Justice

L’audience du 18 mai à la 17e chambre du tribunal de grande instance de Paris était un parfait exemple du dogme judiciaire du Front national : ne jamais rien lâcher, même si l’affaire paraît perdue. En l’occurrence, l’issue de l’assignation contre l’éditeur Jacob-Duvernet, accusé d’atteinte à la vie privée par Steeve Briois, maire FN d’Hénin-Beaumont, ne devrait pas réserver de surprise.

Le différend remonte à la publication fin 2013 du livre d’Octave Nitkowski Le Front national des villes & le Front national des champs, et a déjà connu un premier tour complet, du référé jusqu’en Cour de cassation. Celle-ci a jugé que l’évocation de l’homosexualité de Steeve Briois dans l’enquête pouvait se justifier par l’information qu’elle apportait au sujet d’intérêt général concernant "l’évolution d’un parti politique qui a montré des signes douverture à l’égard des homosexuels à l’occasion de l’adoption de la loi relative au mariage des personnes de même sexe" (arrêt du 9.4.2015, disponible sur Livreshebdo.fr).

L’avocate Léa Forestier, qui défend toujours l’auteur bien que l’éditeur ait fait faillite entre-temps, a brandi cet arrêt dès l’ouverture des débats d’une procédure relancée au fond. Elle a pris de court Me Dassa-Le Deist, qui remplaçait presque au pied levé l’avocat historique du FN, Me Wallerand de Saint-Just, devenu trésorier du parti d’extrême droite.

Point fixe de cette affaire, le très jeune Octave Nitkowski, originaire d’Hénin-Beaumont, étudiant en deuxième année à Sciences po et en histoire à la Sorbonne, était venu lui-même plaider sa cause avec détermination et passion, sous l’œil inquiet de son avocate et de ses parents, impliqués dans la mesure où leur fils était mineur lors de la publication de son livre. Face à David Dassa-Le Deist, insistant sur quelques contradictions, il a fait valoir que l’orientation sexuelle de Steeve Briois méritait bien d’être évoquée en ce sens qu’elle révélait une transformation du FN, qu’elle était de toute façon connue localement et que la presse avait été lâche en la taisant. Les médias ne lui en veulent pas pour autant, l’ayant soutenu pour certains au point que Michel Field s’est trouvé aussi assigné en raison de son évocation de l’affaire sur LCI. Le jugement sera rendu le 8 juillet.

Hervé Hugueny

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