfection, Anna Gavalda a lancé : « Est-ce que c'est si grave que ça ne moins lire, de peu lire ou de ne pas lire entre 18 et 30 ans ? Il y a tellement d'autres choses à faire dans cette tranche d'âge-là. (...) Ce qui est important, ce n'est pas tellement les livres mais la curiosité intellectuelle. » En la matière, le numérique est assuré d'avoir une place dans les pratiques de lecture des 18-30 ans.