«Retards des offices et des réassorts », « multiplication des ruptures de stock », « livres endommagés car mal conditionnés », « commandes morcelées »... Depuis septembre, les libraires déplorent une dégradation des services et délais de livraison, qui leur font rater des ventes et les inquiètent à la veille de la période la plus cruciale de l'année. A Paris, Antoine Fron (Les Traversées) observe ainsi qu'Idiss de Robert Badinter (Fayard) est en rupture depuis quinze jours. A Colmar, François Céard (Ruc) a attendu une semaine pour recevoir La vraie vie d'Adeline Dieudonné (L'Iconoclaste) qui venait d'être primé par la Fnac. Les ruptures ne sont pas seulement dues au raccourcissement des tirages,mais aussi à des dysfonctionnements chez les distributeurs. Chez Prisme, Bouchaib Moudakir évoque « un décalage d'un à deux jours dans les livraisons de certains distributeurs ». Sont particulièrement touchés Interforum, Hachette ou encore UD. Dans une lettre ouverte du 16 octobre publiée par le Syndicat de la librairie française (SLF), dont elle est présidente de la commission commerciale, Maya Flandin (Vivement dimanche à Lyon) s'insurge contre le fait de « ne plus pouvoir annoncer aux clients des délais fiables, alors que les pure players ne souffrent visiblement pas des mêmes pénuries et garantissent une livraison à J+1 ». Sans doute, estime-t-elle, « parce que leurs contrats prévoient des pénalités financières en cas de retard de livraison ».
Chez les distributeurs, Dominique Wettstein, directeur général d'UD, reconnaît « un débordement en septembre. En fractionnant toujours plus leurs commandes, les libraires en augmentent le nombre, surtout lors des pics d'activité. Nous y faisons face grâce aux heures supplémentaires et au travail le week-end. Mais en septembre nous avons eu du mal à trouver du personnel intérimaire. D'où les engorgements, résolus début octobre. » Chez Hachette Distribution, la direction explique que « l'objectif actuel est de lisser les approvisionnements pour éviter les ruptures et de donner aux libraires une visibilité sur les stocks des CRDL de Lyon et Nantes pour qu'ils puissent informer leurs clients avec précision ».
Rappelant que les librairies, par leur indépendance, « restent les meilleurs garants de la pluralité éditoriale », le SLF appelle diffuseurs et éditeurs à se joindre aux libraires pour exiger « des garanties de services ».