Avant de perdre la foi, le dessinateur argentin Nicolás Arispe a eu une éducation religieuse stricte, durant laquelle il s’est passionné pour les illustrations édifiantes accompagnant les histoires de la Bible offerte par ses parents. Le voilà produisant son propre imaginaire, à base de paysages désolés et de représentations zoomorphiques dans un recueil au graphisme fastueux. Il retrace sept épisodes de l’Ancien Testament, décalés dans le temps et l’espace.

La création du monde s’organise dans une centrale nucléaire ; le sacrifice d’Abraham sur la banquise, au milieu des ours blancs. L’archange Michel a une tête de caïman ; Ezéchiel est un minotaure en costume. Job erre dans un Sahara parcouru par les milices. Les lamentations de Jérémie le figurent en oiseau perdu. La punition de Jonas consiste à le jeter à l’eau depuis une goélette Renaissance.

Réalisés au Rotring 0,2, l’un des plus fins, les dessins de Nicolás Arispe semblent des gravures. N’en disposant qu’un à trois par page, réduisant à son essentiel lyrique le texte qui n’occupe pas plus d’une ligne sous chacun, il les laisse respirer dans un ouvrage à la grande force symbolique. Fabrice Piault