Comme Amanda Spiegel, Jean-Marie Ozanne reconnaît avoir été attiré par un métier tourné vers la relation à autrui et vers l’échange. Il ne ressentait pourtant aucune vocation particulière pour le métier de libraire. Au départ, parmi différents petits boulots, il travaille comme infirmier psychiatrique avant d’être mis à la porte de l’HP. Après avoir repris ses études et obtenu une licence de droit, il met finalement à profit un petit héritage de son grand-père pour créer une librairie. "Je fais partie de cette génération qui pensait pouvoir changer le monde avec les livres !" reconnaît a posteriori l’intéressé. Connaissant bien Montreuil pour y avoir été lycéen, il ouvre en 1981, à 27 ans, la seule librairie indépendante de Seine-Saint-Denis. Une gageure à l’époque ! "Certains éditeurs m’ont alors demandé si on lisait à Montreuil !" se souvient celui qui, depuis, est devenu une figure emblématique de la profession avec un établissement figurant au 146e rang de notre classement des 400 premières librairies françaises. "D’ailleurs, il a fallu quatre ans pour que les premiers représentants viennent dans ma librairie." Au démarrage, ce n’était pas gagné. Sans formation, Jean-Marie Ozanne a très vite dû affronter les déficits chroniques et les interdits bancaires. "J’ai alors décidé de suivre des cours à l’Asfodelp, et assez rapidement j’ai pu redresser la barre." En 1990, il a déménagé pour s’installer, dans la même rue, dans un nouveau local où il s’est agrandi deux ans plus tard. Puis, en 2003, il s’est implanté au cœur du nouveau centre de Montreuil, à la-Croix-de-Chavaux, où il occupe 300 m2. "A la fin des années 1990, il y a eu une vraie révolution dans le métier avec l’explosion de l’offre. Du coup, les problématiques ont évolué et le client s’est retrouvé au cœur des préoccupations. En choisissant il y a plus de trente ans de m’installer à Montreuil, je m’inscrivais déjà dans cette démarche."
Mais pour satisfaire son désir de partager et de transmettre, Jean-Marie Ozanne est sorti de son magasin. Non seulement en s’investissant lui-même dans la formation, notamment au sein de l’Institut national de formation de la librairie (INFL), en parrainant des créateurs de librairies désireux de s’installer en Seine-Saint-Denis, mais aussi en promouvant la loi Lang en France et à l’étranger. Il a également cofondé en 1984 le Salon du livre jeunesse de Montreuil à l’organisation duquel il continue de participer. Plus récemment, il a lancé le festival de lecture à voix haute Vox. Enfin, il a développé une petite activité d’édition placée sous le même nom que celui de la librairie. Très tournée vers la littérature traduite, notamment en provenance d’Amérique du Sud, la maison prépare pour mars la parution de plusieurs livres d’auteurs brésiliens, parmi lesquels le septième roman de Moacyr Scliar. Des activités que, pour la plupart d’entre elles, l’ex-patron de Folies d’encre ne compte pas arrêter de sitôt.