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La protection des personnages de fiction (1/2)

La protection des personnages de fiction (1/2)

Les personnages de fiction, comme Tintin, Tarzan ou Goldorak, peuvent bénéficier d'une protection au titre du droit d'auteur. 

Les personnages de fiction, et notamment le personnage de Tintin, font l’objet d’un abondant contentieux relatif à leur protection par le droit d’auteur. C’est un enjeu capital pour le secteur du livre.   

Très récemment encore, la SA Moulinsart, titulaire exclusif des droits de l’auteur Hergé, a encore frappé. En effet, la société a assigné pour contrefaçon Xavier Marabout, peintre breton, considérant que sa série intitulée Hopper-Hergé, dans lequel il mêle les univers picturaux et narratifs des deux auteurs en intégrant notamment le personnage de Tintin dans des paysages de l’Amérique des années 50, constitue une atteinte au droit de reproduction et au droit moral de l’auteur belge. Cette affaire est toujours pendante devant le Tribunal judiciaire de Rennes.

Réputée pour protéger d’une main de fer son personnage de papier, la SA Moulinsart multiplie les procès en contrefaçon contre tous ceux qui oserait s’approprier le nom, les caractéristiques ou l’apparence physique du reporter belge à la houpette.

Œuvres originales

Ainsi, les personnages de fiction, célèbres ou non, peuvent bénéficier d’une protection au titre du droit d’auteur, accordant aux auteurs et leurs ayants droit le droit d’en défendre l’utilisation devant les tribunaux.

Mais la propriété littéraire et artistique n’est pas le seul moyen pour protéger l’apparence et le nom des personnages de fiction.

Le droit d’auteur protège les œuvres littéraires et graphiques, peu importe le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination. Il apparaît ainsi que les personnages de fiction peuvent être protégés par le droit d’auteur. En revanche, pour bénéficier de cette protection, le personnage doit s’incarner à travers une forme tangible – notamment par le dessin – mais également être original, c’est-à-dire refléter l’empreinte de la personnalité de son auteur. C’est ainsi que, répondant à ces conditions, les personnages de Maya l’Abeille, Goldorak et la Panthère rose ont été protégés par le droit d’auteur en tant qu’œuvres de l’esprit.

"Personne individualisable"

Les personnages dessinés ou tirés d’une œuvre audiovisuelle ne sont pas les seuls à faire l’objet de cette protection ; les personnages littéraires peuvent également faire l’objet d’une protection être protégés par le droit d’auteur. Dès lors que les caractéristiques physiques et morales d’un personnage issu d’un roman sont suffisamment précises et étoffées par son auteur pour "donner naissance à une personne individualisable", les juges considèrent que le personnage a une consistance suffisante pour être protégé par le droit d’auteur. Dans ce sens, il a été jugé que Tarzan, mais également Jane sa compagne et Chita la guenon, constituaient des oeuvres originales protégées par le droit d’auteur.

Il a été également considéré que le titre d’un roman ainsi que le nom d’un personnage pouvaient constituer une œuvre de l’esprit indépendamment de ses éléments d’identification. Ainsi, le Tribunal de grande instance de la Seine a jugé, en 1959, que le nom de Chéri-bibi, personnage d’une série de romans policiers, était une création de l’esprit dont l’auteur est fondé à faire respecter ses droits.

Monopole d'exploitation

Cette protection, bienvenue, accorde à son auteur un monopole d’exploitation sur son personnage, dont il peut interdire la reproduction et en contrôler l’utilisation.

A la mort d’un auteur, se pose alors la question du sort de ses personnages. D’autres auteurs peuvent-ils continuer de narrer leurs aventures ou doit-on mettre un point final à leur parcours afin de respecter l’intégrité de l’œuvre ? Cela dépend des personnages, des auteurs… et de leurs ayants droit. Les Aventures de Blake et Mortimer se poursuivent depuis 1996, alors même qu’Edgar P. Jacobs s’est éteint en 1987. A contrario, pour le jeune reporter Tintin, la société Moulinsart n’a pas souhaité donner suite à ses aventures.

Si le droit d’auteur semble depuis des années être très protecteur des auteurs en leur permettant de bénéficier à titre exclusif des droits sur leur personnage de fiction, l’exception de parodie paraît, toutefois, relativiser cette tendance. Dans une affaire opposant les ayants-droits d’Hergé aux Éditions du Léopard, spécialisées dans la publication d’ouvrages humoristiques, la Cour d’Appel de Paris a décidé, le 18 février 2011, de rejeter la demande des ayants-droits d’Hergé de condamnation pour contrefaçon. Ainsi, les ouvrages Le Crado pince fortLe Vol 714 porcineysL’Oreille qui saitLa Lotus bleue et Saint Tin au Gibet ont bénéficié de l’exception de parodie, dans la mesure où l’humour et l’absence de risque de confusion avec l’œuvre originale, ont été retenus.
 
(à suivre)
 

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