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Il l’appelle "mon héros". Et le ton de galéjade avec lequel Olivier Chantraine accompagne cette présentation ne masque pas le premier degré. Car Philippe Djian a véritablement "changé [sa] vie". Grâce à l’écrivain, l’une de ses idoles littéraires depuis l’adolescence avec Jim Harrison, l’homme de 45 ans que l’on rencontre chez lui, à Maussane-les-Alpilles, ce concentré de Provence où il a grandi, a enfin réalisé son rêve de toujours : écrire de la fiction. Un élément perturbateur, son premier livre, paraît sous la couverture de Gallimard, celle de son mentor, soutien jusqu’au bout dans l’aventure.

"Marcher sur la queue du tigre (réveiller ce qui est endormi)", c’est l’intitulé des ateliers d’écriture de la NRF animés par Philippe Djian qui a incité Olivier Chantraine à franchir le pas. En février 2014, il s’inscrit à une première session où il arrive avec une idée de nouvelle puis s’en offre une deuxième quelques mois plus tard, apportant le projet de ce premier roman vif et drôle dont le héros narrateur, analyste dans un cabinet de conseil en optimisation fiscale, est un charmant outsider quadragénaire, sujet à d’incontrôlables crises d’aphasie, qui doit son poste à l’entregent de son ministre des Finances de frère.

Bouddhiste

Ce monde des entreprises multinationales, Olivier Chantraine le connaît bien pour en avoir fait partie. "Très doué pour bien faire quelque chose pour lequel je n’étais pas fait", commente celui qui se souvient avoir souvent bouquiné en cachette dans son grand bureau de "chef des opérations". "Dès le lycée, je voulais faire un bac littéraire. J’ai décroché un bac scientifique pour finalement intégrer une école de commerce…" Le malentendu a duré quinze ans. Le temps de se marier - très jeune -, d’avoir trois enfants - vite -, de divorcer. "J’ai longtemps vécu à deux mille à l’heure." Avant que ne s’impose le besoin de quitter Paris et d’abandonner des nouvelles perspectives de carrière à l’étranger pour rentrer sur ses terres d’enfance.

Cap au sud et changement de vie : désormais, il épaule sa compagne, mère de ses deux plus jeunes fils, qui a monté L’Epicerie Locale, un atelier de fabrication artisanale de biscuits bio et sans gluten. Bouddhiste depuis une dizaine d’années, l’ancien cadre affairé et frustré est devenu un garçon qui se décrit "placide" et chérit les balades solitaires avec son chien dans les collines.

En dehors de ses stimulants encouragements, Olivier Chantraine est reconnaissant à son maître en littérature de lui avoir transmis quelques méthodes d’écriture dont le goût de la discipline qui, allié à la pratique de la méditation, lui a permis de se mettre à sa table de travail tous les jours de la semaine de 5 heures à 9 heures du matin et douze heures par jour les week-ends, pendant un an. D’autres conseils ont été très utiles à l’apprenti romancier qui écrivait en avançant très vite pour corriger beaucoup ensuite : ne pas continuer tant que l’on n’est pas totalement satisfait de la phrase que l’on vient d’écrire. Accorder une grande attention au rythme. Et, surtout, avoir du plaisir. Le disciple a visiblement bien assimilé les leçons.

Véronique Rossignol

 

Un élément perturbateur, d’Olivier Chantraine, Gallimard. 19 euros, 278 p. Sortie : 24 août. ISBN : 978-2-07-274033-6

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