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J’utilise l’écriture comme une caméra pour immerger les lecteurs dans l’époque." Historien, archéologue, vulgarisateur ? "Dites simplement curieux…" Alberto Angela ne s’encombre pas d’étiquettes. Il sait combien celles-ci peuvent finir par lui coller à la peau. Alors, il choisit la liberté. Celle qu’il donne à son écriture comme celle qu’il s’accorde pour traiter de Rome et de son Empire. "J’adore voyager dans le temps. C’est comme ouvrir une malle dans un grenier." Il faut dire qu’il sait y faire. En Italie, c’est une star des librairies et de la télévision où il a créé sur la Rai 3 avec son père Piero Angela le programme "Ulisse", une série documentaire consacrée à la science et à l’histoire qui balaie un champ très large, de l’homme de Néandertal au débarquement de Normandie.

Alberto Angela ne se destinait pas à devenir ce passeur d’époque. Après un bac au lycée Chateaubriand de Rome, d’où son excellent français, il s’oriente vers les sciences naturelles et la paléoanthropologie. Il séjourne dans quelques universités américaines (Harvard, Ucla, Columbia) puis fouille pendant dix ans sur les terrains africains. A l’occasion d’un reportage à la télévision suisse italienne, on remarque son talent pour raconter. La suite s’impose comme une évidence. Bien vite, il se passionne pour le monde romain qui reste pour lui d’une incroyable modernité. En 2007, son premier livre, non traduit en français, raconte vingt-quatre heures dans la Rome antique. C’est un best-seller.

Le sens de la mise en scène

Avec Les trois jours de Pompéi, il poursuit sa manière de faire et remet en cause quelques idées reçues sur l’éruption, comme sa date, sans doute en automne plutôt qu’à l’été 79. "J’utilise l’écriture comme si c’était une caméra pour immerger les lecteurs dans l’époque. Je veux qu’ils vivent les dernières heures de Pompéi comme les dernières heures du Titanic. On peut d’ailleurs visiter Pompéi le livre en main, en allant de maison en maison. On y verra que tout ce que j’avance est plausible. J’ai enquêté et je me suis renseigné auprès des meilleurs spécialistes. Je ne défends pas une thèse. Je suis un journaliste sur le terrain."

Ce Tintin dans le passé rappelle qu’un tiers de Pompéi est toujours enseveli. D’autres anecdotes vont donc surgir, un jour, et il sera là pour en rendre compte, à sa manière. Pas de doute, Alberto Angela a le sens de la mise en scène de l’histoire. On l’a vu lors de son précédent succès, Empire (Payot, 2016) dans lequel il raconte Rome et sa société à l’époque de Trajan à travers une pièce d’un sesterce qui passe d’un personnage à un autre.

Né à Paris où son père était correspondant de la Rai, le jeune Alberto a vite compris en visitant les musées qu’il fallait changer la manière de transmettre en privilégiant l’expérience directe. Etudiant, il en a tiré une thèse remarquée et un viatique pour l’avenir. Il est devenu cet homme pressé qui prend son temps. Sauf pour une chose. L’enthousiasme.

Laurent Lemire

Les trois jours de Pompéi d’Alberto Angela, Payot. Traduit de l’italien par Catherine Pierre-Bon. Prix : 24 euros ; 480 p. Sortie : 11 octobre. ISBN : 978-2-228-91863-3

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