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La journaliste Elise Lucet a déjà recueilli près de 300 000 signatures depuis qu’elle a décidé de pétitionner pour faire échouer le projet de directive européenne sur le secret des affaires. Ce projet a été initié en novembre 2013 et vise officiellement « la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites ».

La démarche de la productrice de l’émission Cash investigation est appuyée par celle de la Ligue des Droits de l’Homme et de l’Association européenne de défense des Droits de l’Homme ; car le projet de directive a été adopté le 16 juin 2015 par la Commission des affaires juridiques du Parlement européen et attend d’être débattu à Strasbourg, en séance plénière.

Les députés français ont failli, avant l’heure, adopter, au triste mois de janvier 2015, une proposition de loi créant un nouveau délit dans le code pénal pour protéger le « secret des affaires  ». Il s’agissait de protéger, au titre du secret des affaires, toute information révélant notamment « du potentiel scientifique et technique, des positions stratégiques, des intérêts commerciaux et financiers ou de la capacité concurrentielle de son détenteur » et mettant donc en danger la « valeur économique ».

Une même idée avait déjà émergé en janvier 2012 et abouti au vote, en première lecture seulement, d’un texte aux mêmes desseins, avant que l’actualité n’ait poussé les parlementaires à d’autres chantiers.

Cette fois, la « violation du secret des affaires » devait être punie d'une peine maximale de trois ans de prison et de 375 000 euros d’amende en sus des dommages-intérêts au profit de la partie civile…

Mais il existe déjà un secret des correspondances et « l’utilisation abusive d’informations privilégiées »…

La nouvelle disposition aurait été certes bien plus claire et coercitive, tout en limitant très fortement les livres portant sur… les « affaires » (qui sont le recours de bien des journalistes à qui leur rédaction ne donne plus les moyens d’enquêter au long cours) la finance, les industries polluantes. Et, bien entendu, les lanceurs d’alertes, qui ne bénéficient en France d’aucun statut juridique spécifique.

Il était prévu un article 35 visant à amender la loi du 20 juillet 1881, dite « sur la liberté de la presse », pour que les journalistes puissent dénoncer des « infractions éventuellement commises par une entreprise ». Ceux-ci s’en sont indignés et ont fait capoter le texte en moins de 36 heures.

Il n’est pas sûr que, cette fois-ci, le projet européen, qui menacera journalistes, auteures et éditeurs de documents citoyens sur les entreprises soit endigué aussi promptement.

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