20 avril > roman Royaume-Uni

Même si "les regrets ne sont que des déchets", ils ont le pouvoir d’orienter une existence. Difficile de ne pas regarder en arrière, mais ce souvenir se révèle téméraire. James Scudamore force ses héros à les affronter. On ne sait pas grand-chose de cet homme, si ce n’est qu’il a grandi au Japon ou au Brésil, où se déroule son second roman Fils d’Héliópolis (10/18, 2010, 2014), finaliste du Man Booker Prize. Le premier, La clinique de l’amnésie (Stock, 2014), a obtenu le prix Somerset-Maugham.

Il nous entraîne cette fois dans les ruines de Wreaking, un hôpital psychiatrique. "Quand on n’est pas assez fort, le monde vous écrase comme une goutte de pluie." C’est pourquoi ce lieu désertique constitue un abri pour Jasper Scriven. Il y déambule des heures, en traînant sa bouteille d’oxygène. Le vieillard ne peut s’empêcher de songer que "le passé est toujours là. Soulevez la bonne pierre, et les yeux d’un autre temps apparaissent, luisants comme des perles dans la crasse."

On ne peut guère chloroformer les sentiments, et ceux de Jasper sont tournés vers le passé. Un seul élément le raccroche au présent, sa fille Cleo. Monteuse pour une chaîne d’info, elle tient à ce père perdu. Cette jeune femme, portant une prothèse oculaire, renferme des blessures invisibles. Celles d’une enfance à Wreaking, un lieu hanté par le mal-être d’êtres assommés par les médicaments ou les électrochocs. Mais c’est aussi un lieu de vie, celui d’une famille boiteuse, parfois heureuse.

Roland le connaît parfaitement. Pourquoi veille-t-il secrètement sur Cleo ? Ces parcours télescopés vont devoir briser les entraves qui nous empêchent d’avancer. A l’heure où "c’est le monde tout entier qui est devenu fou", la musique fantomatique de Scudamore se veut pleine d’amour. K. E.

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