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L’INHA en pole position

Depuis sa réouverture dans la salle Labrouste, la bibliothèque a multiplié ses places de lecture. De 120, elle est passée à 400 places disponibles. - Photo Yohan Zerdoun/INHA

L’INHA en pole position

La bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art, qui accueillera le 7 décembre la remise du 8e grand prix Livres Hebdo des Bibliothèques francophones, présidé par l’écrivaine Maylis de Kerangal, bénéficie d’une fréquentation record depuis sa réouverture au public il y a tout juste un an après de longues années de travaux. Premier bilan.

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Par Clémence de Blasi,
Créé le 17.11.2017 à 11h58

la bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA) s’inscrit dans un héritage : celui de la bibliothèque d’art et d’archéologie de Jacques Doucet, grand couturier et mécène de la fin du XIXe siècle. Initialement constitué dans ses appartements du 16e arrondissement de Paris, rue Spontini, le fonds de ce collectionneur est cédé en 1917 à l’université de Paris. Jacques Doucet se consacre alors à la création d’une nouvelle bibliothèque dédiée à la création littéraire contemporaine, l’actuelle bibliothèque littéraire Jacques-Doucet, installée place du Panthéon. Celle d’art et d’archéologie déménage plusieurs fois : d’abord à l’hôtel Salomon de Rothschild, rue Berryer, puis rue Michelet, près du Luxembourg, dans le bâtiment de l’Institut d’art et d’archéologie construit spécialement pour elle.

"Quand on a fermé la salle Ovale, on avait à peu près 5 200 lecteurs inscrits. Désormais nous sommes à presque 9 500 inscriptions." Anne-Elisabeth Buxtorf, directrice de la bibliothèque de l’INHA- Photo MARC RIOU/INHA

Effet d’aubaine

Problèmes de place, de budget : comme nombre d’autres bibliothèques universitaires, les années 1980 l’éreintent. Après une longue période de réflexion, elle change d’adresse une nouvelle fois en 1992 et prend ses quartiers dans la salle Ovale du site historique de la Bibliothèque nationale de France (BNF), au 58, rue de Richelieu, dans le 2e arrondissement de Paris.

Au même moment émerge l’idée de fonder un Institut national d’histoire de l’art : celui-ci sera créé à partir de la bibliothèque du collectionneur. "Généralement, on crée un institut de recherche, et ensuite on se dit qu’il lui faut une bibliothèque. Ici, il s’est passé exactement l’inverse : comme il existait déjà une bibliothèque très importante, connue de tous les historiens de l’art en France et dans le monde, il y a eu un effet d’aubaine", observe avec amusement Anne-Elisabeth Buxtorf, directrice de la bibliothèque de l’INHA depuis 2013. L’INHA voit le jour en 2001 ; la bibliothèque d’art et d’archéologie Jacques-Doucet lui est intégrée deux ans plus tard.

Les trois institutions prestigieuses que sont la BNF, l’Ecole nationale des chartes et l’INHA, dirigé depuis 2016 par Eric de Chassey, se voient ainsi réunies au sein du quadrilatère Richelieu, qui s’érige comme un pôle majeur autour de l’histoire de l’art, du patrimoine et de l’archéologie. Au début des années 2000, l’architecte Bruno Gaudin est chargé du projet de modernisation pharaonique lancé par la BNF, propriétaire de l’ensemble du site. Comme celle-ci souhaite qu’une partie du quadrilatère reste ouverte au public sans interruption, le site est divisé en deux zones, successivement vidées puis rénovées. La première, qui comporte le nouvel emplacement de la bibliothèque de l’INHA, transférée dans la salle Labrouste, classée monument historique depuis 1983, rouvre ses portes le 15 décembre 2016. Les travaux de la seconde zone, qui devrait être achevée en 2020, n’ont débuté que cet été.

Bibliothèque de référence

Sous l’impulsion des historiens de l’art André Chastel et Jacques Thuillier, familiers du libre accès des bibliothèques universitaires américaines, la bibliothèque de l’INHA ouvre son magasin central, organisé selon la classification de la bibliothèque du Congrès, aux usagers. "Henri Labrouste a créé la salle et le magasin central en 1860, à l’époque où l’on commence à séparer les livres des lecteurs. Le défi des architectes a été d’arriver à répondre à la demande de programmation de l’INHA, tout en respectant le travail de Labrouste et les contraintes inhérentes au bâtiment", se remémore la directrice de la bibliothèque.

Pour devenir la bibliothèque française de référence en histoire de l’art, celle de l’INHA réalise un immense travail d’acquisitions. Elle intègre également plusieurs autres collections, à l’instar de l’ancienne bibliothèque centrale des musées nationaux, qui se trouvait jusqu’alors dans les murs du musée du Louvre. Le 1er janvier 2016, elle a accueilli les 300 000 documents qui la constituaient, ainsi que son personnel. Au total, la bibliothèque de l’INHA emploie désormais une centaine de professionnels, parmi lesquels une trentaine de moniteurs étudiants, qui veillent sur un fonds de 1,7 million de documents déployés sur une surface de 4 500 m2.

Fréquentation record

Depuis sa réouverture dans la salle Labrouste, il y a près d’un an, la bibliothèque a multiplié ses places de lecture. De 120, elle est passée à 400 places disponibles, pour 62 heures d’ouverture par semaine, contre 54 heures auparavant. "Quand on a fermé la salle Ovale, on avait à peu près 5 200 lecteurs inscrits. Désormais nous sommes à presque 9 500 inscriptions, et cela ne cesse de progresser", se réjouit Anne-Elisabeth Buxtorf.

L’établissement est fréquenté par des étudiants en histoire de l’art, des chercheurs, des maîtres de conférences, des doctorants, et aussi par un nouveau public, celui du personnel scientifique des musées. Outil indispensable à leur travail, un espace moderne de reproduction a vu le jour. Celui dédié à la consultation des collections patrimoniales, qui n’existait jusqu’alors que sur rendez-vous, est désormais ouvert tous les après-midi. Des programmes de recherche, pilotés conjointement par des chercheurs de l’INHA et des conservateurs de sa bibliothèque, sont également développés. L’un d’eux a déjà fait l’objet d’une exposition - "Ornements - XVe-XVIIIe siècles. Chefs-d’œuvre de la collection Jacques Doucet" - ainsi que d’une publication.

"Il nous reste encore à développer l’accueil avec la BNF, remarque la directrice. Nous avons déjà mis en place une carte commune, qui permet aux usagers de bénéficier facilement de l’ensemble des possibilités du site : c’est une première étape, mais nous voudrions aller encore plus loin." La bibliothèque de l’INHA pense actuellement sa politique de numérisation et d’accès aux ressources à distance, afin de pouvoir se développer plus largement hors du site.

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