"Pourquoi avoir choisi La plaisanterie ? Car je me souviens d’une scène particulièrement belle. Ludvik y lit quelques vers du poète tchèque Frantisek Halas à son amie Lucie, rencontrée lors d’une permission. Exclu du parti pour une "mauvaise blague" qui n’a fait rire que lui et l’a catalogué comme trotskiste, Ludvik est alors en train d’accomplir ses obligations militaires dans les mines de charbon d’Ostrava. Son amour pour Lucie brise son isolement, tout comme la lecture régulière des poèmes de Halas, victime lui aussi d’anathème politique. Il se retrouve dans leur mélancolie et éprouve à leur lecture une joie authentique, opposable à l’optimisme prescrit par le nouveau régime. Lucie est à son tour bouleversée par cette lecture et se met à pleurer. Milan Kundera ne dit pas pourquoi elle pleure ; il ne dit pas non plus que cette lecture est réparatrice. Il suggère simplement qu’elle fait désormais partie de l’existence de ces deux amants perdus dans l’Histoire ; et ce faisant, le romancier nous dit quelque chose de l’étrange portée de certains livres sur nos vies, celui-ci particulièrement."

20.03 2015

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