Disparition

Alice Munro, prix Nobel de littérature 2013, s’est éteinte

Alice Munro, prix Nobel de littérature 2013 - Photo Peter Muhly AFP

Alice Munro, prix Nobel de littérature 2013, s’est éteinte

Seule canadienne à avoir remporté le prix Nobel de littérature, Alice Munro, spécialiste de la nouvelle, est décédée à l'âge de 92 ans.

Par Charles Knappek
avec AFP Créé le 15.05.2024 à 09h55 ,
Mis à jour le 15.05.2024 à 13h26

Alice Munro, prix Nobel de littérature 2013, est décédée dans la soirée du 13 mai dans la province de l'Ontario, située dans le centre du Canada, où se déroulaient la plupart de ces récits, a précisé à l'AFP son éditrice.

Qualifiée par l'Académie suédoise de « maîtresse de la nouvelle contemporaine », capable « d'accueillir toute la complexité épique du roman en quelques courtes pages », elle avait élevé cette forme littéraire au rang d'art.

Toutefois, malgré ce succès et une moisson impressionnante de prix littéraires engrangés en plus de quatre décennies de carrière, Alice Munro était restée discrète, à l'image de ses personnages, essentiellement des femmes, dont ses textes ne mettent jamais en relief la beauté physique. « Je pense que toute vie peut être intéressante », avait-elle déclaré lors d'un entretien après avoir reçu son prix Nobel.

En langue française ses textes sont disponibles aux éditions de l’Olivier en France et aux éditions du Boréal au Québec. En poche, Points propose également une dizaine de ses œuvres.

« Le monde a perdu l'une de ses plus grandes écrivaines. Elle nous manquera profondément », a déclaré Justin Trudeau, le Premier ministre canadien, en publiant sur X une photo à ses côtés.

Elle était « une virtuose de l'écriture » pour la ministre de la Culture canadienne Pascale St-Onge. « Pendant six décennies, ses histoires ont séduit les lecteurs au Canada et à travers le monde. Elle reste la seule Canadienne à avoir jamais remporté le Prix Nobel de littérature », a-t-elle déclaré.

Écrire, un rêve d’adolescente

Alice Munro a expliqué que devenir écrivaine était son rêve dès l'adolescence, au milieu des années 1940. « Mais à cette époque, on ne pouvait pas annoncer ce genre de choses. Il ne fallait pas attirer l'attention sur soi. Ça avait peut-être un rapport avec le fait d'être canadien, ou d'être une femme. Peut-être les deux », affirmait-elle dans une interview.

Sa première nouvelle, Les dimensions d'une ombre, est publiée dès 1950, alors qu'elle est étudiante à l'université de Western Ontario. De 1968 à 2012, cette femme de lettres écrit 14 recueils de nouvelles (Fugitives, Trop de bonheur, Rien que la vie). Divorces, remariages, retour au pays compliqué : en vingt à trente pages, elles condensent des existences apparemment banales.

« Elle était la plus grande autrice de nouvelles de notre époque. Elle était exceptionnelle en tant qu'écrivaine et en tant qu'être humain », a estimé auprès de l'AFP David Staines, professeur de littérature et ami de longue date.

Nombre de ces écrits, des histoires violentes et belles, ont été publiés dans des magazines prestigieux, dont The New Yorker ou The Atlantic Monthly.

Deux fois récompensée du prix Giller

« J'ai commencé à écrire des nouvelles parce que la vie ne me laissait pas le temps pour un roman », affirmait-elle avec son sens unique de la dérision.

« Elle est notre Tchekhov et survivra à la plupart de nos contemporains », avait prédit la grande romancière et critique américaine Cynthia Ozick.

Margaret Atwood, autre grande autrice canadienne, avait qualifié cette « femme formidable » de pionnière, il y a quelques années. « Le chemin vers le Nobel n'a pas été facile pour elle: les chances qu'une star littéraire émerge à son époque et depuis l'Ontario rural étaient quasiment nulles ».

Alice Munro, qui avait grandi entre un père violent, éleveur de renards et de volailles, et une mère institutrice décédée prématurément de la maladie de Parkinson, a également remporté le prix international Man Booker en 2009. Ainsi que le prix Giller – le prix littéraire le plus prestigieux du Canada – à deux reprises.

En 2009, Alice Munro a révélé qu'elle avait subi un pontage cardiaque et qu'elle avait été traitée pour un cancer.

Sa nouvelle L'Ours traversa la montagne – tirée d’Un peu, beaucoup, pas du tout, retraduit en 2019 par la Française Agnès Desarthe – a été adaptée au cinéma sous le titre « Loin d'elle », avec Julie Christie en malade d'Alzheimer.

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