Auteurs étrangers : une rentrée prudente

Auteurs étrangers : une rentrée prudente

Echaudés par une année 2017 calamiteuse, les éditeurs de littérature étrangère misent sur les valeurs sûres tout en se risquant à publier quelques auteurs russes dans la perspective du salon Livre Paris dont ils seront les invités d’honneur.

J’achète l’article 1.5 €

Par Claude Combet,
avec Créé le 08.12.2017 à 00h52

Les romans étrangers se vendent moins qu’avant, or ils coûtent chers à la publication en achats de droits et en traduction. Traumatisés par les résultats de leurs ventes en 2017, les éditeurs ont resserré leurs programmes et choisi de publier moins de titres en janvier et février 2018 - 153 contre 180 l’année précédente -, soit une baisse de 17,6 %, se repliant sur des valeurs sûres, des livres récompensés par des prix ou soutenus par une manifestation littéraire.

Outre Aharon Appelfeld, Paul Auster, Louise Erdrich, Elena Ferrante, Arundhati Roy, et un inédit d’Isaac Bashevis Singer, on retrouvera en cette rentrée des grands noms comme Sebastian Barry, avec Des jours sans fin, l’histoire d’un Irlandais de 13 ans émigré aux Etats-Unis et enrôlé de force dans l’armée (Joëlle Losfeld), les Américains Shannon Burke (Dernière saison dans les Rocheuses, 10/18) et Jonathan Franzen avec Phénomènes naturels, une comédie familiale écrite en 1992 avant Les corrections (L’Olivier), le Danois Jens Christian Grondahl (Quelle n’est pas ma joie, Gallimard), le Catalan Juan Marsé, racontant l’assassinat d’une prostituée dans un cinéma barcelonais en 1949 (Cette putain distinguée, Bourgois), le Chinois Mo Yan, prix Nobel de littérature 2012, avec Chat blanc et balançoire, composé de sept souvenirs de jeunesse (Seuil).

Grands prix littéraires étrangers

Cette rentrée n’en fait pas moins l’objet de gros investissements. Les Escales publient en avant-première mondiale, La fêlure, premier roman de la Britannique Kate McNaughton, une enquête sur l’histoire familiale qui mène l’héroïne à Berlin. Plon table sur Jonathan Dee, dont Ceux d’ici confronte les mondes de la ville et de la campagne ; et Belfond mise sur Alexander Maksik (auteur de La mesure de la dérive), L’oiseau, le goudron et l’extase, mettant en scène une réfugiée sur fond de violence conjugale. Flammarion parie sur Elif Shafak, traduite en 40 langues, avec Trois filles d’Eve, une satire violente de la bourgeoisie stambouliote. Et Gallmeister sur Jim Lynch, annoncé comme le nouveau John Irving, avec deux titres : Face au vent, et son premier roman inédit en français, Les grandes marées.

Parallèlement, les éditeurs se rassurent en s’appuyant sur les grands prix littéraires étrangers. Une vie comme une autre, premier roman de Hanya Yanagihara (Buchet-Chastel), une histoire d’amitié masculine, a été couronné par le Kirkus Prize for Fiction 2015, et finaliste du Man Booker, du Baileys Women’s Prize for Fiction et du National Book Award. Le pouvoir de Naomi Alderman (Calmann-Lévy) a reçu le Bailey’s Women’Prize. Exit West de Mohsin Hamid (Grasset), qui raconte la fuite de réfugiés du Moyen-Orient pour la Grèce et les Etats-Unis, s’est retrouvé finaliste du Man Booker Prize. Konbini de Sayaka Murata (Denoël) a remporté le prix Akutagawa, et Trente jours d’Annelies Verbeke l’Opzij Literature Prize (Fleuve éditions). Tandis que Zulma s’appuie sur le Swedish Academy’s Nordic Prize, dit le "petit Nobel", décerné pour l’ensemble de son œuvre à Einar Már Gudmundsson pour nous faire découvrir son chef-d’œuvre, Les rois d’Islande.

Fortes des 70 000 ventes de Luz ou Le temps sauvage, les éditions Anne-Marie Métailié espèrent dans Double fond, le nouveau roman de l’Argentine Elsa Osorio. Déjà publiés et reconnus des lecteurs français, seront au rendez-vous Nadeem Aslam (Seuil), Jami Attenberg, l’auteure de La famille Middlestein (Les Escales), John Banville (R. Laffont), Gudbergur Bergsson (Métailié), Robert Olen Butler (Actes Sud), Elizabeth Crane (Phébus), Friedrich Christian Delius (Fayard), Rachid El-Daïf (Actes sud), Anosh Irani (P. Rey), Hari Kunzru (JC Lattès), José Carlos Llop (J. Chambon), David Malouf (Albin Michel), Giorgio Scianna (Liana Levi) et Kjell Westö (Autrement).

Russes

Dans la perspective du salon Livre Paris, dont la Russie est le pays invité, certaines maisons proposeront des traductions dès janvier : Le dernier rêve de la raison de Dmitrij Mihajlovic Lipskerov (Agullo), L’autre voie de Boris Akounine et L’esprit du loup d’Alexei Varlamov chez Louison éditions, et Les confessions d’un homme amoureux de Robert Engibarian et Bienvenue chez les Russes ! de Kirill Privalov chez Macha Publishing, deux maisons spécialisées dans la littérature russe. Enfin, cette rentrée sera aussi l’occasion de découvrir les premiers titres de Delcourt en littérature, Une ville à cœur ouvert de la Polonaise Zanna Sloniowska, une saga ukrainienne, et Peur de l’Allemand Dirk Kurbjuweit. A moins qu’on ne préfère un titre rare comme Mourir après le jour des Rois du Mexicain Manuel de la Escalera (Bourgois), sorti clandestinement de prison et publié en 1966 sous pseudonyme. d C. C.

Les dernières
actualités