« On attend sans émotion la remise annuelle des prix », note Raphaël Sorin, dans son blog (sur le site de Libération ), où il fête déjà son 40 ème billet. Et l’ex-éditeur de Houellebecq, du temps où Houellebecq écrivait des livres, d’en incomber la faute à une « rentrée fadasse ». Sorin se trompe : cette rentrée ne fut pas fadasse, en tout pas plus que la précédente ni que l’antépénultième. Mais il se passe quelque chose du côté des prix, c’est certain. Rarement désintérêt fut plus général, y compris chez les professionnels de la profession. Naguère, le Grand Prix du roman de l’Académie française lançait la saison des lauriers. Qui saurait citer, de mémoire, le nom du lauréat de cette année, récompensé jeudi dernier ? Quant au Goncourt, c’est bien simple : cette année, tout le monde s’en fiche. Sauf chez Grasset, bien sûr, où l’on doit croiser les doigts (et s’agiter en coulisses) pour que Michel le Bris remporte la timbale, ce qui ferait du bien au bilan de la maison. Mais l’attente se porte plutôt du côté du Renaudot : pour qui votera le tout frais nobélisé Le Clezio ? F.O.G. prépare-t-il encore un coup, comme certains le murmurent, et comme beaucoup l’espèrent, histoire de réinjecter un peu de sang dans ce cirque passablement nécrosé ? Jean-Louis Fournier devrait avoir plus de chance avec son Fémina. Risquons même un pari : son livre se vendra peut-être davantage que le futur Goncourt. Jean-Marc Roberts, qu’on devinait à la manœuvre sur ce coup-là, a encore démontré son savoir-faire. Son candidat avait reçu le soutien de Jérôme Béglé, dans Match : dans une « Lettre ouverte » aux jurés des prix littéraires, le chroniqueur maison désignait « l’auteur idéal » : Jean-Louis Fernier. Puisqu’on parle de Jean-Marc Roberts, restons sur lui. Il s’affiche en pleine page de VSD , dans la rubrique « Tout ce que vous ne saviez pas sur… ». On y apprend ainsi toutes sortes de choses essentielles : qu’il a 5 enfants, de 3 femmes différentes (mais le journaliste ne précise pas le montant des pensions alimentaires), que sa mère l’appelait « le petit gros », et qu’il a pris sa première cuite à 14 ans. Comme on le voit, c’est très people, mais puisqu’il n’y a plus que ça qui marche… Dans le même VSD, un petit portrait de Bertrand Latour, qui raconte, dans Un milliard et des poussières (chez Hachette littératures), son expérience de chauffeur de limousine pour des VIP. On y apprend que Latour, féru de littérature, s’était essayé au roman en janvier 2007, avec Les yeux plus gros que l’Amérique (Flammarion). Il avoue lui-même en avoir vendu moins de 500 exemplaires. Cette fois, parce qu’il est question, dans son livre, de Kate Moss et autres personnalités d’importance, les ventes décollent… Mais ne crachons pas sur le people. Si Françoise Hardy caracole dans le peloton de tête des meilleures ventes, c’est pour de bonnes raisons. Elle a réussi un superbe passage chez Ruquier samedi soir. Même les deux petits vieux du Muppet Show (Zemmour et Naulleau) étaient sous le charme. Sa prestation, épaulée par un Ruquier très en verve (« Une vraie histoire d’amour, comme on n’aimerait pas en vivre », devait-il résumer à propos de sa liaison avec Dutronc) et lui aussi conquis, lui aura encore fait gagner quelques dizaines de milliers d’acheteurs. Dont votre serviteur… *** P.S. qui n’a rien à voir : VSD , toujours, nous apprend que Frédéric Ferney (ex animateur du « Bateau livre » ) s’est reconverti en conseiller culturel d’Alain Juppé. Par les temps qui courent, et les gens qui nous gouvernent, on ne lui reprochera pas son choix : Alain Juppé, c’était pas si mal, finalement. Mais le pire est peut-être encore à venir. Plus personne ne semble douter que Nicolas Sarkozy a enfin pris la mesure de l’incompétence de Rachida Dati. Ses jours à la Chancellerie sont comptés. Pour autant, le président ne voudrait pas la virer complètement. « Elle serait parfaite à la Culture, pour monter les marches du Festival de Cannes », aurait dit un autre membre du gouvernement. Comme c’est le Figaro de mercredi dernier qui le rapportait, l’anecdote a toutes les apparences de l’authenticité. Elle en dit long sur l’idée qu’on se fait de la culture dans l’actuel gouvernement…