8 janvier > roman France

Michel Bernard- Photo DR/LA TABLE RONDE

En mars 1916, à Bar-le-Duc, dans la Meuse, Maurice Ravel ressemble à "un petit ours d’un mètre soixante et un" avec sa pelisse et son casque d’artilleur. A 41 ans, le musicien, qui vient de composer son Trio en la majeur, s’approche de sa première affectation dans la zone de front et s’éloigne de la douceur du Pays basque où il aime à séjourner et composer. Un an plus tôt, après avoir été maintes fois recalé, il a enfin été incorporé dans un régiment du train, devenant ce que l’on nomme en argot un "tringlot".

Le conducteur Ravel sillonne la campagne derrière son volant, porte assistance aux camarades tombés en panne. Pour rompre "la routine du casernement", il se promène dans les rues de la ville, sirote un Vermouth cassis au Café des Oiseaux. Il prend ensuite régulièrement la route de Verdun, qui a été vidée de la majorité de sa population civile mais qui a moins été touchée qu’il ne le pensait. Sa camionnette, il décide de l’appeler Adélaïde. "La guerre l’a distrait de lui-même, avant de le soustraire à la vie", nous dit Michel Bernard.

Celui-ci accompagne un Ravel dont le rapport à la musique a changé, un Ravel sensible au chant d’un oiseau. Pendant son service à l’ambulance chirurgicale, il découvre un piano dans un château. Un demi-queue, "dans son habit de chêne clair et luisant", sur lequel il joue du Chopin. L’auteur de La tranchée de Calonne (La Table ronde, 2007) et de Pour Genevoix (La Table ronde, 2011) montre Ravel songeant encore à Alain-Fournier et au Grand Meaulnes qui l’a enchanté. Rentré à Paris avant de s’installer à Monfort-l’Amaury, il est un homme dont l’énergie a été décuplée par la guerre. Le texte de Bernard, lui, transporte d’un bout à l’autre avec sa finesse, sa mélodie et sa lumière. Al. F.

Les dernières
actualités