Interdiction de mentionner le nom du club, somptueux, historique, interdiction de mentionner son adresse, prestigieuse, au cœur de Londres, interdiction de prendre des photos, hormis dans la bibliothèque où Ken Follett organisait le 12 mars un grand raout pour remercier ses éditeurs venus du monde entier, avant la publication en septembre 2025 de son prochain roman sur l’édification du site de Stonehenge, Circle of days (Le Cercle des jours).
C’est Barbara Follett, l’épouse de l’écrivain depuis 39 ans, ministre sous Gordon Brown, qui du couple, est entrée dans ce club la première, club qui ne compte que « 400 femmes pour 2 700 hommes », comme elle le précise. C’est Barbara, encore, qui tient les rênes du Follett Office, le bureau qui gère intégralement la carrière et la communication de son mari au niveau international. C’est Barbara, enfin, qui prend la parole en premier, comme chaque fois.
Objectif 200 millions
Elle espère que les ventes mondiales de son époux, qui sont estimées à 190 millions d’exemplaires, franchiront la barre des 200 millions avec cet opus. Elle se souvient d’un professeur d’économie « aussi vieux qu’aigri » qui à l’époque où elle était encore étudiante, leur enseignait qu’en période de récession deux choses continuaient à se vendre : les livres et le rouge à lèvres. « Nous sommes donc dans le bon secteur ! » s’exclame cette Madame Loyale, rappelant que l’industrie du livre a généré la « somme colossale » de 7 milliards de livres sterling (8,37 milliards d’euros) au Royaume-Uni en 2023.
Ken Follett prend ensuite la parole. Un « Bonsoir », en français, pour débuter les remerciements adressés aux présents impliqués dans l’édition, la publication ou la promotion de ses ouvrages. Un toast en conclusion, à la « Team Follett » – autrement dit, à tous ceux qui contribuent à son succès – avant d’enchaîner sur la diffusion d’une vidéo promotionnelle pour son nouveau livre, tournée sur le site de Stonehenge.
La Team Follett lève son verre. Parmi les invités, on remarquait la présence de fidèles venus d’Italie, d’Allemagne, à nouveau de l’Ukraine, ainsi que de la France. Robert Laffont, avec son nouveau directeur, Frédéric Martin, nommé en décembre dernier, Audrey Petit, qui a pris la tête du Livre de Poche il y a un an suite au départ de Béatrice Duval, ainsi que toute l’équipe de Glénat – dont Alcante et Steven Dupré, les scénaristes et dessinateurs belges de l’adaptation des Piliers de la Terre en six volumes, dont les deux premiers opus se sont déjà écoulés à 45 000 exemplaires chacun.
Rupture brutale
En sous-texte, on nous révèle que cette invitation a également pour objectif d’apaiser les esprits après de vifs remous sur l’échiquier des maisons d’édition. Le Follett Office avait en effet annoncé en mai 2024 une rupture brutale avec ses éditeurs anglo-saxons historiques. Penguin, pour le Royaume-Uni, depuis 45 ans, et Pan Macmillan pour le marché américain, depuis 35 ans. Ken Follett bascule avec le prochain livre chez Hachette pour le Royaume-Uni, les États-Unis, le Canada et l’ensemble des pays du Commonwealth.
Cette décision est intervenue en marge du départ à la retraite de Jeremy Trevathan, l’éditeur de toujours de Ken Follett, et s’inscrit dans le souhait de l’écrivain de donner un nouvel élan à ses œuvres dans les pays anglophones, inspiré par son succès en France. « Je suis déjà publié en format poche en français par Le Livre de Poche, une filiale d’Hachette dont le dynamisme et la créativité m’ont impressionné. J’ai hâte de collaborer avec les équipes d’Hachette à New York et à Londres », a-t-il déclaré sur son site web.
Dans l'Hexagone, Les Armes de la lumière, cinquième et dernier tome de la saga Kingsbridge, sorti en 2023, s’est vendu à plus de 265 000 exemplaires en grand format chez Robert Laffont, tandis que l’édition poche, parue en janvier dernier au Livre de Poche, approche déjà les 65 000 copies.
Statu quo en France
Ken, nous dit-on à l’oreille sous le méridien de Greenwich, aurait pris cette décision radicale après un déjeuner avec son ex-éditeur, « sans l’aval de Barbara ». En France, le soulagement est général : bien que l'écrivain rejoigne Hachette à l’international, il reste chez Robert Laffont pour le grand format, soit dans le giron du groupe Editis.
En poche en revanche, ce n'est donc pas Pocket, marque du groupe Editis, mais bien Le Livre de Poche, chez Hachette Livre, qui a la primeur de ses livres. Il est vrai que l'auteur gallois a vu ses premiers romans paraître en grand format chez Stock... maison du groupe Hachette qui a notamment publié la première édition de son titre le plus connu Les Piliers de la Terre, en 1990. « Très attaché » à sa relation avec Le Livre de Poche, son éditeur historique, Ken Follett a depuis lors toujours souhaité continuer d’y voir paraître l’intégralité des versions poche de ses livres en langue française.
